Riga, Tallinn, Helsinki… reines de la Baltique

Baltique, Riga
Églises gothiques et maisons à façades médiévales à Riga. Ici l'église luthérienne Saint-Pierre. Photos: Aurélie Resch, l-express.ca
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Publié 20/02/2025 par Aurélie Resch

Les pays du Nord de l’Europe sont sous tension depuis le début de la guerre entre la Russie et l’Ukraine, le 24 février 2022. Ils craignent pour leur sécurité et souffrent pour beaucoup des retombées économiques que ce conflit entraîne. C’est ainsi que je me retrouve à explorer trois reines de la mer Baltique: Riga, Tallinn et Helsinki, capitales respectives de la Lettonie, de l’Estonie et de la Finlande.

C’est au cœur de l’hiver que je choisis de me rendre sur ces territoires avalés par la nuit, mais, espérais-je, animés d’un esprit de fêtes tandis que 2024 cède la place à 2025.

Mer Baltique
La mer Baltique et les pays baltes Lituanie, Lettonie, Estonie, avec la Finlande (pays scandinave). Carte: CC BY-SA 3.0, Wikimedia Commons

Châtelaines du passé

C’est sûr que les romans d’Indrek Hargla, Henning Mankell, Simo Hiltunen ou Olivier Norek ont joué un rôle dans ma curiosité de ces villes en particulier et dans mon choix de saison.

J’ai trouvé Riga, Tallinn et Helsinki parées de leurs beaux atouts d’un temps révolu. Grandes dames, elles semblent s’effacer sous leurs vêtements d’antan qu’elles portent dignement.

À moins qu’elles ne préparent secrètement une sortie somptueuse à la lumière. Le temps me le dira.

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Aurélie Resch
Aurélie Resch à Helsinki.
Baltique, Helsinki
Sur l’île de Suomenlinna, accessible en traversier depuis le port d’Helsinki.

Le centre historique de Riga

J’ai été charmée par le centre historique de Riga, inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO en 1997. Ici, une ancienne pharmacie de la ville nous révèle ses secrets et sa porte dérobée. Là, on goûte aux notes fruitées et fleuries de la liqueur locale, le Baume Noir.

Je navigue de statue en statue, caresse un des quatre animaux de celle dédiée aux Musiciens de Brême offerte à la ville en 1990, car cela porte bonheur, paraît-il.

Plus loin, perchée sur un toit, celle d’un chat noir revient sur l’histoire des rivalités et querelles entre les marchands et la guilde.

Le propriétaire du bâtiment avait orienté l’arrière des chats vers le bâtiment de la guilde en face pour exprimer son mépris envers celle-ci. Plus tard, lorsque la situation s’apaisa, il les tourna pour que ce soient les têtes qui regardent dans la direction.

Baltique, Riga
Le centre historique de Riga.

Un monde souterrain

Je découvre aussi un monde souterrain en plein centre de Riga, quand un homme vêtu comme au Moyen Âge et se tenant devant la porte de ce que je croyais être un restaurant m’ouvre celle-ci et m’invite à entrer.

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Je descends par un escalier pentu plusieurs mètres sous terre et découvre, à ma grande surprise, tout un labyrinthe de salles moyenâgeuses réaménagées en restaurants et bars.

J’y admire l’épaisseur des murs, la taille des pierres et des poutres, et m’imagine la vie à cette époque. De retour à l’air libre, ce sont les ruelles pavées qui me guident d’églises gothiques en maisons à façades médiévales, à colombages, ornées de modénatures originales ou drôles.

Baltique, Riga
Une des salles moyenâgeuses réaménagées en restaurants et bars.

Moulures et dorures

Plus loin, c’est le quartier Art Nouveau qui retient mon attention. Les bâtiments à deux étages et plus de la rue Alberta rivalisent en excès, en moulures, en dorures et en statues, imposant un style majestueux et faste.

C’est à l’architecte Mikhaïl Eisenstein, père du célèbre réalisateur du Cuirassé Potemkine, Sergueï Eisenstein, que l’on doit cette architecture remarquable.

Baltique, Riga
À Riga: un style majestueux et faste.

Les remparts de Tallinn

À Tallinn, ce sont les remparts, la vieille ville et ses fortifications qui m’ont séduite. Une impression d’entrer dans un décor de chevalerie. Ville haute, ville basse, on vit, me semble-t-il, à un autre rythme.

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À cette période de l’année, le gel rend la marche difficile et glissante sur les pavés. La vue sur la mer Baltique depuis le haut des remparts me permet d’embrasser un paysage digne d’une peinture romantique.

Passé le portail médiéval et la montée sur la colline de Toompea, je me promène au gré des ruelles pour admirer le château et la cathédrale, les maisonnettes et les places avant de redescendre vers la ville basse, davantage animée.

Baltique, Tallinn haute-ville
Les fortifications de Tallinn.
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Le portail médiéval de Tallinn.

Ambiance médiévale

Là encore, l’ambiance XIII-XIVe siècles semble être intacte avec des ruelles tortueuses, des maisons médiévales, des tours, des clochers…

Parmi les curiosités, je découvre la plus vieille pharmacie d’Europe, les intérieurs des maisons de marchands, des cours de salsa donnés par un Cubain installé à Tallinn depuis presque une décennie…

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La plus vieille pharmacie d’Europe à Tallinn.
Baltique, Tallinn haute-ville
La cathédrale de Tallinn.

Helsinki cosmopolite

Davantage peuplée et animée, cosmopolite aussi avec 130 nationalités représentées, Helsinki déroule sa noble traîne historique avec ses cathédrales monumentales de la moitié du XIXe siècle, son imposante église St John (1888), ses façades Art Nouveau, ses places ornées de statues et la forteresse de l’île Suomenlinna, construite au XVIIIe et classée au patrimoine mondial de l’UNESCO.

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Je brave le vent et les flocons de neige pour prendre le pouls de la capitale et assister à son festival des lumières LUX.

lumiere
Festival des lumières à Helsinki.
Baltique, Helsinki
Détail de la facade de la gare d’Helsinki.

Et comme la coutume le veut, je m’adonne à l’art du sauna, dans l’une des nombreuses structures qui pigmentent la ville. C’est dans le marché couvert sur le port que je goûterai à différents plats chauds et au vin chaud durant mon séjour, histoire de sortir de ma contemplation des monuments et d’aller vers les gens qui s’y réunissent à midi et le soir venu.

Comme pour ses sœurs Riga et Tallinn, la capitale de la Finlande veut aller de l’avant et affiche des structures modernes avec sa bibliothèque Oodi, son musée d’art contemporain Kiasma et son stade olympique, qui offrent un contraste saisissant avec l’architecture.

N’empêche. En les parcourant, ces dignes souveraines de la mer Baltique, me semblent prisonnières de leur passé.

Baltique, Helsinki
La bibliothèque Oodi à Helsinki.
Baltique, Helsinki
Une grande artère commerciale d’Helsinki.

Un soviétisme toujours palpable

J’ai été frappée dans ces villes par une atmosphère que j’ai trouvée triste, tendue et méfiante dans une période de l’année qui aurait dû être festive et enjouée.

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Les marchés de Noël étaient peu remplis et surtout par des touristes, les chœurs d’enfants étaient monocordes et sans entrain, les gens ne riaient pas fort, ne sortaient pas des magasins et des boulangeries les bras chargés.

Peu d’entrain à entrer en 2025. À part un festival de lumière ici et quelques pubs là où la musique résonne, je ne trouve pas d’ explosion de joyeuse énergie.

À Helsinki, impossible de décrocher un sourire sur les visages des habitants.

Baltique, Helsinki
Art soviétique à Helsinki.

Des gens peu communicatifs

À Tallinn, les magasins de seconde main font la concurrence aux boutiques et le marché central de Riga (l’un des plus grands d’Europe) semble, dans sa structure bétonnée et lourde, comme dans ses denrées locales et ses vendeurs peu communicatifs au visage fermé, figé dans le temps.

À de rares exceptions près (une guide, une vendeuse et une passante), il m’a été difficile d’interagir avec les habitants. À Helsinki, à moins de barrer leur chemin pour les arrêter, impossible de parler à quelqu’un. Les gens tracent, peu enclins à écouter, échanger quelques mots, ne serait-ce que pour aider une voyageuse égarée.

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Baltique, Riga
On ne peut pas se tromper sur la nature de ce commerce.

À Riga et à Helsinki, la barrière de la langue et une distance manifeste dans les gestes m’ont tenue plus d’une fois à l’écart. Les échanges ont été brefs, superficiels. Difficile aussi de capter les yeux de mes interlocuteurs qui regardaient partout autour.

Pourtant, dans les bars et les restaurants, le soir, les jeunes et les adultes sortent et boivent, crient et rient. La musique joue fort. Mais dans les rues, on ne se mélange pas, on ne se hèle pas. On se hâte ou on n’y est pas.

Baltique, Riga
Aurélie Resch au centre de Riga.

Une ombre menaçante

Les statues soviétiques à Helsinki, les blocs d’immeubles en béton dans certains quartiers de Tallinn, les graffitis sur les murs, quelques œuvres de son musée d’art contemporain, Kumu, ou le musée du KGB à Riga m’aident à comprendre ou à imaginer cette retenue chez les gens, cette tension un peu partout autour de moi.

musée d'art contemporain
Le musée d’art contemporain, le Kumu, à Tallinn.
musée d'art contemporain
Au musée d’art contemporain, le Kumu, à Tallinn.
musée d'art contemporain
Au musée d’art contemporain, le Kumu, à Tallinn.

Il semble qu’une ombre menaçante pèse toujours sur ces villes. Que la méfiance est installée chez les gens.

Lorsque j’ai tenté d’aborder la question du conflit entre la Russie et l’Ukraine, seule une guide m’a répondu: «Les Russes représentent la majorité de mon chiffre d’affaires. Avec la guerre et les restrictions de déplacement, je ne gagne presque plus rien.»

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Poutine
La proximité de la Russie de Vladimir Poutine inquiète les citoyens des pays baltes.

Résilience, histoire, dignité, élégance. J’aimerais pourtant que la joie et la spontanéité s’invitent un jour et changent l’humeur des tableaux.

Auteurs

  • Aurélie Resch

    Chroniqueuse voyages. Écrivaine, journaliste, scénariste. Collabore à diverses revues culturelles. Réalise des documentaires pour des télévisions francophones. Anime des ateliers d’écriture dans les écoles, les salons du livre et les centres culturels.

  • l-express.ca

    l-express.ca est votre destination francophone pour profiter au maximum de Toronto.

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