Parler de mort pour célébrer la vie

Sylvain Lemay, Ce n’est pas la première fois que je meurs
Sylvain Lemay, Ce n’est pas la première fois que je meurs, récit, Montréal, Éditions Somme toute, 2022, 128 pages, 19,95 $.
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Publié 14/01/2023 par Paul-François Sylvestre

Puisqu’il a eu une connaissance très fragmentaire de son grand frère, mort à l’âge de 67 ans, Sylvain Lemay prend la décision d’écrire un livre afin de «rassembler ses souvenirs pour en tracer un portrait cohérent».

Cela donne un récit intitulé Ce n’est pas la première fois que je meurs.

Vie de famille

Secoué par la maladie en phase terminale de son frère, l’auteur s’échappe comme il le peut de la petite chambre aux soins palliatifs. Il puise dans ses souvenirs pour raconter la vie de sa famille et, surtout, de ce frère 17 ans plus vieux que lui.

Au départ, l’auteur se dit qu’il écrit pour son frère Jean-François décédé à l’âge de 67 ans. Mais quand il achève de rédiger son récit, c’est «encore plus pour moi».

Né en 1952 et décédé en 2019, Jean-François a connu 7 papes, 18 premiers ministres du Québec, 12 premiers ministres du Canada, 13 présidents américains et une seule monarque britannique.

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L’ouvrage renferme plusieurs références culturelles, populaires et historiques.

Lorsque son grand frère est vivant, l’auteur a le pouvoir de l’imaginer fantôme. Un fois qu’il décède, qu’il a toutes les qualités de spectre, le petit frère demeure dépourvu de ce pouvoir.

Trouver un sens

Sylvain Lemay se concentre plutôt sur deux vies complexes et multiples. Il ressent «le besoin de relier les points pour enfin y trouver un sens».

Balzac a écrit que «L’homme meurt une première fois à l’âge où il perd l’enthousiasme.» Sylvain Lemay croit que son frère est mort une première fois lorsqu’il a jeté ses poèmes de jeunesse. «Cet épisode mit fin à toutes ses velléités littéraires.»

«Éros et Thanatos sont dans un bateau. L’un tombe à l’eau. Qui reste-t-il?»

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Puisqu’on surnomme l’orgasme «petite mort», l’auteur comprends que sur son lit de mort son frère ait pu s’écrier: «Ce n’est pas la première fois que je meurs!»

Tintin et Arsène Lupin

Sylvain Lemay fut un avide lecteur de Tintin et d’Arsène Lupin. Il ne connaissait alors la vie qu’à travers les héros de ses lectures. Il en connaissait plus sur leur vie que sur «les émotions dans les visages et les gestes des personnes en chair et en os».

Son frère est un personnage complexe qu’il admire, mais qui l’intimide en même temps.

En écrivant plus de cent pages sur la mort de son frère, l’auteur est conscient que «c’est ma propre mort qui apparaît en filigrane». En plongeant dans le passé de son frère décédé, il essaie d’exorciser sa propre peur.

Il enjolive souvent ses souvenirs car cela lui fait plus de bien que la terne réalité.

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Autofiction?

Avant que son frère ne s’échappe complètement, il en fait le personnage de ce livre. «Une façon pour moi de saisir l’insaisissable et de donner à ce frère, si présent et si éloigné en même temps, une nouvelle naissance.»

La maison d’édition ne précise pas le genre littéraire de Ce n’est pas la première fois que je meurs. Est-ce un récit ou un roman? Une autofiction sans doute.

Auteur

  • Paul-François Sylvestre

    Chroniqueur livres, histoire, arts, culture, voyages, actualité. Auteur d'une trentaine de romans et d’essais souvent en lien avec l’histoire de l’Ontario français. Son site jaipourmonlire.ca offre régulièrement des comptes rendus de livres de langue française.

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