Une projection brute pour sensibiliser aux violences sexuelles

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L'animatrice Cynthia-Laure Etom et les panélistes Aline Nizigama, Maryamou Dieye et Khedidja Hmamad, toutes expertes des violences envers les femmes. Photos: Soufiane Chakkouche, l-express.ca
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Publié 25/11/2025 par Soufiane Chakkouche

Il fallait slalomer entre les spectateurs pour trouver une place tant la salle affichait complet le 22 novembre dernier lors de la projection dans les locaux de l’Alliance française de Toronto (AFT) du film dramatique franco-belge, Slalom, coscénarisé et réalisé par Charlène Favier, à l’approche de la Journée internationale pour l’élimination des violences à l’égard des femmes.

«Cette violence demeure l’une des violations des droits humains les plus répandues», explique Raphaëlle Delaunay, directrice générale de l’AFT.

Au-delà du fait que le film en question s’inspire du vécu de sa réalisatrice, et qu’il a reçu une excellente critique qui lui a permis d’être présenté au festival du film de Cannes en 2020, ce long-métrage soulève plusieurs questions, tant par son sujet que par sa mise en scène.

Raphaëlle Delaunay, directrice générale de l’AFT.

Un entraîneur et «son» athlète

L’histoire est celle de Lyz qui, à 15 ans, rejoint un programme d’élite de ski-études. Fred, ancien champion devenu entraîneur, voit en la jeune athlète un talent exceptionnel et concentre tous ses espoirs sur elle.

Les victoires s’enchaînent… tout comme les abus sexuels de l’entraîneur sur l’adolescente, jusqu’à la faire perdre pied. 92 minutes d’une atmosphère lourde en sens et en art.

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Le moins que l’on puisse dire, c’est que la projection n’a laissé personne indifférent. «Je crois que je suis encore sous l’émotion de ce film», confirme Khedidja Hmamad, psychothérapeute, directrice de cours au campus Glendon de l’Université York et l’une des trois panélistes qui sont intervenues lors de la discussion qui a suivi la projection.

«Je voudrais remercier la réalisatrice parce qu’elle a su toucher et exprimer ce que la personne qui vit un abus peut ressentir comme ambiguïté, et naviguer entre la réalité douloureuse et l’espoir.»

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La réalisatrice Charlène Favier et l’affiche de son film Slalom.

Conscientisation

L’objectif principal du choix d’un film aussi lourd en atmosphère qu’en émotion est de susciter la sensibilisation et la prise de conscience.

«Ce film contribue énormément à la conscientisation, ça interpelle aussi bien les politiques que les parents ou les personnes qui interviennent au niveau communautaire, mais aussi à d’autres paliers», note Maryamou Dieye, travailleuse sociale.

«C’est très important de mettre en avant la pédagogie structurée autour de la conscientisation, car beaucoup de jeunes ne connaissent pas la vraie signification du consentement à un acte sexuel ou à une relation juste. Le consentement doit être libre, volontaire et sans ambiguïté dans la tête du jeune.»

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Projection du film Slalom et discussion sur les violences envers les femmes.

L’omerta

Toutefois, quand bien même le jeune est conscient de cette notion, il existe une loi muette, mais efficace, qui semble régir ces abus, surtout au sein des institutions qui tiennent beaucoup à leur image.

«La loi du silence est présente, surtout dans le sport et les institutions qui tiennent beaucoup à garder une image prestigieuse, et qui sont donc prêts à tout, y compris à étouffer ou à cacher ce qui mettrait une mauvaise lumière sur eux», affirme Aline Nizigama, directrice générale de YMCA Canada.

La panéliste est d’autant plus formelle que, selon elle, lorsqu’il y a un cas d’abus sexuel dans une institution, cela veut dire qu’il y en a d’autres, et ce «à cause de cette loi de l’omerta et ce système qui protège ce genre de comportement».

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La salle du théâtre Spadina était pleine.

Reconnaître les signes

Et pourtant, des signes annonciateurs existent bel et bien dans la plupart des cas. Mais ces derniers ne sont malheureusement pas toujours interprétés comme tels, comme le regrette la directrice générale de YMCA: «Les signes que tout le monde n’a pas su reconnaître font que c’est toujours difficile à nommer.»

«Comme quand on voit un enfant en difficulté, qui n’arrive pas à trouver les mots, qui est stressé, triste et pour lequel personne ne trouve la bonne attitude afin qu’il se livre et parle de ce qu’il traverse. Il y a beaucoup de travail à faire ici au niveau de l’école et de la famille.»

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Le constat est d’autant plus vrai qu’une étude publiée en 2023 dans la revue Frontiers in Psychology, analysant plus de 2000 jugements de cour et d’articles de presse concernant 120 cas d’abus sexuels commis par des entraîneurs canadiens, révèle qu’en moyenne, il se passe 14,1 années entre le premier abus sexuel subi par un jeune athlète et le signalement de ce fait à la police.

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