Bilan très positif de la «Résistance» franco-ontarienne

Amanda Simard, Stéphanie Chouinard et Carol Jolin au Club canadien de Toronto

L'animateur Benjamin Vachet avec Stéphanie Chouinard, Amanda Simard et Carol Jolin.
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Publié 20/11/2019 par François Bergeron

Le bilan d’un an de «Résistance» aux reculs infligés aux Franco-Ontariens le 15 novembre 2018, par le nouveau gouvernement conservateur de Doug Ford, est largement positif, même si le Commissariat aux services en français reste intégré au Bureau de l’Ombudsman de l’Ontario.

«Qui aurait cru il y a un an», lance Carol Jolin, le président de l’Assemblée de la francophonie de l’Ontario, «qu’on aurait aujourd’hui plus de 120 millions $ pour l’Université de l’Ontario français; que les Affaires francophones auraient retrouvé un vrai ministère; et que le premier ministre aurait une conseillère aux affaires francophones?»

Au déjeuner-débat du Club canadien de Toronto sur le bilan et les perspectives d’un an de «Résistance» franco-ontarienne.

Mobilisation inespérée

Tout ça à cause de l’ampleur d’une mobilisation des Franco-Ontariens dépassant de loin toutes les attentes des organisateurs, ont convenu Carol Jolin, la députée indépendante Amanda Simard et la politicologue Stéphanie Chouinard, ce mercredi 20 novembre, lors d’un déjeuner-débat du Club canadien de Toronto qui a attiré environ 140 personnes, soit la pleine capacité de la salle dans l’édifice du TIFF Bell Lightbox.

La conversation, animée par le journaliste Benjamin Vachet de ONfr+ (TFO), était diffusée en direct sur le campus du Collège La Cité à Ottawa, ainsi qu’à d’autres rassemblements à Sudbury, Timmins et Windsor.

15 000 personnes dans les rues d’Ottawa et d’une quarantaine d’endroits à travers la province le 1er décembre 2018, «c’est un signal fort» qui a été envoyé à tous les politiciens. «La communauté s’est tenu debout pour protéger ses acquis, et on peut bâtir sur ça aujourd’hui», se félicite le président de l’AFO.

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Intolérable

Les trois intervenants ont souligné que le gouvernement a gravement sous-estimé la sensibilité des Franco-Ontariens et l’intérêt qu’ils portent à leurs acquis.

«On s’est senti attaqué, et avec raison», indique la députée de Glengarry-Prescott-Russell, dans l’Est ontarien, qui a quitté le caucus conservateur plutôt que de «rester à la table» et tenter de raisonner son parti.

«Il n’y avait pas de table!», image-t-elle. «On ne voulait pas nous écouter. Rentrer dans le rang aurait envoyé le message qu’on pouvait tolérer ça et peut-être d’autres coupures plus tard.»

Promesses brisées

Le fait qu’en campagne électorale, et même après les élections du 7 juin 2018, Doug Ford avait promis de protéger les services en français et financer l’UOF, «a ajouté à la fureur des Franco-Ontariens», selon Stéphanie Chouinard, professeure à Kingston au Collège militaire royal et à l’Université Queen’s.

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Elle fait aussi remarquer que, jusqu’au remaniement ministériel et à la démission cet été de Dean French, le chef de cabinet de Doug Ford, «tout était centralisé au bureau du premier ministre», où on ne comprenait rien à la francophonie.

C’est ce dégel qui aurait permis à la ministre des Affaires francophones, Caroline Mulroney, de négocier avec son homologue fédérale des Langues officielles, Mélanie Joly, pour remettre l’UOF sur les rails. Carol Jolin a d’ailleurs salué «le beau travail» des deux politiciennes.

Le président du Club canadien de Toronto, Dominic Mailloux.

Réformes de la LSF et de la LLO

Il affirme aussi qu’au rattrapage et aux gains politiques réalisés au cours de 2019, s’ajoutent maintenant un intérêt accru à Queen’s Park pour la modernisation de la Loi sur les services en français de l’Ontario, et au Parlement fédéral pour la modernisation de la Loi sur les langues officielles du Canada.

Amanda Simard se réjouit elle aussi que la lutte des Franco-Ontariens ait trouvé des échos partout au pays et même à l’étranger. «On m’a montré des journaux écrits dans des langues que je ne pouvais pas lire, mais où je reconnaissais mon nom!»

Carol Jolin revient sur l’importance d’avoir vu le drapeau franco-ontarien flotter un peu partout, à l’hôtel de ville de Québec, au défilé de la St-Jean à Montréal, etc.

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Cela augure bien, dit-il, pour le Sommet sur le rapprochement des francophonies canadiennes convoqué à Québec les 16 et 17 juin 2020. «D’ailleurs, y aurait-il même eu un tel sommet sans la Résistance franco-ontarienne?»

Marc Keelan-Bishop, un illustrateur engagé
Une des affiches devenues virales de Marc Keelan-Bishop représentant la résistance franco-ontarienne contre les mesures prises par le gouvernement de Doug Ford.

Essoufflement ou essor

Question délicate: avec un bilan aussi positif, la Résistance ne peut-elle maintenant que s’essouffler? Stéphanie Chouinard déplore notamment que les mouvements de solidarité francophones soient plus souvent «réactifs» que «proactifs»…

Justement, avertit Carol Jolin, «on n’a pas que le Commissariat et l’Université comme priorités; on a cinq autres livres blancs à promouvoir, sur des enjeux comme l’immigration, la santé, le vieillissement, etc.»

Amanda Simard estime cependant qu’en plus d’interpeller les Québécois et les francophones de tout le pays, la mobilisation de 2018-19 a touché toute une génération de jeunes Franco-Ontariens, qui n’avaient pas connu les luttes du passé pour Montfort et la gestion scolaire, et qui sont désormais sensibilisés à la cause. «C’est loin d’être terminé», croit-elle.

Auteur

  • François Bergeron

    Rédacteur en chef de l-express.ca. Plus de 40 ans d'expérience en journalisme et en édition de médias papier et web, en français et en anglais. Formation en sciences-politiques. Intéressé à toute l'actualité et aux grands enjeux modernes.

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