Témoignage d’une humble activiste en pause forcée

Rien ne remplace le terrain

Nul ne peut prédire les prochains mois...
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Publié 31/05/2020 par Annik Chalifour

Novembre 2018, je dis au revoir à un pays qui m’inspire inconditionnellement.

La tête remplie d’émotions engendrées par un activisme passionnant et le souvenir vivace de mes compagnons résilients, je ne pense qu’à y retourner.

Mais le destin en décide autrement. En 2019, ce pays est en proie à des troubles socio-politiques internes qui me forcent à reporter ma prochaine expédition.

Aujourd’hui retourner là-bas paraît impensable. Car on compose avec un inconnu dangereux à long terme: le coronavirus qui tue. Le futur me semble plus nébuleux que jamais…

Le virus contamine notre planète en n’épargnant personne. Nous sommes tous affectés par la pandémie, de multiples et diverses façons, aux quatre points cardinaux.

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Toutefois un fil invisible relie plusieurs d’entre nous: l’impossibilité de prédire, de planifier des projets d’avenir au-delà de nos frontières.

Impossible de retourner sur le terrain outre-mer afin de rejoindre la cause qui me tient à cœur…

On doit surveiller les humeurs et déplacements imprévisibles de ce malin virus, tandis qu’on attend l’avènement d’un vaccin miracle…

Destin incontrôlable

Entre-temps la survie continue… Pour nous, gens du Nord, il s’avère notamment difficile d’évoluer sans se projeter dans le futur.

Un besoin vital nous habite: visionner demain, constamment tenter de savoir – et de contrôler – à l’avance notre destin.

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Un mode de vie amplement basé sur les stratégies, les analyses, les plans d’action guidés par un leadership prétendu visionnaire, gage de notre économie soi-disant équitable.

Mais dorénavant, en raison de la pandémie, on doit s’efforcer de vivre dans le mystère…

Nul ne peut deviner ce que nous réservent les prochains mois ni 2021… La boule de cristal est en panne.

Certains s’accrochent au message prudent de nos dirigeants politiques et de la santé publique: lavage des mains, port d’un masque protecteur, distanciation sociale (physique).

Pourtant on assiste bel et bien à un déconfinement progressif. Un semblant de normalité reprend son cours, inévitablement.

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On doit maintenant apprendre à reconquérir le temps au présent, alors que le futur suspend son vol.

Rien ne remplace le terrain

Ainsi comment fait-on pour vivre sans plan de retour vers ce qui nous anime au plus profond de soi?

Vous allez me dire qu’on peut se tourner vers le virtuel. Oui, bien sûr, Zoom, Skype, FaceTime peuvent faire l’affaire.

Mais à mon avis, rien ne remplace la présence physique sur le terrain pour capter les sentiments humains sur le vif, le pouls de l’environnement, l’intensité d’une ambiance authentique, saisir des images uniques momentanément. Pour témoigner avec acuité, donner à voir avec sensibilité.

Haïti

Vous avez deviné mon pays de prédilection. Mes publications de ces cinq dernières années dans L’Express, vous l’auront révélé.

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Voici un rappel de mes plus récents reportages terrain (2018) réalisés en Haïti sur le thème du tourisme alternatif en appui à l’économie locale durable:

Salon du Livre de Jacmel

Patrimoine immatériel

Sainte-Suzanne

Grande-Rivière-du-Nord

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Dondon

Artisans du Nord

1er Salon du Livre de Jacmel, rue du Commerce, octobre 2018
Artisans, Coopérative agricole Jean-Baptiste Chavannes, Grande-Rivière-du-Nord, avril 2018
Randonnée spéléo, Voûte à Minguet, Dondon, avril 2018
Grande-Rivière-du-Nord, avril 2018 Photo : Henri David Eustache
Culture de l’igname, Sainte-Suzanne, avril 2018
Péristyle de Jacmel, fête des Guédés, novembre 2018

Continuer malgré l’adversité

Je pense à Haïti tous les jours, garde régulièrement contact par courriel avec mon réseau haïtien éloigné, lis les nouvelles quotidiennes diffusées en ligne par les médias de Port-au-Prince.

Il n’y a pas de recettes magiques pour maintenir son activisme quand le terrain est loin. Il faut entretenir son feu sacré tout en s’appropriant le présent. Continuer d’alimenter l’intérêt d’autrui, même dans la tourmente de cette pandémie. Les convictions de l’activiste demeurent malgré l’adversité.

Cet humble témoignage se veut le reflet de mon engagement continu à l’égard de ma cause: faire connaître et apprécier le vibrant patrimoine d’Haïti au potentiel inédit, garant de son avenir.

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Un jour je retournerai certainement en Haïti, terre d’atmosphère, mais seule la Vie sait quand…

Kenbe fèm (tenir bon).

Auteur

  • Annik Chalifour

    Chroniqueuse et journaliste à l-express.ca depuis 2008. Plusieurs reportages réalisés en Haïti sur le tourisme solidaire en appui à l’économie locale durable. Plus de 20 ans d'œuvre humanitaire. Formation de juriste.

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