Non, les substituts de sucre ne sont pas une bonne alternative au sucre blanc

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L’alternative parfaite au sucre blanc n’existe pas. Les édulcorants devraient être consommés avec modération, tout comme le sucre raffiné. iStock.com/Andrii Bicher
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Publié 15/04/2024 par Laurie Noreau

Les conséquences de notre alimentation riche en sucre raffiné ne sont plus à démontrer: mauvais cholestérol et risque plus élevé de diabète, d’obésité et de maladies cardiaques. Pour réduire ces risques, plusieurs se tournent vers des succédanés de sucre. Un bon choix?

Trois types d’alternatives

On les reconnaît sous plusieurs appellations: aspartame, sucralose, stévia, sorbitol. Les succédanés de sucre constituent un marché en croissance rapide. On estime que plus de 23 000 produits vendus à travers le monde en contiendraient, dont des boissons gazeuses, des yogourts aromatisés, de l’eau pétillante et des fruits en conserves.

Les alternatives au sucre se classent en trois catégories:

Les édulcorants artificiels: l’aspartame, le sucralose (Splenda), l’acésulfame-potassium (Ace-K) et la saccharine en font partie. Ce sont des sucres dits artificiels puisqu’ils sont synthétisés en laboratoire. Ils sont de 200 à 600 fois plus sucrés que le sucre blanc. Il faut si peu de calories pour obtenir une saveur sucrée que l’impact calorique est négligeable.

Les édulcorants naturels: ils incluent la stévia, le fruit de moines et le sirop de Yacon. Comme les édulcorants artificiels, ils ne produisent aucune calorie. Ils sont dérivés de plantes et sont considérés pour cette raison comme «naturels», mais certains d’entre eux, comme la stévia, doivent passer par un processus d’extraction chimique pour concentrer la saveur sucrée.

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Les sucres-alcool (ou polyalcools): l’érythritol, le mannitol, le sorbitol et le xylitol sont des produits dérivés de l’amidon, mais qui sont beaucoup moins sucrés que ce dernier et contiennent peu de calories. Les polyalcools, particulièrement le xylitol, pourraient prévenir la carie dentaire et ils sont donc fréquemment utilisés dans les gommes à mâcher.

Des édulcorants qui trompent notre cerveau

Parmi ces alternatives, y en a-t-il à privilégier? Ou au contraire, une dont il faut se méfier pour notre santé?

Pour y répondre, il faut comprendre la façon dont notre corps réagit lorsqu’on lui donne du sucre. Ce dernier est transformé en glucose, une molécule riche en calories, donc riche en énergie: notre cerveau en raffole puisqu’il constitue son principal carburant.

D’un point de vue évolutif, l’humain a développé une tendance naturelle vers les aliments contenant du sucre pour assurer sa survie (pour aller plus loin, lire On peut vivre sans sucre).

Notre corps ne réagit pas de la même façon lorsqu’on lui présente de faux sucres. Dans le cas des édulcorants artificiels et naturels sans calorie (les catégories 1 et 2), ils trompent le cerveau. Ils goûtent le sucre, de sorte que nos papilles gustatives captent le message qu’une source d’énergie est en route.

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Mais lorsqu’ils atteignent notre système digestif, le cerveau comprend qu’il a été berné puisqu’il n’a aucune calorie à se mettre sous la dent.

Maladies cardiovasculaires

On ne connaît pas encore les effets à long terme de cette ruse sur notre métabolisme.

Toutefois, en 2022, une étude française qui avait suivi plus de 100 000 participants pendant 12 ans a observé une augmentation des maladies cardiovasculaires dès que la consommation quotidienne de ces édulcorants excédait 80 milligrammes, soit l’équivalent de la moitié d’une canette de boisson gazeuse. Ce risque n’était pas présent chez ceux qui en consommaient occasionnellement.

Quant aux sucres-alcools, qui constituent la troisième catégorie, ils sont à consommer avec modération, puisqu’ils peuvent fermenter dans l’estomac et créer des problèmes intestinaux comme des ballonnements et un effet laxatif.

Il est suggéré de limiter la consommation quotidienne à 10 grammes.

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En février 2023, une étude américaine suggérait même que l’érythritol, ingéré en grande quantité, pourrait augmenter les caillots sanguins, particulièrement chez les individus à risque d’accident vasculaire cérébral ou de crise cardiaque.

Le mirage de la perte de poids

Plusieurs consommateurs utilisent ces produits pour un meilleur contrôle de leur poids corporel. Qu’en est-il ?

Les données sont encore mitigées à ce sujet. À court terme, il semble que de remplacer les boissons sucrées par des boissons artificiellement sucrées entraînerait une perte de poids. La transition vers des boissons en version «diète» serait particulièrement bénéfique chez les personnes avec un niveau élevé de graisse abdominale.

Même s’il était vrai que ce changement entraînerait une perte de poids, celle-ci serait bien moindre que chez les personnes qui consommaient des boissons sucrées.

Mais à plus long terme, soit au-delà d’un an, ces bénéfices semblent disparaître et pourraient même être liés à un gain de poids, concluait une méta-analyse parue en 2017.

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Sucres naturels

Une revue systématique de la littérature conduite par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) en 2022 a pour sa part mené à l’adoption de nouvelles lignes directrices.

Depuis mai 2023, l’OMS conseille de ne pas consommer les édulcorants non sucrés dans le but de perdre du poids et recommande plutôt de se tourner vers la consommation d’aliments contenant des sucres naturellement présents, comme les fruits, ou d’aliments et de boissons non sucrés.

L’organisation souligne également les effets indésirables potentiels liés à une utilisation prolongée des succédanés, tels qu’un risque accru de diabète de type 2, de maladies cardiovasculaires et de mortalité chez les adultes. Étant donné que le niveau des preuves menant à ces recommandations variait de «très faible» à «faible», la recommandation a été évaluée comme conditionnelle.

Les lignes directrices de l’OMS ne concernent toutefois pas les sucres-alcool et ne s’adressent pas non plus aux personnes diabétiques qui pourraient bénéficier de ces substituts, elles qui doivent contrôler le taux de sucre circulant dans leur sang.

En effet, les sucres-alcools et les édulcorants artificiels, incluant la stévia, ont peu ou pas d’effet sur la glycémie. Diabète Canada les autorise, tout en mettant en garde de respecter la dose journalière admissible.

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Verdict

L’alternative parfaite au sucre blanc n’existe pas. Les édulcorants devraient être consommés avec modération, tout comme le sucre raffiné. Ils ne constituent pas une solution pour manger plus d’aliments sucrés.

Toutefois, à moins d’une condition médicale particulière comme le diabète, s’ils sont intégrés dans notre alimentation avec parcimonie, les sucres ou substituts de sucre ne sont pas nécessairement dangereux pour notre santé: ils peuvent faire partie d’une alimentation équilibrée.

D’autres sucres très peu transformés

Si l’on compare ces alternatives au sucre blanc, ou sucre de table, il ne faut pas perdre de vue qu’il existe d’autres sucres, comme le miel, le sirop d’érable ou le sirop d’agave.

Même si ces derniers sont des sucres naturels très peu transformés, ils ont un apport calorique similaire au sucre blanc et le corps les métabolise de la même façon. Ce ne sont donc pas des alternatives plus «santé» contrairement à ce que l’on pourrait croire.

Certes, ils contiennent certains minéraux, mais en quantité négligeable. Le sirop d’agave a un indice glycémique plus faible que les autres dans cette catégorie, mais avec sensiblement la même quantité de glucides.

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Auteurs

  • Laurie Noreau

    Journaliste à l'Agence Science-Presse, média indépendant, à but non lucratif, basé à Montréal. la seule agence de presse scientifique au Canada et La seule de toute la francophonie qui s'adresse aux grands médias plutôt qu'aux entreprises.

  • Agence Science-Presse

    Média à but non lucratif basé à Montréal. La seule agence de presse scientifique au Canada.

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