La gentillesse urbaine, un geste à la fois

Des dizaines de mini-bibliothèques privées gratuites à Toronto

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Une petite bibliothèque gratuite permettant de partager des livres, dans le quartier des Beaches à Toronto. Un geste de gentillesse devenu un phénomène mondial. Photos: Nathalie Prézeau, l-express.ca
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Publié 13/11/2024 par Nathalie Prézeau

Les petits gestes de générosité désintéressée et revigorante au quotidien contribuent à renforcer notre croyance que l’être humain naît bon. Ils font partie intégrante du tissu social d’une grande ville comme Toronto, des petites bibliothèques privées Free Little Library jusqu’aux histoires d’amour d’artistes pour les ruelles de leur quartier.

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Une petite bibliothèque dans le quartie Leslieville à Toronto.

C’est dans l’air

Le World Kindness Movement a pris forme fors d’une conférence au Japon en 1997. Il a lancé la Journée de la gentillesse en 1998. Depuis, cette journée est célébrée le 13 novembre dans une vingtaine de pays, incluant le Canada. Des démarches sont en cours auprès des Nations Unies pour que la Journée mondiale de la gentillesse soit officiellement reconnue.

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Message d’encouragement d’un inconnu sur le pont de la rue Queen Est au-dessus de la rivière Don et de l’autoroute DVP.

La tendance générale est encore d’associer la gentillesse à la naïveté, à quelque chose d’enfantin. Pourtant, au moyen-âge, on appelait gentilhomme le noble qui, de retour des invasions et s’ennuyant dans son château, pratiquait l’honneur et la charité en protégeant les villageois.

C’est ce qu’on apprend dans un discours du philosophe français Emmanuel Jaffelin. Celui-ci s’étonnait tellement de ne rien trouver sur la gentillesse dans la littérature philosophique qu’il a écrit son livre Petit éloge de la gentillesse.

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Plusieurs s’efforcent de nous faire comprendre les bienfaits d’être gentil selon la science, ayant un impact sur notre corps et notre mental.

En 2021, il y a eu le vaste «Kindness Test», menée par le Sussex Centre for Research on Kindness, et dont les résultats sont présenté dans les épisodes The Anatomy of Kindness de la BBC.

L’une des conclusions de cette recherche pourrait expliquer le mouvement des Free Little Library. Il semblerait que plus l’on parle à des inconnus, plus on reçoit de gestes gentils, et plus l’on remarquez la gentillesse autour de soi.

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La petite bibliothèque devant le 24 avenue Austin.

Des plateformes qui diffusent la gentillesse

Les Little Free Library ont commencé en 2009 par l’installation d’une petite boîte en forme d’école remplie de livres, devant chez lui, par un homme du Wisconsin en l’honneur de sa mère enseignante.

L’Internet aidant, le mouvement compte maintenant plus de 175 000 mini-bibliothèques répertoriées sur une carte interactive, dont une cinquantaine à Toronto, officiellement indiquées sur cette carte. L’une des plus jolies (24 avenue Austin) reproduit l’architecture de la maison derrière elle.

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Selon l’organisme, 72% des participants confirment avoir rencontré plus de voisins grâce à cette initiative. Et 98% des gens contactés affirment que leur quartier leur semble plus amical grâce à l’ajout d’une mini-bibliothèque.

On trouve sur leur site des instructions gratuite pour construire sa propre petite bibliothèque publique. Les moins habiles peuvent également en acheter une toute faite.

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La petite bibliothèque de la Danforth Mennonite Church.

Lancé en 2014, le réseau québécois de boîtes de partage Croque-livres, pour les enfants de moins de 12 ans, compte maintenant près de 3 000 mini-bibliothèques.

La gentillesse est contagieuse. On assiste maintenant à l’émergence des Free Little Art Galleries (lancées en 2002 et comptant maintenant 574 mini-galeries d’art sur leur carte interactive, dont plusieurs au Canada).

Il y a également les garde-manger Little Free Pantry (2 301 répertoriées sur leur carte incluant Toronto).

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Un garde-manger privé gratuit à Toronto.
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Le projet Little Free Pantry à Toronto.

Commentaires de Torontoises

Un petit sondage maison de l-express.ca a confirmé que les petites bibliothèques sont fort appréciées et utilisées régulièrement.

«Il y en a cinq autour de chez moi à pied dans les Beaches. J’en fait le tour en promenant mes chiennes. Je dépose et prends en permanence. J’adore!!!», affirme Karine Barrass.

«On en a souvent pris. Laissé aussi. Je m’arrête tout le temps quand j’en croise une. C’est drôle de voir comment chacune autour de chez moi a sa personnalité dans le contenu», remarque Andréanne Joly.

Ceux qui connaissent l’artiste Nathalie Nadon ne seront pas étonnés d’apprendre qu’elle a adhéré avec enthousiasme au mouvement, poussant plus loin leur usage. «Je faisais souvent des chasses aux trésors dans le quartier, et les enfants pouvaient aller se chercher un livre dans la petite bibliothèque quand ils avaient terminé. Parfois, je demandais aux parents de me donner quelque livres en français que j’ajoutais à la bibliothèque.»

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La mini-bibliothèque de Nathalie Nadon.

Free Little Library suggère d’ailleurs aux gens de faire une fête pour célébrer l’arrivée de leur mini-bibliothèque dans le quartier, en invitant les voisins à collaborer au contenu.

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Quelques autres exemples inspirants

BC Johnson est un artiste de la rue qui continue, au delà de ses 70 ans, de sortir de la grisailles certains recoins mal aimés de la ville.

Il n’a pas hésité à s’engager gratuitement dans des projets d’embellissement qui se sont échelonnés sur des mois. Entre autres, on retrouve ses murales dans deux ruelles à trois minutes de marche l’une de l’autre: Cottage Lane sur l’avenue Irwin (près du Ethiopian House Restaurant) et la ruelle en face du Artful Dodger Pub sur Isabella.

Dans Scarborough, BC Johnson a également habillé gratuitement plusieurs portes de garage de la ruelle Sandown entre les avenues Sandown et Claremore (1,5 km à l’Est des jardins Rosettta McClain).

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Une oeuvre de BC Johnson dans Cottage Lane.
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Une murale de BC Johnson sur Sandown Lane à Scarborough.
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L’artiste BC Johnson devant son oeuvre près de la rue Isabella.

Des voisins du ravin du parc Williamson (1680 rue Gerrard Est, à 2 minutes de marche du café Bodega Henriette) ne manquent pas une occasion d’améliorer le sentier souvent boueux qui longe le petit ruisseau de Small’s Creek pour le rendre accessible à plus de gens.

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Des voisins améliorent le sentier du ravin Williamson.
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Des voisins améliorent le sentier du ravin Williamson.

Parfois, les projets s’échellonnent sur des années, tels les escalier cachés d’Uli, qui montent l’Escarpement du Niagara à Hamilton.

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C’est le projet de retraite herculéen d’un seul homme, Autrichien d’origine. Construits majoritairement avec des pierres taillées, et bordés de branches, ces escaliers ont été terminés en 2007, mais Uli continuera de les entretenir tant qu’il le pourra.

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Les escaliers d’Uli à Hamilton.
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Uli faisant l’entretien de son escalier de l’escarpement du Niagara à Hamilton.

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