Sur les traces de la rivière Garrison disparue… et des papillons

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Des membres de la SHT et de Lost Divers au-dessus de la rivière Garrison disparue. Rue Crawford: un Îlot de verdure pour attirer les papillons. Photos: Dominique Guillaumant
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Publié 14/07/2024 par Dominique Guillaumant

Mercredi soir dernier, entre deux averses, la Société d’histoire de Toronto, en collaboration avec l’association Lost Rivers, tenait sa sixième visite guidée de l’année sur le thème de la rivière Garrison qui a disparu de la vie des Torontois depuis une centaine d’années. Les guides Rolande Smith et Paul Overy nous ont fait découvrir les vestiges qu’il en reste.

La Garrison, qui est longue de 7,7 kilomètres, prend sa source près des rues St-Clair et Dufferin. C’était la troisième rivière en importance entre la Don et la rivière Humber.

Si de nos jours elle n’est plus visible, c’est qu’au fur et à mesure que Toronto s’est développé, des industries se sont installées sur ses berges. Avec tous les déversements, la rivière était devenue un égout à ciel ouvert qui favorisait entre autres la propagation de plusieurs maladies.

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Une ancienne carte de la rivière Garrison, à Toronto. Photo: domaine public, Wikimedia Commons

Le parc Christie Pits

La visite a débuté au Sud du parc Christie Pits, qui est une ancienne carrière de sable et de pierres sur les flancs de la Garrison. L’eau de la rivière s’y accumulait pour former un étang. Le terrain annexé par la ville en 1884 a été transformé en parc en 1909.

L’ancienne carrière qui avait cessé d’opérer a été remblayée pour créer le parc Willowvale nommé ainsi pour les saules qui sont le gage d’eaux souterraines. Si depuis 1983, le parc est connu sous le nom de Christie Pits, une allée au Nord-Est du parc se nomme encore Willowvale.

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L’émeute du 16 août 1933

Afin de souligner un fait historique conséquent, on y trouve une plaque commémorative d’un des plus graves incidents racistes de Toronto.

L’émeute du 16 août 1933 a commencé alors que des provocateurs antisémites ont arboré une bannière avec une croix gammée lors d’un match de baseball impliquant une équipe principalement composée d’adolescents juifs.

La bagarre qui s’en est suivie a dégénéré avec l’arrivée de renforts de part et d’autre. Des jeunes catholiques d’origine italienne et ukrainienne venus des quartiers avoisinants ont pris le bord des Juifs. Il est estimé qu’environ 10 000 personnes ont participé à la bagarre qui a fait de nombreux blessés et a duré jusqu’au milieu de la nuit.

Les quelques policiers sur place ont vite été débordés et il a fallu à plusieurs reprises envoyer des renforts dont la police montée et des brigades à moto qui sillonnaient les rues pour séparer les belligérants.

D’ailleurs, la police a été largement blâmée pour sa lenteur à réagir et pour avoir volontairement ignoré tant les avertissements que les provocations des groupes pronazis impliqués. Afin d’éviter que ce type de violence ne se reproduise, William James Stewart, le maire de l’époque, décida d’interdire le port et l’exhibition de croix gammées.

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La plaque d’Heritage Toronto au sujet de l’émeute de 1933. Photo: Heritage Toronto

Le lac Iroquois et la présence autochtone

Suivant le cours de la Garrison, la vingtaine de personnes s’est dirigée au Sud de Bloor vers le Centre Brickford, qui est un établissement scolaire construit sans fondations au dessus de l’ancienne rivière qui a été recouverte d’un tunnel et ensevelie.

Les murales qui ornent le Centre Brickford rendent hommage à la présence des Premières Nations que l’on peut dater dans notre région jusqu’à 13 000 ans avant notre ère. Soit à l’époque où la fonte des glaciers a créé l’immense lac Iroquois.

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Le groupe de la SHT et de Lost Rivers devant le Centre Brickford.

Le chemin des papillons

Juste en arrière du centre, on a traversé le parc Brickford qui à cause de la Garrison est peu propice à la construction d’édifices.

Celui-ci a été revitalisé avec des îlots de plantes indigènes afin d’attirer les papillons. La ville de Toronto et plusieurs associations s’intéressent à préserver la biodiversité et à favoriser les insectes polinisateurs.

Un peu plus au Sud, le parc Art Eggleton est bordé à l’Ouest par une école primaire construite sur les anciennes berges de la Garrison et à l’Est par l’allée Grace Harbord West dont les portes de garage reprennent le thème des papillons et de la nature.

Toujours vers le Sud on a retrouvé d’autres vestiges de la Garrison avec des îlots de verdure pour attirer les papillons et la rue Crawford dont la forme sinueuse, héritée des anciennes berges de la rivière contraste avec le tracé rectiligne des rues avoisinantes.

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Canot avec des plantes propices à attirer les papillons.

La vallée tronçonnée

Tout au long du trajet soit entre chaque parc, nous avons traversé des rues importantes comme Bloor, Harbord et College qui à une autre époque correspondaient à des ponts qui étaient de plus en plus larges car huit affluents venaient alimenter la Garrison le long de son cours.

Tout comme de nos jours, les ponts étaient non seulement dispendieux mais aussi longs et dangereux à construire.

S’il en reste quelques vestiges comme le long de Harbord au Sud du parc Brickford, on peut aussi constater qu’avec l’enfouissement de la rivière, on en a profité pour remblayer le pont avec la terre escavée lors de la construction du métro. Il en résulte une vallée tronçonnée en plusieurs parcs de différentes tailles qui empêchent d’avoir une vue d’ensemble de l’ampleur du ravin d’origine.

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Un mur longeant le parc Crawford.
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Dans l’allée des papillons.
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Dans l’allée des papillons.

Les murales du 783 rue College

Notre parcours s’est officiellement terminé au parc Fred Hamilton où un petit bâtiment servant à l’entretien du parc relate en images ses liens avec la Garrison et fournit un exemple d’infrastructures écoresponsables pour la gestion de l’eau.

Cependant, en remontant la rue Shaw, comment ne pas remarquer les murales qui couvrent l’ensemble du mur Ouest d’une ancienne église transformée en bar et salle de spectacle: le Revival, au 783 rue College.

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Le propriétaire les a fait peindre pour relater l’histoire de la Garrison. On y voit plusieurs ponts en bois puis en métal qui permettaient de traverser la rivière comme le pont Crawford sur lequel ont été construits l’épicerie Metro et l’édifice même.

rivière Garrison, Revival
Détail du mur Ouest du Revival.
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Détail du mur Ouest du Revival.
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Détail du mur Ouest du Revival.

Des rivières qui se dévoilent

Cette visite d’environ 90 minutes constitue la première partie de la présentation.

Paul et Rolande ont annoncé que l’an prochain, ils veulent présenter l’autre partie de la rivière Garrison allant du parc Fred Hamilton jusqu’au lac Ontario en passant par le parc Trinity-Bellwoods jusqu’à Fort York, qui se trouvait près de l’embouchure de la rivière et qui lui a même donné son nom.

L’enfouissement commencé dès 1884 s’est poursuivi jusqu’en 1912. Toutefois, avec les changements climatiques et les pénuries d’eau, il est de plus en plus question de revoir la gestion des rivières et des terres humides en milieu urbain.

Ce courant, qui est mondial, préconise de réouvir ou de dévoiler certaines sections souterraines des rivières pour mieux gérer les eaux de pluie. L’organisme Lost Rivers est d’ailleurs impliqué auprès de la ville de Toronto pour identifier les meilleurs endroits où la Garrison pourrait être ramenée à l’air libre.

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Tous les ordres de gouvernements ont besoin d’être encouragés à en faire plus pour l’environnement. Les guides de la SHT et de Lost Rivers ont invité les participants à s’engager dans des groupes citoyens et communautaires, et à se faire entendre.

Auteurs

  • Dominique Guillaumant

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