Réflexions sur les services en français en Ontario

Et sur les droits scolaires constitutionnels au Canada

services en français, Le professeur Pierre Foucher entouré de neuf collaborateurs de l'ouvrage Droits, langues et communautés
Le professeur Pierre Foucher (tenant l'ouvrage Droits, langues et communautés), entouré de neuf rédacteurs: François Larocque, Ronald Caza, Anne Gilbert, Gabriel Poliquin, Stéphanie Chouinard, Graham Fraser, Érik Labelle Eastaugh, Maxine Vincelette et François Charbonneau.
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Publié 24/10/2023 par Gérard Lévesque

Dans cette deuxième chronique sur l’ouvrage Droits, langues et communautés, je vous signale la contribution de la professeure Anne Gilbert (Les services en français en Ontario en mal de géographie) et du doyen Érik Labelle Eastaugh (Droits linguistiques et droit politique: réflexions sur la dualité linguistique en tant que fondement du droit constitutionnel canadien).

Le professeur Pierre Foucher.

Cafouillis géographique

Dans son texte sur les services en français, Anne Gilbert explique qu’un aspect important du territoire dans lequel évoluent les francophones de l’Ontario reste négligé: «celui de sa prise en compte par l’État, lorsqu’il s’agit d’actualiser leurs droits à des services dans leur langue».

Elle cerne le problème: les structures territoriales qui encadrent l’action gouvernementale sont loin d’être favorables à la pleine réalisation des objectifs de la Loi sur les services en français (LSF).

Elle dénonce le fait que chaque ministère, agence et bureau du gouvernement gère son action sur le territoire à sa façon et avec sa propre géographie.

Elle pose la question: «Comment le ministère des Affaires francophones de l’Ontario (MAFO) peut-il appuyer le gouvernement de l’Ontario dans la prestation de services en français aux francophones de la province dans le contexte d’un tel cafouillis géographique?»

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services en français, Anne Gilbert
Anne Gilbert

Cheminement cahoteux

Elle précise que l’objectif de son texte est de faire ressortir l’importance pour le MAFO de se doter d’une telle structure géographique d’appui à la mise en oeuvre de la LSF.

Dans une note de bas de page, elle rappelle le cheminement cahoteux de la structure administrative: «L’Office des affaires francophones est devenu le ministère des Affaires francophones en juillet 2017, aboli en juin 2018, puis rétabli à la fin novembre 2018, suite à la mobilisation de la communauté franco-ontarienne.»

Sans structure territoriale forte

Elle constate que la communauté francophone de l’Ontario doit conjuguer avec un gouvernement provincial qui opère sans structure territoriale forte.

Elle l’a observé dans le domaine de la santé et du bien-être et affirme qu’elle aurait pu établir le même constat dans d’autres domaines de la vie collective, y compris la justice.

Selon elle, la mise en place d’un mécanisme spécialement conçu pour œuvrer directement dans les régions désignées apparaît non seulement souhaitable, mais nécessaire.

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Je partage son avis qu’il y a là matière à réflexion pour les juristes, les politologues et les géographes de l’Ontario français. Et, à cette liste, j’ajouterais les dirigeants des organismes de la francophonie ontarienne.

Professeure émérite

Anne Gilbert est professeure émérite au département de géographie de l’Université d’Ottawa, où elle mène divers travaux sur les langues et les cultures au Canada.

Elle s’intéresse aux lieux et territoires vécus et institutionnels des minorités francophones du pays et à leur géographie imaginaire. Ses recherches actuelles portent sur la dynamique de l’espace francophone dans la région d’Ottawa-Gatineau et à ses paysages.

Elle a été directrice de recherche au Centre interdisciplinaire de recherche sur la citoyenneté et les minorités (CIRCEM) et a dirigé le Centre de recherche en civilisation canadienne-française, maintenant connu sous le nom Centre de recherche sur les francophonies canadiennes., qui conserve le sigle CRCCF.

On lui a décerné l’Ordre des francophones d’Amérique en septembre 2013. Elle est membre de la Société royale du Canada.

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services en français, Pierre Foucher
La couverture de l’ouvrage Droits, langues et communautés – Mélanges en l’honneur du professeur Pierre Foucher, sous la direction de François Charbonneau, Stéphanie Chouinard et François Larocque.

D’une interprétation restrictive…

Dans son texte, le doyen Érik Labelle Eastaugh partage quelques réflexions sur le rapport entre le juridique et le sociopolitique inspirées par les analyses des décisions judiciaires Mackell (1916) et Mahé (1990) par le professeur Pierre Foucher.

La décision Mackell porte sur un différend découlant de l’adoption du Règlement 17 qui a eu pour effet d’interdire l’utilisation du français comme langue d’instruction dans les écoles ontariennes. Le Comité judiciaire du Conseil privé a interprété l’article 93 de la Loi constitutionnelle de 1867 de façon très restrictive et n’a pas tenu compte des liens étroits entre langue et religion.

… à une interprétation libérale

La décision Mahé c. Alberta est la cause de parents franco-albertains revendiquant la création d’un conseil scolaire de langue française en vertu de l’article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés.

La Cour suprême du Canada leur a donné raison en statuant qu’il est impossible d’interpréter les droits constitutionnels sans tenir compte de la matrice sociopolitique dans laquelle ils s’inscrivent.

Selon le doyen Labelle Eastaugh, «au Canada, le principe de la dualité linguistique…doit conditionner toute interprétation de la constitution écrite de l’État canadien.»

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avocat
Érik Labelle Eastaugh.

Observatoire international des droits linguistiques

Érik Labelle Eastaugh est professeur à la Faculté de droit de l’Université de Moncton, depuis 2017. Il est titulaire d’un doctorat en droit constitutionnel et d’une maîtrise en droit comparé de l’Université d’Oxford. Il a obtenu sa Licence en droit civil à l’Université d’Ottawa, en 2006.

Depuis 2021, il est directeur de l’Observatoire international des droits linguistiques de la Faculté de droit de l’Université de Moncton. Depuis le 12 juin 2023, il est doyen de la Faculté de droit de l’Université de Moncton.

Auteurs

  • Gérard Lévesque

    Avocat et notaire depuis 1988, ex-directeur général de l'Association des juristes d'expression française de l'Ontario. Souvent impliqué dans des causes portant sur les droits linguistiques. Correspondant de l-express.ca, votre destination pour profiter au maximum de Toronto.

  • l-express.ca

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