Une nouvelle orientation à l’Université de Toronto?

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Publié 21/02/2006 par Claude Bergeron

L’Université de Toronto semble en voie de céder à la construction en hauteur, ce à quoi elle avait assez bien résisté jusqu’ici. La bibliothèque Robarts et deux autres constructions des années 1960, période peu respectueuse de l’intégration, étaient les seules à dépasser 10 étages. Est-ce l’étroitesse des espaces vacants ou la volonté de l’université de se donner une nouvelle image qui serait la cause de ce changement?

En effet, les constructions des quelque deux dernières années sont presque toutes ce que l’on appelle communément des gratte-ciel. Après la résidence du collège Wadsworth à l’extrémité nord-ouest du campus, deux tours consacrées aux sciences de la santé sont en voie d’achèvement au coin diamétralement opposé.

Il existe des contextes où la construction en hauteur est tout à fait adaptée et ces nouveaux pavillons en sont l’illustration. Tous marquent des points d’entrée sur le campus. L’Université de Toronto s’est beaucoup appliquée, ces dernières années, à souligner ses entrées. Cela a pris des formes diverses et la tour de plusieurs étages est une solution certes acceptable si elle est bien intégrée à son milieu.

C’est ce qu’accomplit la résidence Wadsworth. Certains trouveront froid et d’allure machiniste cet édifice inspiré de l’architecture des années 1950. Néanmoins, cette tour à l’allure légère et élégante n’est pas en milieu étranger sur la rue Bloor, tandis que le soubassement en brique beige sur lequel elle se dresse borde correctement la rue et s’harmonise au Musée Bata, son voisin, tant par le gabarit que par la couleur.

Exactement à mi-chemin entre les limites nord et sud du campus, la nouvelle résidence Morrison établit des relations encore plus complexes avec son entourage. Comme la résidence précédente, elle repose sur une aile basse qui prolonge les lignes de sa voisine, la résidence Sir Daniel Wilson, dont elle reproduit aussi les couleurs. La brique beige est prépondérante aux deux premiers étages pendant que le troisième, en métal vert foncé, répond à l’ardoise du toit mansardé qui coiffe la résidence de 1955.

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En s’étendant loin vers l’est, cette aile basse joue plusieurs rôles. D’un côté, elle procure à la résidence une paisible cour intérieure et de l’autre elle borde un long passage qui mène de la rue à University College.

Les détails architecturaux signalent avec emphase cette voie qui pénètre au cœur du campus. Après la longue vitrine d’un café qui tourne le coin, les saillies et retraits du mur introduisent entre les étages un contraste qui accentue les horizontales et les lignes de fuite de la perspective.

C’est le dernier étage qui retient surtout l’attention. Le métal vert lui donne une identité propre, mais les fortes saillies des piliers qui se joignent aux poutres sur la toiture engendrent une silhouette très découpée. On a tôt fait de découvrir une ressemblance avec le pavillon Sidney Smith situé de l’autre côté de l’avenue St. George.

L’axe qui passe par le pavillon Sidney Smith et la résidence Morrison aboutit à l’est à la Soldiers’ Memorial Tower, dont l’importance tient surtout à des connotations historiques et symboliques. Ici aussi on remarque avec intérêt que le profil à gradins de la tour du Morrison Hall réalise une relation de formes avec ce campanile néo-gothique.

La résidence Morrison se dresse au milieu d’édifices dont elle accomplit la synthèse de façon ingénieuse. Ce faisant, ses auteurs, Zeidler Partnership Architects, ont créé un édifice qui affiche une identité propre.

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Les formes simples aux angles vifs lui donnent un caractère indéniablement moderne. Quant à la tour, c’est plutôt avec le style art déco que ses formes l’associent, un style absent du campus de l’Université de Toronto, au moins dans sa partie à l’ouest de Queen’s Park. Elle pourrait paraître lourde, mais les coins transparents réduisent l’effet de masse, et les façades exploitent l’élan vertical à la manière des gratte-ciel art déco: les fenêtres de tous les étages s’alignent sur une même verticale qui alterne avec un pan de métal continu depuis le sol jusqu’au sommet du mur.

Il est légitime de souhaiter que l’Université de Toronto préserve une oasis de constructions basses au cœur de la ville, et il faut la féliciter pour son opposition récente au projet d’une tour d’habitation de 46 étages. Force est d’admettre toutefois que les derniers pavillons n’ont causé aucun préjudice à son campus.

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