Reconnaissance des diplômes d’enseignement acquis en France: le programme tombe à l’eau

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L'Ontario aurait besoin de 1000 enseignants francophones de plus. Photo: iStock.com/Wavebreakmedia
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Publié 25/09/2024 par Soufiane Chakkouche

Annoncé en grande pompe en octobre 2021 par le consul général de France à Toronto de l’époque, Tudor Alexis, le projet pilote visant à reconnaitre directement des diplômes français relatifs au Master MEEF (Métiers de l’enseignement, de l’éducation et de la formation) ne fait plus l’actualité.

Qu’en est-il trois ans plus tard, alors que la pénurie d’enseignants francophones dans la province est loin d’être résorbée? Quels sont les autres programmes qui s’y sont substitués? l-express.ca revient à la charge.

«Une avancée majeure entre l’Ontario et la France en faveur du bilinguisme», c’est ce qu’avait tweeté Tudor Alexis à l’époque de l’annonce du programme pilote permettant aux détenteurs d’un master MEEF obtenu dans l’Hexagone de postuler à des postes d’enseignant dans les conseils scolaires francophones et anglophones de l’Ontario, et ce sans passer par la case OEEO (Ordre des enseignantes et des enseignants de l’Ontario).

Depuis cette annonce, l’eau a coulé sous les ponts, le consul général a changé, et le programme pilote semble avoir été jeté aux oubliettes!

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Le tweet du consul général de France en 2021,

Pas de chiffres précis

«Depuis 2021, le programme pilote visant la reconnaissance du Master MEEF par l’Ontario a permis à un nombre limité d’enseignants français de s’insérer dans le système éducatif ontarien», reconnaît l’actuel consul général de France à Toronto, Bertrand Pous, en poste depuis un an.

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«Il convient de préciser que ce dispositif n’est pas un mécanisme de coopération bilatérale qui serait copiloté par les autorités françaises et ontariennes, raison pour laquelle il nous est difficile de donner des chiffres précis».

Et d’ajouter: «Nous comprenons que la procédure de certification par l’Ordre des enseignantes et des enseignants de l’Ontario, même après la reconnaissance du MEEF, continue de se heurter à certaines contraintes administratives.»

Même son de cloche du côté de l’Association des enseignantes et des enseignants franco-ontariens (AEFO). «L’AEFO n’est pas au fait de ce qui est advenu du programme auquel vous faites référence, car nous n’avons jamais été impliqués dans sa conception et sa mise en œuvre», fait savoir la communication du syndicat, justifiant ainsi le refus de la nouvelle présidente à répondre à nos questions.

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Bertrand Pous, consul général de France à Toronto. Photo: courtoisie

Penser stratégie globale

Sollicitée à ce sujet, la ministre de l’Éducation de l’Ontario, Jill Dunlop, ne donne pas de chiffres précis spécifiques à ce programme non plus, préférant l’inclure dans une stratégie plus globale.

«L’Ontario s’engage à protéger et à préserver l’enseignement en français dispensé par des enseignants qualifiés dans nos classes. C’est pourquoi, en 2021, l’Ontario a lancé une stratégie de recrutement et de rétention des enseignants de français dotée de 12,5 millions $», écrit-elle à l-express.ca.

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Et de compléter: «La Stratégie de recrutement et de rétention des enseignants de français s’est avérée fructueuse jusqu’à présent. Nous avons constaté une augmentation significative du nombre de candidats de langue française inscrits sur notre portail de recrutement, ainsi qu’une augmentation des enseignants de langue française formés à l’international nouvellement certifiés par l’OEEO et 95 enseignants supplémentaires embauchés par les conseils scolaires de langue française depuis janvier 2023.»

Jill Dunlop
Jill Dunlop, ministre de l’Éducation de l’Ontario. Photo: courtoisie

Finalement, le projet a été abandonné

Les langues semblent donc très difficiles à délier à ce sujet. Cependant, à force de persister, cela a fini par payer.

«Le projet en question n’est plus actif. Malheureusement, il a eu très peu d’impact sur le système francophone», révèle Stéphanie Sampson, présidente de l’Association des directions et directions adjointes des écoles franco-ontariennes (ADFO).

Un programme parmi d’autres

Par ailleurs, si le consul général de France n’est pas en mesure de fournir un suivi précis de ce programme pilote, il paraît en préférer un autre.

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Stéphanie Sampson. Photo: courtoisie

«Ce programme pilote est un levier parmi d’autres. Nous souhaitons pour notre part mettre en avant le programme d’échange d’assistants de langue qui relève d’une vraie logique de coopération bilatérale», fait valoir le diplomate.

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Il rappelle que «le programme d’échange permet à des étudiants français (souvent issus de facultés d’éducation ou de didactique des langues) de venir soutenir l’enseignement du et en français au Canada. En contrepartie des jeunes diplômés canadiens se rendent en France pour une période de sept mois pour être assistant de langue anglaise dans les écoles françaises.»

Toutefois, selon le représentant de la France en Ontario, «ce dispositif, qui connaît un grand succès avec de nombreux partenaires, reste insuffisamment mis à profit en Ontario, avec seulement deux assistants recrutés en 2024 par l’Ottawa Carleton District School Board».

L’Ordre réduit le délai de traitement à 60 jours

L’OEEO est donc toujours de la partie s’agissant du recrutement d’enseignants francophones formés à l’étranger.

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Gabrielle Barkany. Photo: courtoisie

«Le nombre d’enseignants formés à l’étranger et certifiés par l’Ordre a plus que doublé depuis 2022. Un grand nombre de ces enseignantes et enseignants postulent avec des qualifications en français», avance Gabrielle Barkany, agente de communications principale de l’OEEO.

«Nous avons mis à jour nos processus de demande d’inscription afin de fournir une décision de certification aux enseignants formés à l’étranger dans un délai de 60 jours ouvrables, ce qui représente une diminution significative par rapport au délai de décision précédent de 120 jours.»

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Un manque de plus de 1000 enseignants par an

De plus, Gabrielle Barkany affirme que l’Ordre certifie «les enseignantes et les enseignants qui déposent une demande en vertu de la Loi sur la mobilité de la main-d’œuvre de l’Ontario dans un délai de 30 jours ouvrables».

Reste à savoir si ces mesures sont suffisantes, d’autant plus que selon une déclaration récente de la présidente sortante de l’AEFO, Anne Vinet-Roy, ce sont quelques 1050 enseignants en langue française qui devraient être formés chaque année, et ce pour les quatre prochaines années afin de pallier en partie cette pénurie.

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