L’audacieuse histoire d’immigration de Christian Ouaka: de la Côte d’Ivoire au Nunavut

Histoires d'immigration, Christian Ouaka, Nunavut
Né à Abidjan, en Côte d’Ivoire, Christian Ouaka est arrivé à Moncton, au Nouveau-Brunswick, en 2013. Il a ensuite travaillé à Thunder Bay, dans le Nord de l’Ontario, pour finalement s’établir l’an dernier à Iqaluit, au Nunavut. Photos: courtoisie
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Publié 03/07/2021 par Éricka Muzzo

À 25 ans, l’Ivoirien Christian Ouaka estime que le goût de l’aventure, la curiosité, l’ouverture d’esprit et l’audace lui ont permis de vivre une rare histoire d’immigration… dans le Grand Nord canadien.

Il n’avait pas encore 18 ans lorsqu’il a quitté son Afrique natale pour venir étudier au Canada, à l’Université de Moncton. Deux baccalauréats et une maîtrise plus tard, il a fait son chemin.

Il occupe depuis le mois de décembre 2020 le poste de directeur général de l’Association des francophones du Nunavut (AFN).

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Christian Ouaka au Nunavut.

Histoire d’immigration improbable

«Si on regarde sur une carte, la probabilité que je quitte mon pays, qui est près de l’équateur, pour me rendre en Arctique, était très, très faible. Mais là j’y suis et je suis très content!», lance Christian Ouaka.

Depuis son arrivée au Canada en 2013, il est également passé par Thunder Bay, dans le Nord de l’Ontario. Il y a occupé le poste d’agent de développement socioéconomique pour le Réseau de soutien à l’immigration francophone du Nord de l’Ontario.

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«Quand j’ai annoncé que je partais pour Iqaluit, un de mes amis a dit pour rigoler que j’étais en train de sortir de la Terre… J’étais à Moncton, je suis parti à Thunder Bay. Et maintenant je suis monté encore plus haut», se souvient en riant le jeune directeur de l’AFN.

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Christian Ouaka au nord du 60e parallèle.

Préférence pour les petites villes

Il a beau être né à Abidjan, capitale économique de la Côte d’Ivoire qui compte plus de quatre millions d’habitants, Christian Ouaka souligne qu’au Canada il a toujours préféré vivre dans de plus petites villes, comme Iqaluit.

«J’ai toujours voulu découvrir l’Arctique parce que c’est quand même une région spéciale. Il fait froid. Le soleil se couche tard. Il y a des animaux qu’on ne voit pas dans le Sud. Je me suis juste dit qu’il me fallait un autre manteau et je suis allé l’acheter!»

Un choix qu’il ne regrette aucunement après un premier hiver dans le Nord. «Dès qu’on se retrouve ensemble, toute la communauté, on ne sent même plus qu’il fait froid dehors.»

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Christian Ouaka s’est acclimaté à un environnement très différent de celui de l’Afrique.

Surpris par l’architecture canadienne

Outre la température, Christian Ouaka se souvient d’avoir été surpris par l’architecture canadienne lorsqu’il est arrivé au Nouveau-Brunswick en 2013.

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«En Côte d’Ivoire, presque toutes les maisons sont en brique et en béton. Alors qu’ici c’est très rare de voir des maisons en béton. Ce sont plutôt les immeubles qui le sont.»

Il a également dû s’adapter à la langue de la région et particulièrement au chiac, qu’il «ne comprenait pas du tout!»

«Quand j’étais en première année de sciences politiques, j’avais un cours d’économie et le professeur, dans les démonstrations, parlait de s’acheter un char. Dans mon pays, le char c’est un engin de guerre, un engin militaire! Ensuite j’ai compris qu’il parlait d’une voiture», se remémore Christian en riant.

Christian Ouaka, chutes
Christian Ouaka.

L’audace comme mot d’ordre de son histoire d’immigration

C’est la visite d’un représentant de l’Université de Moncton à son école secondaire, en Côte d’Ivoire, qui a convaincu le jeune homme de traverser l’océan Atlantique pour poursuivre ses études.

«J’ai choisi sciences politiques, mais en fait je ne savais pas vraiment ce que c’était en tant que tel… J’ai juste vu le mot “politique” et j’ai toujours aimé la politique!», se souvient Christian.

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De fil en aiguille, le jeune étudiant d’alors a finalement décidé d’opter pour une majeure en sciences politiques, accompagnée d’une autre majeure en relations publiques.

«Je devais terminer en cinq ans, mais j’ai terminé en quatre ans et mon père m’a demandé ce que je voulais faire. Comme j’étais encore jeune et que j’avais reçu une invitation pour continuer à la maîtrise, j’ai opté pour ça!» relate encore celui qui a changé de branche pour se diriger en administration des affaires.

Christian Ouaka, diplômé
Christian Ouaka a complété deux baccalauréats et une maîtrise à l’Université de Moncton.

Beaucoup de petits boulots

Trouver un emploi n’a toutefois pas été si facile à Moncton. Au cours de ses études, Christian Ouaka a cumulé plusieurs petits boulots: homme de chambre dans un hôtel, assistant d’un professeur à l’université et travailleur dans une usine de crabe à Cap-Pelé (pas facile pour celui qui est allergique aux fruits de mer!).

Après avoir terminé sa maîtrise, il a occupé pendant un an un poste d’éducateur en petite enfance à Moncton avant de se décider à quitter la région pour obtenir un emploi dans son domaine, à Thunder Bay.

C’est également ce qu’il recommanderait aux étudiants internationaux qui terminent leurs études. «Je dirais de ne pas hésiter à être audacieux. On a tous un peu peur quelque part, mais ce n’est pas quelque chose qui m’a arrêté dans ce que je voulais faire.»

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«J’essaye, et si ça marche tant mieux, et si ça ne marche pas je réessaye autrement!», relate Christian.

«Je me suis dit que s’il fallait aller à l’autre bout du monde pour avoir ce que je voulais, j’allais y aller, et quelque part, c’est un peu ce qui s’est passé!», ajoute-t-il en riant.

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Christian Ouaka heureux au Canada.

Pas question de s’assoir sur ses lauriers

Aujourd’hui, Christian Ouaka se dit surtout «très reconnaissant» d’être là où il est.

«Ce que j’ai pu accomplir, je ne l’ai pas accompli tout seul, ça a été grâce au concours de beaucoup de personnes.»

«Je ne veux pas non plus m’assoir sur mes lauriers. C’est vrai que je suis jeune et que je suis directeur. Mais du jour au lendemain ça peut changer. Il faut toujours avoir la tête sur les épaules, ne pas devenir prétentieux ou arrogant», philosophe-t-il.

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«C’est une chose que je dis toujours à mes sœurs et à mes parents… que si je commence à changer de personnalité ou de comportement, qu’ils me grondent un peu parce que je n’ai pas du tout envie de changer qui je suis! Je préfère rester le Christian qu’on a toujours connu», ajoute le directeur de l’AFN.

Christian Ouaka, AFN
Christian Ouaka occupe depuis le mois de décembre 2020 le poste de directeur général de l’Association des francophones du Nunavut (AFN).

Des projets pour le 40e de l’AFN

Il s’enthousiasme des nombreux projets en branle à l’Association, qui fête cette année son 40e anniversaire.

«Il y a la Maison de la francophonie qui est un gros projet. Son but serait de réunir sous un même toit tous les organismes francophones d’Iqaluit.»

«En dehors de ça, il y a aussi le rayonnement de la francophonie au Nunavut. Parce que très souvent les francophones en situation minoritaire sont comme mis à l’écart, un peu oubliés. Donc il faut montrer que la francophonie est bien vivante au Nunavut et qu’elle rayonne à travers sa communauté!»

Une communauté multiculturelle tissée serrée

Celui qui a grandi «dans un pays où les liens sociaux sont très forts» a retrouvé avec plaisir ce sentiment à Iqaluit. Notamment au sein de la communauté francophone qui compte plus de 1000 locuteurs.

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«À Iqaluit, les francophones sont des francophones de partout. Des Français, des Africains francophones, des Canadiens francophones, des gens qui viennent d’Australie, du Madagascar, de Haïti. C’est vraiment un brassage culturel.»

«On est très fiers de ça à l’AFN et on travaille à développer cette francophonie plurielle là pour permettre l’épanouissement de la communauté», indique encore Christian Ouaka.

À titre personnel, il a pour projet d’inviter sa famille à le visiter «lorsqu’il fera moins froid» et que la pandémie le permettra, dans un ou deux ans. «Je veux qu’ils découvrent un peu l’autre extrême… Parce qu’en Côte d’Ivoire, c’est toujours des températures au-dessus de 25°C!»

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«Dès qu’on se retrouve ensemble, toute la communauté, on ne sent même plus qu’il fait froid dehors», assure Christian Ouaka.

Une histoire d’immigration qui n’est pas terminée

Depuis qu’il est arrivé au Canada, Christian est retourné à seulement deux reprises dans son pays d’origine, en 2014 et en 2018.

Cette année, il a bon espoir de pouvoir rentrer pour passer Noël avec sa famille. «Ça serait mon premier Noël avec eux depuis huit ans.»

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Christian a également déposé en mars dernier sa demande de résidence permanente, via le programme Entrée express – expérience canadienne. Il prévoit que sa demande de citoyenneté canadienne suivra dès que possible. En effet, il compte bien rester au moins encore dix ans!

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