Visiter l’imaginaire des Canadiens en 1867

Anne Trépanier, De l’hydre au castor
Anne Trépanier, De l’hydre au castor. Imaginaire et représentations de la Confédération dans la presse canadienne, 1844-1867, essai, Québec, Éditions du Septentrion, 2024, 276 pages, 39,95$.
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Publié 19/06/2024 par Paul-François Sylvestre

Phrases mordantes composées par des écrivains satiriques ou représentations loufoques dessinées par des caricaturistes, voilà sur quoi s’est penchée Anne Trépanier pour écrire De l’hydre au castor. Imaginaire et représentations de la Confédération dans la presse canadienne, 1844-1867.

L’autrice expose et rassemble dans ce livre des représentations du «Canada à naître», tirées de journaux et de feuilles satiriques provenant des provinces de l’Amérique du Nord britannique avant leur entrée dans la Confédération le 1er juillet 1867: la Nouvelle-Écosse, le Nouveau-Brunswick, le Canada-Est (Québec) et le Canada-Ouest (Ontario).

La Confédération: un monstre

Il ne s’agit pas d’une thèse ou d’un livre érudit, mais plutôt d’une «exploration curieuse et attentive d’images qui donnent corps et figures à des lieux communs de l’argumentation», au moment où se forme le Canada politique de 1867.

On n’hésite pas à utiliser la puissance de l’imaginaire des monstres pour décrire le projet de Confédération: spectres, fantômes, hydres et pieuvres.

Selon Anne Trépanier, bien que les journaux soient en noir et blanc, les images laissent voir un grand spectre de personnages colorés. On y trouve Batiste pour les Canayens, John Bull pour les Britanniques et Brother John pour les Américains.

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S’ajoutent des portraits caricaturés de politiciens tels que George Brown, John A. Macdonald ou Louis-Joseph Papineau, pour n’en nommer que trois.

Importance des journaux

On ne saurait trop insister sur l’importance des journaux dans le développement de l’opinion publique et de «l’alphabétisation politique» des futurs Canadiens. Or, l’objectivité n’avait pas sa place dans les journaux de la période étudiée.

Comme l’expriment les auteurs de l’essai Histoire du livre de l’imprimé au Canada, «elle était non seulement absente de la presse d’opinion du XIXe siècle mais contradictoire avec la conception même d’un journal politique». Ils rappellent qu’entre 1830 et 1870, le journal d’opinion est justement à son apogée dans la Bas-Canada et le Canada-Est.

Les images satiriques sont très présentes dans l’affirmation de l’imaginaire et de l’identité. Les métaphores viennent tout naturellement à la rescousse dans les deux cas. Et comme on le sait, la métaphore fait voyager les images, celles qui valent mille mots.

Images fortes

«Lorsque la narration est appuyée par des images fortes, en particulier lorsque ces allégories sont mises en images, la performance identitaire est soulignée et plus facile à lire. Les étapes de la distinction et de la différenciation, de l’identification et de la reconnaissance prennent alors des reliefs appréciables.»

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Anne Trépanier montre clairement comment les images textuelles et visuelles ont permis d’entrevoir un certain imaginaire de la Confédération.

Par exemple, ces images montrent bien le rapport trouble qu’entretient le Canada en devenir à l’égard de la Grande-Bretagne et des États-Unis. Le corpus évoque aussi «les tensions existantes entre les provinces et la peur, commune, de l’inconnu».

Le Canada de 1867 est un pays jeune, plein de controverses. Certaines réalités du XIXe siècle n’ont pas encore disparu au XXIe siècle.

Auteurs

  • Paul-François Sylvestre

    Chroniqueur livres, histoire, arts, culture, voyages, actualité. Auteur d'une trentaine de romans et d’essais souvent en lien avec l’histoire de l’Ontario français. Son site jaipourmonlire.ca offre régulièrement des comptes rendus de livres de langue française.

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