L’agriculture, chasse gardée des hommes

Julie Francœur, Sortir du rang. La place des femmes en agriculture
Julie Francœur, Sortir du rang. La place des femmes en agriculture, essai, Montréal, Éditions du Remue-ménage, 2023, 112 pages, 17,95 $.
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Publié 25/10/2023 par Paul-François Sylvestre

Dans le secteur de l’agriculture, l’expérience passée et présente des femmes demeure invisible. Pourtant, la sociologue Julie Francœur sait qu’elles sont partout et nombreuses. Elle le démontre clairement dans Sortir du rang. La place des femmes en agriculture.

Au Québec, on estime qu’une agricultrice sur trois travaille encore dans une entreprise familiale sans salaire ni parts sociales. Les femmes dont l’autrice parle sont pour la plupart blanches, hétérosexuelles et sans handicap. Elles évoluent dans un monde où l’agriculteur moyen est un homme de 54 ans.

La terre de père en fils

«Il est temps, écrit Julie Francœur, de mettre des visages féminins sur l’image qu’on se fait des personnes qui produisent nos aliments, de faciliter et même de forcer leur reconnaissance, et de laisser libre cours à leur potentiel transformateur dans le milieu.»

Historiquement, on ne transmettait presque jamais de terres à une fille. On la mariait à un garçon établi. S’il existait des travaux de femmes, comme la production et la vente de fromage, l’activité des agricultrices était comprise et organisée comme si elle constituait une activité secondaire en comparaison du «vrai travail masculin».

Francœur souligne comment les agricultrices ont longtemps été soumises à une triple journée: travail à la ferme, responsabilités familiales, travail à l’extérieur de chez elles. L’alimentation bon marché dépendait du surtravail gratuit des femmes.

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Les femmes plus vertes

L’essai fait ressortir à quel point les femmes expriment une plus grande sensibilité pour la nature que les hommes, qu’elles se préoccupent davantage de l’écologie que leurs homologues masculins. Lorsqu’elles participent à la prise de décision, les femmes ont tendance à être plus vertes.

Dans un rapport pour le Conseil du statut de la femme (2019), on note que les femmes en agriculture font encore partie d’un véritable boys’ club. Si leur place dans le métier continue de dépendre du bon vouloir des hommes, Francœur prend soin de souligner leur propre capacité à sortir des sentiers battus.

Il existe des femmes qui osent prendre seules (ou avec d’autres femmes) les rênes d’une entreprise agricole. Dans ce cas, on ne les prend pas aussi au sérieux que celles qui travaillent aux côtés d’un homme. De plus, elles rencontrent plus d’obstacles pour se faire reconnaître dans le métier.

«Tout au plus, elles sont […] Ne pas se conformer au rôle de femme d’agriculteur et pratiquer l’agriculture en dehors du mode traditionnel et familial ne va pas de soi.»

Encore une minorité

Au Québec comme ailleurs, les agricultrices ont hérité de structures mises en place par des hommes, qui leur conviennent et qui font en sorte qu’ils se maintiennent dans des positions de pouvoir. Néanmoins, des portes s’ouvrent.

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Mais attention, ce serait une erreur «d’affirmer que l’agriculture se féminise. Les femmes demeurent une minorité dans le monde agricole. La plupart des voix audibles sont encore masculines.»

Auteurs

  • Paul-François Sylvestre

    Chroniqueur livres, histoire, arts, culture, voyages, actualité. Auteur d'une trentaine de romans et d’essais souvent en lien avec l’histoire de l’Ontario français. Son site jaipourmonlire.ca offre régulièrement des comptes rendus de livres de langue française.

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