Les nouveaux arrivants sont-ils tolérés ou réellement acceptés?

7e Forum de la Fondation Sylvenie Lindor

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Des participants à la 7e édition annuelle du Forum multiculturel de la Fondation Sylvenie Lindor, à Toronto. Photos: Hamza Ziad, l-express.ca
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Publié 26/12/2025 par Hamza Ziad

«Depuis des années, il y a un mot que j’ai éliminé de mon dictionnaire: la tolérance [envers les nouveaux arrivants]», affirme Antoine Dérose, professeur au Collège Boréal et lauréat du Prix Intégration 2025 de la Fondation Sylvenie Lindor.

Pour lui, la distinction entre tolérance et acceptation est fondamentale. «Comme immigrants au Canada, nous acceptons les autres. C’est pour cette raison que nous devons être acceptés et non simplement tolérés.»

Il a développé ce propos lors la 7e édition annuelle du Forum multiculturel de la Fondation Sylvenie Lindor, le 20 décembre, à Toronto.

Antoine Dérose
Antoine Dérose.

«La tolérance renvoie à une coexistence minimale, tandis que l’acceptation implique une reconnaissance réelle et égalitaire au sein de la société.»

Antoine Dérose souligne également l’importance de distinguer assimilation et intégration dans le parcours des personnes nouvellement arrivées.

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S’intégrer, précise-t-il, ne signifie pas renier son héritage culturel, mais le préserver tout en respectant les règles, les valeurs et les traditions du pays d’accueil, en l’occurrence le Canada. Une condition qu’il juge essentielle pour favoriser une inclusion durable.

L’accueil, une étape déterminante du parcours migratoire

Dans une entrevue accordée à l-express.ca, Amikley Fontaine, fondateur et président-directeur général de la Fondation Sylvenie Lindor, rappelle que l’accueil constitue l’un des éléments les plus déterminants du parcours d’immigration.

Amikley Fontaine, Sylvenie Lindor, jeunes Noirs
Amikley Fontaine.

Selon lui, cette première étape influence directement la capacité des nouveaux arrivants à s’intégrer à la société d’accueil, à accéder au marché du travail, à se loger et à développer progressivement un réseau social et professionnel.

Toutefois, il souligne que les organismes francophones d’accueil font face à d’importants défis structurels, notamment en matière de financement. «Le manque de ressources financières limite considérablement la capacité des institutions et des associations à remplir pleinement leur mission, malgré une réelle volonté d’offrir un accompagnement de qualité», affirme-t-il.

À ces difficultés s’ajoutent, selon lui, des facteurs externes tels que les tarifs imposés par les États-Unis et les répercussions durables de la covid, qui ont accentué la pression sur les services et fragilisé davantage les organismes du secteur.

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Antoine Dérose, en compagnie d’Amikley Fontaine et de membres de l’équipe de la Fondation Sylvenie Lindor, lors de la remise du Prix Intégration 2025.

Une francophonie torontoise en évolution

Antoine Dérose rappelle que la francophonie torontoise a connu une transformation marquée au fil des dernières décennies. À ses débuts, elle reposait essentiellement sur le Centre francophone du Grand Toronto (CFGT), soutenu par une structure limitée et un nombre restreint de bénévoles.

Avec le temps, un réseau plus structuré s’est développé, offrant des services d’accueil et d’accompagnement des nouveaux arrivants francophones dans le Grand Toronto, dès leur arrivée à l’aéroport international Pearson.

Cette évolution s’est accompagnée de la création de plusieurs organismes francophones, dont le Centre d’accueil Héritage (CAH) et Oasis Centre des femmes. Le secteur de l’éducation a également connu des avancées importantes, avec l’établissement de douze conseils scolaires francophones à l’échelle provinciale.

Il mentionne enfin le rôle structurant des institutions postsecondaires francophones, telles que le Collège Boréal et l’Université de l’Ontario français (UOF), qu’il considère comme des piliers de la consolidation de la francophonie en Ontario.

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Des membres de l’équipe de la Fondation Sylvenie Lindor, en compagnie de Luc Bonaventure Amoussou, de l’AFO.

Santé mentale et mentorat

Les enjeux liés à la santé mentale et au mentorat jouent un rôle central dans l’intégration des personnes nouvellement arrivées, confrontées dès leur arrivée à de nombreux défis, dont la recherche d’un emploi, l’accès à un logement abordable et l’isolement social.

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À cela s’ajoutent des obstacles systémiques, linguistiques et culturels qui complexifient leur parcours d’établissement.

Dans ce contexte, Antoine Dérose insiste sur l’importance de soutenir les organismes francophones d’accueil. «Ils font partie intégrante de la solution et constituent bien souvent le premier point de contact pour les nouveaux arrivants», souligne-t-il.

De son côté, Estelle L. Policard, fondatrice et directrice générale de Divel Connexion, met en avant le rôle du mentorat. Selon elle, cet accompagnement permet aux nouveaux arrivants de simplifier leur parcours d’intégration en s’appuyant sur l’expérience de leurs mentors et en évitant certaines erreurs susceptibles de freiner leur insertion sociale et professionnelle.

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Prestation de l’ensemble NGOMA lors de la 7e édition annuelle du Forum multiculturel de la Fondation Sylvenie Lindor.

Une reconnaissance collective tournée vers l’avenir

«Nous sommes fiers du travail accompli par Antoine Dérose, tant pour la communauté ethnoculturelle que pour la communauté francophone, et pour Haïti», souligne le Dr. Éric Pierre, fondateur de Perspective Entraide Humanitaire (PEH) et consul honoraire d’Haïti à Toronto.

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Dr. Eric Pierre.

Il ajoute que, malgré les représentations médiatiques négatives, la violence et la détresse vécues par le peuple haïtien, l’engagement d’Antoine Dérose est demeuré intact, porté par une vision résolument tournée vers l’espoir.

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De son côté, Antoine Dérose se dit honoré par cette reconnaissance, qu’il considère comme le fruit de plusieurs années de travail collectif. «Je ne sais pas combien de temps il me reste, mais je resterai toujours disponible pour accompagner, conseiller et soutenir la relève francophone.»

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