Discours du Trône: la francophonie minoritaire reste sur la touche

discours du trône, roi Charles III
Environ un quart du discours du Trône a été lu en français pour le roi Charles III. Photo: capture d’écran CPAC
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Publié 27/05/2025 par Inès Lombardo

La visite-éclair du roi Charles III et de la reine consort Camilla avait un objectif clair: réaffirmer la souveraineté et l’unité du Canada face aux menaces du président américain Donald Trump. Un exercice réussi sur le plan de la diplomatie pour certains, mais pas sur celui de la francophonie pour d’autres.

Si la francophonie a bien été évoquée dans le discours du Trône, lu par le roi Charles III ce 27 mai pour ouvrir la 45e législature du Parlement du Canada, elle ne l’a pas été «à égalité avec l’anglais», estime Geneviève Tellier, professeure à l’École d’études politiques de l’Université d’Ottawa.

«Cela a pris du temps avant qu’on commence à parler en français. Habituellement, dans l’introduction, une phrase ou deux auraient pogné. Ça n’a pas été le cas. Le français du roi était bon, un peu rouillé. Peut-être que ça pourrait expliquer en partie la place du français», ajoute-t-elle.

Le discours du Trône?

Le discours du Trône, qui comprend le programme et les objectifs du gouvernement, ouvre une nouvelle session parlementaire.

Rédigé par le premier ministre, il est habituellement lu par la gouverneure générale, qui est la représentante du roi au Canada.

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Il a été prononcé pour la première par un souverain en 1957, par la reine Élisabeth II, au Sénat. Elle a réitéré l’exercice 20 ans plus tard, en 1977. Quarante-huit ans plus tard, c’est son fils, le roi Charles III, qui s’est prêté à l’exercice.

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Des milliers de gens se sont massés derrière les barrières pour espérer voir le roi et la reine, après le discours du Trône, le 27 mai. Photo: Inès Lombardo, Francopresse

La francophonie canadienne réduite au Québec

Le discours du Trône comportait un paragraphe sur la langue française, mais celle-ci a davantage été reliée à la culture québécoise.

«La langue française et la culture québécoise sont au cœur de l’identité canadienne. Elles définissent le pays que les Canadiens, les Canadiennes et moi aimons tant. Le Canada est un pays où l’on respecte et célèbre les langues officielles et les langues autochtones», a lu le roi Charles III, dans un français un peu hésitant, mais correct.

Le souverain a en outre rappelé que le gouvernement était déterminé à «protéger les institutions qui font rayonner ces cultures et cette identité […], comme CBC/Radio-Canada».

Un quart environ des 20 pages du discours ont été livrées en français. Malgré quelques références symboliques à la diversité du Canada du fait des langues officielles, des langues autochtones et de la multitude de peuples qui y ont immigré, la francophonie est restée à l’arrière-ban, particulièrement celle en situation linguistique minoritaire.

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Une déception que ne masque pas le sénateur acadien René Cormier, plusieurs fois président du Comité sénatorial des Langues officielles, et défenseur de la langue française.

«Ça ne témoigne pas de la présence et de la vitalité des communautés francophones et acadienne à travers le Canada. Et ça ne met pas de lumière sur cette réalité-là, qui est une vraie réalité, qui fait en sorte que si le français est parlé partout au pays, qu’on a des langues officielles, c’est bien aussi parce qu’il y a des communautés qui le parlent partout.»

René Cormier a toutefois salué la présence du roi et la qualité de son français.

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Le roi Charles III et la reine consort Camilla se sont recueillis devant le Monument de la guerre avant de repartir pour Londres. Photo: Inès Lombardo, Francopresse

Des «efforts pédagogiques» pour le gouvernement Carney

Dans son discours, le roi a également souligné «une admiration pour l’identité sans pareille du Canada», marquant ainsi une distinction entre le pays et son voisin du Sud.

Il a notamment mis de l’avant les racines «britanniques, françaises et autochtones» du Canada, devenu un «pays audacieux, ambitieux et novateur, qui est également bilingue, véritablement multiculturel et engagé dans la voie de la réconciliation».

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Toutefois, le Canada n’est pas entièrement bilingue. Geneviève Tellier rappelle que les langues n’ont toujours pas la même égalité partout au pays.

«On a l’impression que tant que ce n’est pas sur le radar québécois, ça devient secondaire. Puis on attend la catastrophe», souligne-t-elle.

La politologue illustre cette «catastrophe» par les seuils d’immigration francophone hors Québec, que le gouvernement fédéral n’a atteints «qu’à la dernière minute», après avoir réduit ses cibles d’immigration générale.

Pour elle, Mark Carney «ne démontre pas de sensibilité aux enjeux francophones hors Québec. Ça lui a été rapproché avec la disparition d’un ministre des Langues officielles. Il a corrigé le tir par la suite, mais c’est comme si à chaque fois il va falloir le rappeler à l’ordre. Il va très certainement y avoir un effort pédagogique assez soutenu à faire.»

Des excuses pour l’Acadie: «pas le bon moment»

Le souverain n’a jamais présenté d’excuses pour la déportation des Acadiens, ni pour les torts infligés à ce peuple par la Couronne britannique.

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Le sénateur René Cormier affirme à cet égard: «Je ne crois pas que c’était le moment pour ça. Parce que c’est clair qu’il s’agissait dans ce cas-ci non pas de s’excuser, mais de célébrer cette espèce de mouvement actuel d’adhésion à une certaine identité canadienne.»

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