Nouveau juge en chef: des réactions franco-ontariennes

Une occasion de faire le point sur la diversité et les langues officielles des tribunaux

Michael Tulloch, juge en chef de l’Ontario
Michael Tulloch, nouveau juge en chef de l’Ontario. Photo: courtoisie
Partagez
Tweetez
Envoyez

Publié 05/01/2023 par Gérard Lévesque

Réjouissances, demandes que le fédéral contribue davantage à l’égalité des deux langues officielles, offres de collaboration… Les réactions à la récente nomination de Michael Tulloch au poste de juge en chef de l’Ontario tiennent compte à la fois de la nécessité du respect de la diversité et du respect des deux langues officielles des tribunaux.

Bilinguisme officiel

Le commissaire aux langues officielles Raymond Théberge se dit heureux de constater qu’un juriste issu de la diversité ait été nommé juge en chef de l’Ontario et président de la Cour d’appel de l’Ontario.

«Je remarque cependant que le respect de la diversité et de l’inclusion propre à la société canadienne s’exprime parfois au détriment du respect des langues officielles, comme si ces notions étaient mutuellement exclusives et ne pouvaient coexister.»

Le juge Tulloch, en effet, ne parle pas français.

Raymond Théberge, commissaire aux langues officielles du Canada.
Raymond Théberge, commissaire aux langues officielles du Canada. Photo: courtoisie

Le commissaire croit fermement que diversité et bilinguisme sont des notions tout à fait compatibles, complémentaires et qu’elles sont bénéfiques pour la magistrature canadienne.

Publicité

Malheureusement, il arrive trop souvent qu’une personne qui parle la langue officielle de la minorité soit contrainte de plaider sa cause devant les tribunaux dans la langue de la majorité, et ce, en dépit de droits à l’effet contraire.

«J’espère que la nomination d’un juge en chef unilingue anglophone ne diminuera pas la capacité de la Cour d’offrir des services dans les deux langues officielles à la population», ajoute Raymond Théberge.

Il est particulièrement important que l’ensemble de la population canadienne se sente à l’aise de transiger avec le système de justice dans la langue officielle de son choix, car l’accès à la justice est un droit fondamental. 

Une avancée remarquable 

Pour la Coalition des Noir.e.s francophones de l’Ontario (CNFO), présidée par Julie Lutete, l’annonce de la nomination de Michael Tulloch est une avancée marquante vers plus d’inclusion.

Pour la toute première fois de l’histoire du Canada, une personne noire préside une cour d’appel provinciale. Par contre, bien que cette nomination soit accueillie favorablement par la collectivité noire en général, elle suscite une insatisfaction chez les Franco-Ontariens, notamment chez les Noir.e.s francophones de l’Ontario.

Publicité
juge en chef, Julie Lutete, présidente de la CNFO.
Julie Lutete, présidente de la CNFO. Photo: courtoisie

«Nous estimons, en effet, qu’en dépit de toutes les promesses faites par le gouvernement fédéral de promouvoir et encourager la dualité linguistique, le français n’est toujours pas considéré au même niveau que l’anglais comme une des deux langues officielles du Canada, mais reste et demeure pour ce gouvernement une langue de second degré.»

Le souhait de la CNFO, en cette nouvelle année 2023, est que la rhétorique fasse place au pragmatique et que le Canada devienne réellement un pays bilingue où les deux langues officielles jouissent d’un statut égal et équitable.

La CNFO vise à mobiliser les communautés noires francophones de l’Ontario pour aider à surmonter leurs défis, mieux répondre à leurs besoins et se développer en respect de leur identité propre et en harmonie avec l’ensemble de la population ontarienne.

Faire progresser l’accès à la justice en français 

Au nom de l’Association des juristes d’expression française de l’Ontario (AJEFO), la présidente Vicky Ringuette félicite Michael Tulloch pour sa nomination. Elle souhaite «continuer le dialogue et la collaboration afin de veiller à l’amélioration continue de l’accès à la justice en français en Ontario».

présidente AJEFO
Vicky Ringuette. Photo: courtoisie

L’AJEFO travaille notamment à outiller la communauté juridique de la province grâce à la plateforme Jurisource.ca. Elle appuie aussi le grand public à travers CliquezJustice.ca et le Centre d’information juridique de l’Ontario, «dont la demande est plus que jamais grandissante».

Publicité

«L’AJEFO souhaite collaborer avec le juge en chef et désire coopérer activement afin que, par le dialogue et les recommandations que nous pouvons offrir, nous puissions continuer de faire progresser l’accès à la justice en français partout en Ontario.»

commissaire aux services en français de l'Ontario
Kelly Burke. Photo: courtoisie

La Commissaire aux services en français de l’Ontario, Kelly Burke, ne commente pas la nomination du juge en chef de la province.

Elle tient toutefois à rappeler qu’elle considère l’accès à la justice en français comme une priorité dans la province.

«Et que, comme je l’indique dans mes récents Rapports annuels, le système en entier doit être régulièrement évalué et planifié adéquatement, pour que les francophones puissent exercer pleinement leurs droits linguistiques.» 

Approbation des nominations faites par le premier ministre 

Après l’annonce par le premier ministre Trudeau, le 19 août dernier, de la nomination de la juge Michelle O’Bonsawin à la Cour suprême du Canada, le Comité permanent de la justice et des droits de la personne (Chambre des communes) a tenu une audience spéciale le 24 août dernier.

Publicité

Ce processus vise seulement les nominations au plus haut tribunal du pays, pas les nominations aux postes de juge en chef et de juge en chef adjoint des provinces.

Pour une prochaine chronique, je vais donc inviter quelques membres du Parlement canadien et quelques membres de l’Assemblée législative de l’Ontario à nous faire part de leurs commentaires. 

Auteur

  • Gérard Lévesque

    Avocat et notaire depuis 1988, ex-directeur général de l'Association des juristes d'expression française de l'Ontario. Souvent impliqué dans des causes portant sur les droits linguistiques. Correspondant de l-express.ca, votre destination pour profiter au maximum de Toronto.

Partagez
Tweetez
Envoyez
Publicité

Pour la meilleur expérience sur ce site, veuillez activer Javascript dans votre navigateur