Savoirs et innovation sur les quais de Toronto

Le Artscape Daniels à l'angle Lower Jarvis et Queen's Quay. Photos: Imen Ben Jemia

Publié 21/12/2023 par Imen Ben Jemia

Il fut un temps où les quais de Toronto, zone industrielle dynamique, servaient à débarquer et embarquer des marchandises.

Aujourd’hui, le secteur riverain géré par Waterfront Toronto est devenu une plaque tournante des savoirs et de l’innovation, accueillant des institutions académiques, artistiques et de hautes technologies.

Villes globales

Dans un contexte de compétition entre les «villes globales» qui jouent un rôle stratégique dans l’économie mondiale, ces métropoles prospères rivalisent pour l’attraction des flux financiers et des flux de talents. Toronto travaille fort pour maintenir sa compétitivité, augmenter sa visibilité et assurer son rayonnement international.

Au-delà de la production de biens qui était à l’origine de la prospérité des villes industrielles, c’est la production de savoirs qui est aujourd’hui la priorité des villes globales dans le contexte de l’essor mondial de l’économie du savoir.

En effet, au début les années 2000, à la suite du succès de la théorie de Richard Florida sur l’importance de la créativité, du savoir, de l’innovation et de l’attraction de la classe créative dans la prospérité des villes, plusieurs politiques, stratégies et projets ont été développés par Toronto pour dynamiser le secteur culturel, créatif et innovant.

Attraction de talents

Florida, chercheur reconnu à l’échelle internationale et qui est en résidence au centre de recherche School of Cities à l’Université de Toronto, vient aussi de publier un article dans la revue Harvard Business Review, où il décrit Toronto comme un hub, une plaque tournante significative dans l’attraction des flux de talents à l’échelle internationale.

L’auteur intègre Toronto à sa liste des villes Méta, ces villes qui sont une destination des travailleurs talentueux sans forcément être leur lieu de résidence.

Ces talents qui souvent résident plus loin, mais grâce au travail à distance permis par les nouvelles technologies, participent activement à l’innovation et la création de richesse dans la ville.

Waterfront Toronto

Un exemple de la concrétisation de la vision de Toronto, est le développement du secteur Est du projet de revitalisation de l’ancien port industriel par l’agence fédérale-provinciale-municipale Waterfront Toronto.

Le projet de Waterfront Toronto est un des plus importants projets de développement en Amérique du Nord qui implique les trois paliers du gouvernement.

Innovation

Le secteur Est de ce projet, qui est à l’Est de la rue Jarvis et au Sud du boulevard Lakeshore, mise particulièrement sur le développement de lieux pour l’innovation et la production de savoir.

Ce secteur abrite le Waterfront Innovation Centre, qui héberge plusieurs acteurs de l’innovation technologique.

Il est aussi le site du projet Daniels City of Art qui est un développement mixte avec des tours résidentielles, mais inclue aussi des locaux pour une communauté d’artistes Artscape, pour l’Université OCAD et pour l’Université de l’Ontario français.

De même, le secteur inclue le nouveau campus du Collège George Brown et le bâtiment de Corus, qui est une compagnie de développement des médias.

Cohabitation des institutions

Alors que c’est l’université qui avait préséance dans la production de savoirs et qui s’implantait historiquement en Amérique du Nord dans un campus isolé et bien visible, une tour d’ivoire, la cohabitation des institutions dans ce secteur révèle la dynamique contemporaine impliquant différents acteurs pour l’innovation.

L’architecture de ces développements, d’allure plutôt corporative, démontre de l’intégration de ces lieux de production de savoirs dans la fabrique de la ville sans différentiation particulière quant à leurs spécificités institutionnelles.

Présence francophone

Pas très loin du secteur, le Collège Boréal vient d’ouvrir ses portes dans le quartier de la Distillerie, confirmant la vocation éducative et créative de ce coin de la ville de manière générale, mais aussi confirmant la présence significative d’institutions francophones.

En effet, Francine Rivard, directrice des initiatives stratégiques à l’Université de l’Ontario français, souligne «l’émergence d’une forme de corridor francophone dans le secteur» avec la présence dans le quartier du Théâtre français de Toronto ainsi que des Centres d’accueil Héritage.

Auteurs

Imen Ben Jemia

Professeure adjointe, Pôle d'études et de recherches en environnements urbains, Université de l’Ontario français.

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