Postsecondaire francophone: le «par et pour» est «non négociable»

UOF, Université de l'Ontario français
L'entrée de l'Université de l'Ontario français, à l'étage du 9 rue Lower Jarvis, près du lac. L'UOF ne serait viable qu'en tant que membre d'un réseau provincial, selon le rapport d'un comité d'experts. Photo: l-express.ca
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Publié 22/11/2023 par François Bergeron

La gouvernance «par et pour» du système postsecondaire francophone est «non négociable» pour l’Assemblée de la francophonie de l’Ontario.

L’AFO demande au ministère des Collèges et Universités de revoir ses formules de financement afin d’en proposer une pour les francophones qui donneraient «les outils propices à la collaboration, la concertation et aux partenariats».

C’est la première réaction du lobby politique franco-ontarien, ce 22 novembre, à la publication, la semaine dernière, du rapport du comité «blue ribbon» (exploratoire) du gouvernement provincial sur l’éducation postsecondaire.

Université d'Ottawa
L’Université d’Ottawa bilingue, «avec 365 programmes en français et plus de 14 700 apprenants de langue française», pourrait chapeauter tout le postsecondaire franco-ontarien, selon le comité «Blue Ribbon» se rapportant au gouvernement de l’Ontario. Photo: Francopresse

Trois options?

Présidé par le consultant universitaire Alan Harrison, le comité suggére trois options pour les francophones:

postsecondaire
Le rapport Harrison de 82 pages en consacre trois et demie au postsecondaire franco-ontarien.

Seuls à réagir dès la parution du rapport Harrison, les dirigeants du Regroupement étudiant franco-ontarien (RÉFO) ont accueilli favorablement l’option 3… «à condition que le réseau soit doté d’une gouvernance entièrement francophone et autonome plutôt que chapeauté par l’Université d’Ottawa».

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Curieusement, le rapport Harrison ne mentionne pas l’Université de Sudbury ni le campus bilingue Glendon de l’Université York, qui font pourtant partie de l’écosystème postsecondaire franco-ontarien.

Le comité comprenait un seul membre francophone, Maxim Jean-Louis, le président de Contact Nord… qui s’est dissocié du chapitre sur les collèges et universités de langue française (trois pages et demie sur 82).

Université de Sudbury
L’Université de Sudbury. Photo: Julien Cayouette, Le Voyageur

«Manque de compréhension et de rigueur»

Le recteur de l’UOF, Pierre Ouellette, a réagi lui aussi ce 22 novembre, pour exprimer «de sérieuses réserves à l’égard des constats tirés sur les établissements de langue française dans la province».

Dans une lettre adressée à Alan Harrison et aux ministres Jill Dunlop (Collèges et Universités) et Caroline Mulroney (Affaires francophones et Conseil du trésor), il dénonce «le manque de compréhension et de rigueur du rapport sur la situation des universités de langue française, ainsi que le manque d’objectivité à leur égard».

Pire, selon Pierre Ouellette, «le rapport fait preuve d’un biais significatif contre l’Université de l’Ontario français».

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Il relève deux erreurs:

  • «L’UOF ne compte pas 29 inscriptions, mais bien 226. C’est un nombre en croissance et qui s’apparente à la situation d’autres universités publiques qui ont été en démarrage dans le passé.»
  • «Ensuite, environ la moitié de notre population étudiante est canadienne, contrairement à ce que le rapport indique à la page 48 où on affirme que nos étudiantes et nos étudiants sont très majoritairement étrangers.»

Le recteur explique aussi que la désignation d’établissements ontariens sous la Loi sur les services en français «ne donne aucun moyen financier additionnel à une institution désignée», contrairement à ce qui est prétendu dans le rapport.

UOF, rentrée
Le recteur de l’UOF, Pierre Ouellette. Photo: l-express.ca

«Les trois options que vous proposez sont irrecevables», juge Pierre Ouellette. «Elles ne prennent aucunement en compte le principe de la gouvernance «par et pour» les francophones, chèrement acquise après des décennies de revendications et de luttes acharnées de la part de la communauté francophone de l’Ontario.»

Les conseils scolaires de langue française et les collèges de langue française sont des succès. «Il serait donc normal et raisonnable d’accorder le temps à l’Université de l’Ontario français de prendre son envol.»

Ouverte depuis trois ans seulement avec quatre programmes – cultures numériques, pluralité humaine, environnements urbains, économie et innovation sociale –, l’UOF a ajouté des baccalauréat en éducation (2023), en administration des affaires en collaboration avec le Collège La Cité (2024), en santé mentale (en cours d’évaluation par le ministère) et en travail social (qui vient d’être déposé au ministère).

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Meilleur financement demandé

Le rapport Harrison est toutefois bien accueilli dans le milieu collégial et universitaire ontarien dans son ensemble, parce qu’il recommande la fin du gel des frais de scolarité décidée en 2019 par le gouvernement provincial, et surtout une augmentation des subventions directes de la province et du fédéral.

C’est notamment le sentiment de Daniel Giroux, président du Collège Boréal, basé à Sudbury, Toronto et dans plusieurs communutés du Nord et du Centre-Sud-Ouest de la province.

«Le gel des frais de scolarité, cumulé à l’inflation et au fait que les collèges ontariens ne reçoivent déjà que 44% du financement de celui des autres provinces, équivaut à une baisse de nos revenus de 25% depuis quelques années», explique-t-il en entrevue à l-express.ca.

Daniel Giroux, PDG du Collège Boréal, postsecondaire
Daniel Giroux, PDG du Collège Boréal. Photo: Club canadien de Toronto

Daniel Giroux ne semble pas s’émouvoir des recommandations du comité Harrison sur le postsecondaire francophone. «Rien ne sera modifié sans consultations», croit-il.

«Le Collège Boréal est solide, en pleine croissance, même s’il profiterait grandement d’une augmentation des frais de scolarité et d’une augmentation des subventions gouvernementales.»

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Mais surtout, la collaboration recommandée dans le rapport Harrison est déjà pratique courante, assure-t-il, non seulement entre institutions francophones, mais aussi entre tous les collèges et universités de la province, voire de tout le Canada.

«Nous collaborons ensemble depuis des années, que ce soit seulement parce que les contrats avec le personnel sont négociés à l’échelle provinciale. Mais aussi au moyen d’ententes sur l’achat de matériel et de services. Ainsi qu’au chapitre des nombreuses articulations de programmes académiques entre collèges, et entre collèges et universités.»

«Le gouvernement souhaite voir plus de collaboration entre nos institutions… et nos institutions sont en accord», confirme le directeur général de l’AFO, Peter Hominuk.

inflation
Peter Hominuk, directeur général de l’Assemblée de la francophonie de l’Ontario (AFO). Photo: courtoisie

Moment propice

«Il faut travailler là-dessus, immédiatement», ajoute Peter Hominuk, qui fait remarquer que les ententes fédérales-provinciales en langues officielles en matière d’éducation postsecondaire doivent être renégociées au cours des prochains mois.

«Ottawa et Toronto doivent investir davantage dans le postsecondaire de langue française. Le gouvernement de l’Ontario a fait le bon choix de bâtir des universités de langue française.»

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«La francophonie possède un réseau d’institutions postsecondaires ayant le potentiel d’améliorer l’accès aux études postsecondaires en français et améliorer l’expérience étudiante. Il faut maintenant s’assurer de leur donner les bons outils.»

Les institutions postsecondaires offrant une programmation en français en Ontario sont des outils pour pallier la pénurie de main-d’œuvre francophone et bilingue, fait valoir l’AFO. Et la francophonie, en Ontario, «c’est 30 000 entreprises et un apport économique au PIB de près de 80 milliards $».

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