Une page d’histoire du Québec en Nouvelle-Angleterre

David Vermette, Une race d’étrangers
David Vermette, Une race d’étrangers. Le récit méconnu des Franco-Américains, essai traduit par Aimée LeBreton, Québec, Éditions du Septentrion, 2024, 474 pages, 49,95 $.
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Publié 12/02/2025 par Paul-François Sylvestre

Entre 1840 et 1930, près d’un million de Canadiens-Français traversent la frontière pour s’installer aux États-Unis à la recherche de travail et d’un avenir meilleur. David Vermette raconte l’histoire méconnue de ces Franco-Américains dans un brillant essai intitulé Une race d’étrangers.

Au cours de cette période, ceux qu’on appelle Franco-Américains forment des quartiers dans les villes industrielles de la Nouvelle-Angleterre, parfois appelés Petits Canadas, «où ils reproduisent les institutions qu’ils connaissaient au Québec et dans l’Acadie de leurs ancêtres».

David Vermette clame haut et fort que la Nouvelle-Angleterre a été le moteur de l’industrialisation des États-Unis, que les textiles de coton ont été le moteur de l’industrialisation de la Nouvelle-Angleterre et, après 1865, que les Franco-Américains ont été le moteur de l’industrie du textile.

Un Canadien-Français sur trois

On estime qu’un Canadien-Français sur trois vivait en Nouvelle-Angleterre au début du XXe siècle. Or, leur histoire demeure presque aussi inconnue au nord qu’au sud de la frontière. Vermette braque les projecteurs sur la période de 1865 à 1930.

Au milieu du XIXe siècle, la Nouvelle-Angleterre était la région du pays où l’acticité industrielle était la plus intense. Les produits du coton menaient la charge en capital investi, en nombre de travailleurs employés et en valeur nette.

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Une seule entreprise textile employait souvent des générations d’une même famille. À titre d’exemple, quatre générations de la lignée de l’auteur David Vermette ont travaillé à l’usine Cabot de Brunswick (Maine).

Les Petits Canadas formaient des communautés permanentes

«En 1880, les Franco-Américains de la Nouvelle-Angleterre avaient fondé pas moins de 63 paroisses et 73 sociétés nationales. Cette année-là il y avait 37 journaux de langue française en Nouvelle-Angleterre et 11 autres à New York. En 1891, les Franco-Américains avaient 53 écoles paroissiales fréquentées par plus de 26 000 élèves; en 1908, ce nombre était passé à 133 écoles avec près de 55 000 élèves, soit 41% des écoles catholiques de la région.»

Le recensement fédéral américain montre qu’en 1900, la Nouvelle-Angleterre abritait 54% des ouvriers des usines de coton au États-Unis. Près d’un quart (24%) de tous les ouvriers des filatures de coton au pays étaient des Franco-Américains de la Nouvelle-Angleterre.

Contrairement aux Petites Italies ou aux Petits Tokyos ailleurs aux États-Unis, les Petits Canadas formaient des communautés permanentes, des répliques du Québec, «où les Franco-Américains préservaient une culture distincte à l’intérieur des frontières des États-Unis. Les Petits Canadas servaient de centres de valorisation de la survivance».

Nouvelle-Angleterre française et catholique

Une partie de la presse américaine présente l’idée que la hiérarchie catholique romaine du Québec a conspiré en vue de conquérir la Nouvelle-Angleterre. Un journal de Boston affirme en 1889 que «ce projet visant à rendre la Nouvelle-Angleterre française et catholique a déjà pris des proportions susceptibles d’alarmer les plus optimistes».

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En 1892, le New York Times écrit que le Québec se déplace physiquement à Manchester (N.H.), à Fall River (Mass.) et à Lowell (Mass.), que «le curé met tous les obstacles possibles à l’assimilation de ces gens à notre vie et notre pensée américaines».

Enfin, Vermette expose l’agitation anti-franco-américaine du clergé protestant, du Ku Klux Klan et du mouvement eugéniste face à cette «race d’étrangers».

Il s’agit de l’ouvrage le plus fouillé sur l’histoire des Franco-Américains. La bibliographie renferme plus de 212 livres de référence.

Auteurs

  • Paul-François Sylvestre

    Chroniqueur livres, histoire, arts, culture, voyages, actualité. Auteur d'une trentaine de romans et d’essais souvent en lien avec l’histoire de l’Ontario français. Son site jaipourmonlire.ca offre régulièrement des comptes rendus de livres de langue française.

  • l-express.ca

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