Haïti: une intervention fondée sur les droits humains est incontournable

Haïti
Presque la moitié de la population haïtienne souffre de famine exacerbée par la crise. Photo: FAO.
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Publié 08/09/2023 par Annik Chalifour

Depuis l’assassinat du président haïtien Jovenel Moïse en juillet 2021, les réunions-discussions en Haïti et à l’international se succèdent sans accords vers le rétablissement de la paix dans ce pays ravagé par le crime organisé. En fait les positions se durcissent encore plus.

On s’approche du 15 septembre, date fixée par le Conseil de sécurité de l’ONU pour se pencher sur la proposition du Kenya à l’effet de diriger une force policière multinationale en Haïti.

Prioriser l’humanitaire

Du côté de la communauté humanitaire internationale, on réclame une réponse urgente fondée sur les droits humains.

Dans son Rapport mondial 2023, Human Rights Watch rapporte que plus de 42% de la population haïtienne dépend de l’aide humanitaire; 40% fait face à une insécurité alimentaire endémique; 22% des enfants souffrent de malnutrition chronique.

Depuis janvier 2023, plus de 2500 personnes ont été tuées, près de 1000 blessées et au moins 970 ont été kidnappées, révèle l‘OCHA dans Le National de Port-au-Prince.

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Tandis que l’UNICEF sonne l’alarme face aux taux élevés d’enlèvements de femmes et d’enfants.

Vivre en suspens

La violence armée s’ingère dans les hôpitaux. L’insécurité, les pénuries de carburant et d’eau potable freinent l’accès aux soins médicaux.

L’économie locale est en chute libre.

De nombreuses familles de la zone métropolitaine de Port-au-Prince, fuyant le violent saccage, se sont réfugiés dans plus d’une vingtaine d’établissements scolaires convertis en hébergement temporaire.

«C’est l’enfer», m’a confié un ami qui a dû récemment relocaliser sa famille depuis leur quartier Carrefour-Feuilles chez des proches à Delmas.

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Par ailleurs les élèves demeurent les grandes victimes de l’insécurité. Pendant que les conditions de vie déjà difficiles des étudiants de l’Université d’État d’Haïti se détériorent de plus en plus.

Action d’urgence requise

Ces constats ne devraient-ils pas nous aligner prioritairement sur une action d’urgence immédiate?

D’autant plus que ni le gouvernement provisoire haïtien, ni la Police nationale, ni l’armée haïtienne, ni autres entités n’arrivent à maîtriser la gestion de la crise.

Dans de telles conditions, «la pression commune de gouvernements étrangers et d’institutions internationales est en mesure d’enrayer un conflit que personne ne maîtrise plus», selon la Revue internationale 1998 du Comité international de la Croix-Rouge (CICR).

Rappelons que le CICR est chargé de l’application du Droit International Humanitaire en temps de conflits armés internationaux et intérieurs visant la protection des non-combattants (population civile, personnel humanitaire et médical, blessés, prisonniers).

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Intervention incontournable

Pour qu’une action humanitaire puisse se concrétiser en Haïti, il faudrait tout au moins pouvoir entretenir des pourparlers ciblant la mise en place de corridors de paix partout dans ce pays.

Cela implique la négociation (pratiquement impossible) avec les gangs armés…

Devant l’impossible, on fait face à l’inévitable évidence: la mise en œuvre d’une intervention d’urgence afin de rétablir la sécurité sur l’ensemble du territoire haïtien pour assurer sa stabilité socioéconomique et politique.

Une intervention d’urgence fondée sur les droits humains en vertu de la Constitution d’Haïti (art. 41), de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme (art. 13), et du Droit International Humanitaire (Protocole II) visant la protection des non-combattants victimes d’un conflit armé intérieur.

Opération bipartite essentielle

Réitérons que le rétablissement de la sécurité ne règle pas tout…

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Pour qu’Haïti puisse revivre, les Haïtiens doivent reprendre leur vie en mains: se loger, s’alimenter, veiller à leur santé, subvenir à leurs besoins.

L’intervention d’urgence doit donc incontestablement s’accompagner d’un volet humanitaire en appui aux experts sur le terrain.

Notamment le CICR et la Croix-Rouge haïtienne, MSF, incluant le personnel localement embauché et les travailleurs humanitaires internationaux, dont le rôle est d’intervenir en temps de crise selon les principes de la proximité, de la neutralité et de l’impartialité.

Renaissance économique

Dans le contexte d’une situation de sécurité nationale stabilisée et d’une gouvernance imputable rétablie en Haïti, nous pourrons véritablement entretenir des relations mutuellement profitables entre pairs.

Une collaboration renouvelée avec Haïti est définitivement possible et souhaitable. Selon notre besoin mutuel de préserver notre patrimoine continental incluant la région des Caraïbes, et de développer nos ressources et relations économiques au sein des Amériques que nous partageons.

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Compétences haïtiennes

L’expérience, les connaissances et les compétences haïtiennes existent!

Rappelons, entre autres, le Groupe de Réflexion et d’Action pour une Haïti Nouvelle (GRAHN-Monde) visant la construction d’une société plus égalitaire, fondée sur l’éducation, le respect de l’environnement, le culte du bien commun.

Le Réseau national de promoteurs du tourisme solidaire (RENAPROTS) proposant un menu de parcours écotouristiques, impliquant plus de 20 partenaires locaux, axés sur la découverte du patrimoine haïtien et la promotion des produits locaux d’Haïti.

Le pouvoir citoyen. Les mouvements coopératifs.

Le Parc de Martissant.

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Le commerce international solidaire Nord-Sud avec Haïti selon les traces exemplaires de la Coopérative québécoise nOula, partenaire de l’association Haïti Futur-Canada.

Quand la paix reviendra, ravivons nos rapports avec Haïti: ce n’est pas un pays maudit mais mal connu.

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