Le Français pour l’avenir fête ses 25 ans

18% de bilingues au Canada, c'est encore trop peu

Le français pour l'avenir
Des jeunes participant à une activité du Français pour l'avenir. Photo: Karolina Dobiszewska, Le Français pour l'avenir
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Publié 26/11/2022 par Camille Langlade

Le Français pour l’avenir, une association nationale née à Toronto, fête ses 25 ans. Mais sa mission reste plus que jamais d’actualité: promouvoir le bilinguisme auprès des élèves de la 7e à la 12e année au Canada, notamment chez les jeunes anglophones. Mission impossible? Pas vraiment.

Fondée par le philosophe John Ralston Saul et la journaliste Lisa Balfour Bowen, l’association célébrait son quart de siècle d’activisme lors d’une soirée à Ottawa le 23 novembre.

Le Français pour l'avenir, bilinguisme
La ministre des Langues officielles du Canada, Ginette Petitpas Taylor (au centre), avec des membres du Français pour l’avenir lors du 25e anniversaire. En rouge: la cofondatrice Lisa Balfour Bowen. Devant: le cofondateur John Ralston Saul. Photo: courtoisie

Référendum traumatisant

À l’époque, le Canada sort du référendum québécois de 1995, où les citoyens ont dû se prononcer sur la souveraineté de la province.

C’est un événement qui a profondément marqué Lisa Balfour Bowen. «En tant qu’anglophone à Toronto, ayant été la première correspondante politique anglophone nommée à la Tribune de la presse de l’Assemblée nationale à Québec, j’avais vraiment peur que la province décide de se séparer.»

L’ancienne journaliste décide alors d’agir, par amour pour son pays et pour la culture française, en participant à la création de Français pour l’avenir. «Je voulais faire quelque chose pour m’impliquer, dans une situation extrêmement dangereuse pour le Canada.»

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Le Français pour l'avenir, bilinguisme
Le conseil d’administration de l’association Le Français pour l’avenir. À g.: la DG Emeline Leurent. En rouge: la présidente Ania Kolodziej.

Déclin francophone

25 ans plus tard, le combat pour le bilinguisme est plus que jamais d’actualité au Canada, estime Emeline Leurent, directrice générale du Français pour l’avenir.

«On a vu récemment avec les résultats du recensement de Statistiques Canada que le français est actuellement en déclin. Cela donne peut-être un contexte pas très joyeux, mais c’est aussi le signe qu’on a besoin d’organismes francophones pour maintenir cette dynamique du bilinguisme au Canada.»

Pour elle, la mission de Français pour l’avenir trouve précisément sa raison d’être dans un contexte où le français perd de son poids démographique.

Le Français pour l'avenir, bilinguisme
La ministre des Langues officielles du Canada, Ginette Petitpas Taylor, s’adressant aux membres du Français pour l’avenir à Ottawa le 23 novembre. Photo: courtoisie

18% de bilingues, c’est peu

Pour Irvin Studin, président de l’Institute for 21st Century Questions, la situation doit changer, et vite.

21e siècle
Irvin Studin. Photo: courtoisie

«À l’échelle du pays, on observe un bilinguisme total d’environ 18%. Cela veut dire qu’on choisit nos ministres, nos juges fédéraux à partir de ces 18%.» Un champ beaucoup trop restreint selon lui.

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«Sans impulsion générale sur le plan politique, on ne pourra pas faire avancer cette barrière des 18%.»

«Indispensable d’être bilingue»

Le bilinguisme reste non seulement indispensable dans un grand nombre de professions, mais il participe aussi à l’unité canadienne, rappelle Lisa Balfour Bowen.

«Les deux langues officielles sont à la base de la cohésion sociale canadienne et de sa diversité», corrobore Emeline Leurent.

«Cela permet d’avoir accès à des postes importants, souvent mieux payés. Énormément de métiers exigent le bilinguisme», complète la directrice.

Sans oublier ses bénéfices sur le plan cognitif. «Certaines études ont aussi montré que le bilinguisme pouvait être un frein à certaines maladies neurodégénératives comme l’Alzheimer.»

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Le français pour l'avenir
Lisa Balfour Bowen et John Ralston Saul. Photo: Le français pour l’avenir

Le bilinguisme doit devenir «banal»

Irvin Studin va plus loin en érigeant le bilinguisme en «devoir», en prérequis indispensable à l’unité nationale.

Il prône «un bilinguisme généralisé à l’ensemble de la population, dans toutes les écoles et cursus scolaires. Sans quoi le pays risque de se dégénérer ou de tomber dans une impasse générale de méfiance et d’incompréhension générale.»

Selon lui, il faut en outre dépasser une certaine vision «surannée» du français. «On exotise la maîtrise de la langue. Depuis mon enfance, on parle toujours du bilinguisme comme un idéal, le parangon d’un Canadien bien éduqué… Mais il faut banaliser cette connaissance plutôt que de l’exotiser. Que le fait d’être bilingue devienne un standard plutôt qu’un exemple d’excellence intellectuelle ou de culture.»

L’ancien professeur milite même pour l’apprentissage de trois langues.

Le français pour l'avenir
Des élèves du secondaire participant à une activité du Français pour l’avenir. Photo: Karolina Dobiszewska, Le Français pour l’avenir

Sortir le français de l’école

Mais Emeline Leurent en a conscience, l’apprentissage du français comme langue étrangère ne dépasse pas souvent les bancs de l’école.

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«Certains élèves arrêtent après la 9e année. Leur niveau de français est bon, mais du moment où ils n’ont plus ce lien avec la langue, ils perdent cette capacité langagière quand ils arrivent sur le marché du travail.»

L’objectif de Français pour l’avenir est d’ailleurs d’intéresser les jeunes dans leur propre vie quotidienne. «On essaie de leur montrer que le français existe en dehors de l’école, qu’il leur donne un accès à des bénéfices sociaux, culturels et professionnels. Le français, c’est le véhicule d’une culture qui est bien vivante.»

Car parler français, c’est aussi communiquer et pouvoir échanger avec les autres francophones aux quatre coins du Canada, notamment au sein des communautés en contexte minoritaire, commente Emeline Leurent.

«L’apprentissage d’une langue n’est pas une fin en soit. On apprend une langue pour communiquer, pour découvrir une culture.»

Le français pour l'avenir
Des élèves du secondaire participant à une activité du Français pour l’avenir. Photo: Karolina Dobiszewska, Le Français pour l’avenir

Forum à Glendon le 7 décembre

Le Français pour l’avenir organise le 7 décembre 2022 un forum local sur le campus Glendon de l’Université York, à Toronto. Ce sera l’occasion pour les élèves francophones et francophiles des écoles de la région du Grand Toronto de se rencontrer et d’échanger, en français.

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