Travailleurs étrangers: un comité demande la disparition des permis fermés

Travailleurs étrangers temporaires
Le Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration demande au gouvernement la fin des permis liés à un employeur donné pour les Travailleurs étrangers temporaires. Photo: iStock.com/Heidi Patricola
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Publié 08/11/2024 par Inès Lombardo

Dans un rapport, le Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration demande au gouvernement de ne plus utiliser de permis fermés, dans le cadre du Programme des travailleurs étrangers temporaires, malgré l’opposition des néodémocrates et des conservateurs.

Le rapport est sans équivoque: le Bloc et les libéraux se sont entendus sur le rapport qui demande au gouvernement de cesser de «recourir aux permis de travail fermés dans le cadre du Programme des travailleurs étrangers temporaires».

Qu’est-ce qu’un permis de travail fermé?

Il s’agit d’un «permis de travail lié à un employeur donné», qui permet à des employeurs canadiens de recruter des immigrants temporaires pour combler les besoins de main-d’œuvre. La particularité est que le travailleur étranger ne peut pas changer d’employeur pendant la durée de son permis.

Depuis 2014, seules les personnes admissibles au Programme des travailleurs étrangers temporaires (PTET) et au Programme de la mobilité internationale (PMI) peuvent en bénéficier.

Ce type de permis peut mener à des abus. Des cas d’abus – particulièrement dans les secteurs agricoles, agroalimentaires et de la construction – et d’exploitation, avec des conditions de travail et de vie dégradantes et humiliantes, hors du cadre légal, ont été rapportés.

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Un permis de travail ouvert?

Ce type de permis est délivré aux immigrants temporaires. À l’inverse des permis fermés, ils permettent au travailleur de changer d’employeur.

Remplacer par d’autres permis et formes de protection

Parmi les solutions envisagées pour le remplacer figurent: un accès facilité à la résidence permanente via des «“programmes particuliers” à exigences réduites»; la syndicalisation; la séparation des travailleurs étrangers temporaires concernés des autres bassins de candidats à la résidence permanente.

Des permis de travail sectoriels et régionaux constituent aussi une solution «intéressante», estime le porte-parole du Bloc québécois en matière d’immigration, Alexis Brunelle-Duceppe.

«En abolissant les permis de travail fermés, ça vient régler ce qui avait été décrié par le rapporteur spécial de l’ONU, qui disait que le système de permis fermé est un terreau fertile pour l’esclavage moderne. Donc, en faisant ça, on vient redonner un rapport de force aux employés vis-à-vis des employeurs.»

Le député de Saguenay-Lac-Saint-Jean voit une «bonne proposition» dans les permis régionaux, «puisque la pénurie de main-d’œuvre n’est pas la même au lac Saint-Jean qu’elle ne l’est à Toronto».

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Travailleurs étrangers
Alexis Brunelle-Duceppe. Photo: courtoisie

Le NPD demande des permis de travail ouverts

Toutefois, le Nouveau Parti démocratique (NPD) vient contrecarrer l’argument du Bloc, en se reposant sur le témoignage du Centre des travailleurs et travailleuses immigrants (IWC-CTI) en comité, sur les permis sectoriels, déjà utilisés pour les travailleurs étrangers dans le secteur agricole.

«Les travailleurs peuvent demander l’autorisation de passer à une autre exploitation agricole sans avoir besoin d’un nouveau permis de travail, mais ils doivent obtenir l’approbation de leur employeur actuel, du nouvel employeur proposé et de l’agent de liaison responsable du pays. Cependant, pour de nombreux travailleurs victimes de violence, il est tout simplement impossible de changer d’employeur.»

En conférence de presse jeudi, la porte-parole en matière d’Immigration pour le NPD, Jenny Kwan, a plaidé pour que les permis fermés soient remplacés par des permis ouverts, afin d’éviter les abus.

Respect et salaires compétitifs

Contrairement à son collègue du Bloc québécois, Alexis Brunelle-Duceppe, Jenny Kwan croit que cela ne déstabilisera aucunement le marché du travail canadien, si les conditions de travail offertes sont bonnes.

«Des témoignages au Comité ont dit que si l’employeur assurait de fournir aux travailleurs le respect, les salaires dans un environnement compétitif, ils pourront non seulement retenir les travailleurs, mais aussi les attirer», dit-elle.

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Après la victoire de Donald Trump, Jenny Kwan a confié avoir «très peur» pour les immigrants.

«De mon point de vue, ce que nous allons voir est des violations des droits de la personne atroces et de désespoir. Nous avons déjà vu comment l’administration Trump a mis les enfants en prison, séparés de leurs parents. Le Canada doit être le béton d’espoir pour la communauté, pour la communauté mondiale».

Travailleurs étrangers
Jenny Kwan. Photo: Inès Lombardo

Les conservateurs remettent en question «l’esclavage moderne»

Dans un rapport dissident à celui du Comité, le Parti conservateur du Canada (PCC) demande de son côté le maintien des permis fermés, avec un «programme autonome» de travailleurs étrangers temporaires dans les secteurs de l’agriculture et de l’agroalimentaire.

«Un système de permis de travail ouvert ne répond pas à l’objectif», considère le Parti conservateur, qui reprend dans le rapport les mots d’une témoin du comité, Gabriela Ramo.

Pour cette dernière, avec ce type de permis, «vous pouvez faire venir quelqu’un et penser qu’il va travailler dans les fermes, mais il pourrait travailler dans n’importe quel autre secteur».

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Les conservateurs en tirent la conclusion que les permis de travail fermés «offrent prévisibilité et fiabilité à un secteur où ces qualités sont rares».

Par ailleurs, s’ils «condamnent fermement l’exploitation et l’abus des travailleurs vulnérables» en exprimant leur «soutien total» à la prévention de ces abus, ils ont remis en cause l’accusation du rapporteur spécial de l’ONU sur les formes contemporaines d’esclavages, selon eux «sans fondement».

Ce dernier argument repose sur le fait que le rapporteur n’aurait «pas fait l’effort de visiter personnellement une exploitation agricole au cours de sa visite de 14 jours au Canada».

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