Un premier Observatoire du populisme au Canada

À l'Université York

Observatoire du populisme
Les profs Efe Peker (l’Université d’Ottawa ), Emily Laxer (Collège Glendon, Université York), Rémi Vivès (Collège Glendon, Université York). Photo: courtoisie
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Publié 03/10/2023 par François Bergeron

Des chercheurs de l’Université York viennent de lancer un «Observatoire du populisme», une initiative unique en son genre au Canada, qui veut «générer, encourager et mettre en lumière des recherches empiriques et théoriques rigoureuses sur le rôle croissant du populisme dans la société canadienne».

Sa directrice est Emily Laxer, professeure de sociologie au campus bilingue Glendon et titulaire de la chaire de recherche York sur le populisme, les droits et la légalité. Elle est assistée des profs Rémi Vivès (économie, également de Glendon) et Efe Peker (sociologie et science politique, Université d’Ottawa).

Populismes de gauche et de droite

«Le populisme peut avoir de nombreux visages et s’aligner sur des idéologies politiques parfois opposées», précisent les chercheurs.

«Qu’elle soit de gauche ou de droite, la rhétorique populiste divise le monde entre un «peuple» moral, défavorisé et homogène, et des «élites» corrompues et intéressées qui sapent la volonté générale.»

Les politiciens «populistes» se présentent alors comme offrant les seules solutions légitimes aux menaces posées par ces «élites».

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parlement, politique canadienne
Le «Convoi de la liberté» des camionneurs, qui a occupé le centre-ville d’Ottawa en février 2022, est certainement considéré comme un mouvement «populiste». Photo: Inès Lombardo, Francopresse

Pas nécessairement péjoratif

Cela dit, on ne peut pas présumer – comme on le fait souvent dans les médias – que «populisme» est nécessairement péjoratif, comme le serait un «Observatoire de la pollution» ou un «Observatoire des pandémies».

«Dans la littérature en sciences sociales», expliquent les profs Laxer, Vivès et Peker, «les chercheurs soulignent que le populisme peut avoir des composantes et des conséquences à la fois positives et négatives selon le contexte.»

Un mouvement populiste peut mobiliser la population «d’une manière qui élargit et approfondit la participation démocratique» (positif), ou «d’une manière qui cherche à limiter, par exemple, les droits des minorités» (négatif).

«Si un mouvement cherche à accroître la polarisation, la méfiance à l’égard des institutions publiques et à faire des populations vulnérables des boucs émissaires en utilisant des outils populistes, cela nuirait certainement à la démocratie.»

En revanche, certains intellectuels pensent que le populisme peut être un véhicule de «démocratie radicale»: «un moyen de remettre en question les structures de pouvoir établies et de favoriser une plus grande participation politique». Ce qui serait plus positif que négatif.

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À l’Observatoire, on se demandera «à quelles fins les outils populistes sont mobilisés par différents acteurs».

Pierre Poilievre, conservateur
Pierre Poilievre, le chef du Parti conservateur du Canada, verse-t-il dans le «populisme»? Et si oui, est-ce pour une bonne cause? Ses adversaires libéraux, néo-démocrates et bloquistes sont-ils eux aussi «populistes»? Photo: capture d’écran

Un nouveau défi

«Comprendre l’influence du populisme est un défi unique au Canada, où, jusqu’à récemment, on affirmait qu’il n’était pas apparu comme une force politique notable», déclare Emily Laxer.

«Toutefois, la montée des partis, des leaders et des mouvements qui utilisent la rhétorique populiste pour mobiliser les votes suggère qu’il est urgent de repenser cette conception.»

Leurs idées seraient de plus en plus reprises par les partis et les protagonistes politiques traditionnels.

Explosion de curiosité du public

C’est d’ailleurs ce qui a motivé les trois profs à créer l’Observatoire: «l’extraordinaire intérêt académique et public porté au concept de populisme dans les dernières années».

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«Par exemple, environ 60% de toutes les recherches scientifiques francophones et anglophones sur le populisme ont été menées depuis environ une décennie. Dans les recherches Google (Google Trends), nous constatons également une explosion de curiosité du public, au Canada et ailleurs, sur le sujet au cours de la même période.»

«Il en découle de nouveaux défis et de nouvelles opportunités pour les sciences sociales. L’Observatoire a été fondé dans le but de clarifier le débat public sur le populisme dans le contexte canadien.»

l’Observatoire produira des recherches originales qui seront publiées non seulement dans des revues académiques, mais aussi dans des «notes de recherche» à destination des médias et du grand public.

Son site web offre déjà trois de ces notes de recherche: sur l’intérêt public envers le populisme tel que mesuré par les tendances Google; sur la recherche d’un coupable de l’inflation; et sur l’impact du «Convoi de la liberté» des camionneurs sur la popularité du chef conservateur Pierre Poilievre.

Observatoire du populisme
En page d’accueil de l’Observatoire du populisme au Canada.

Participation des étudiants

Les étudiants de York et de Glendon pourront participer aux travaux de l’Observatoire. «Nous disposons déjà de six assistants de recherche directement intégrés au projet, et nous avons été ravis de constater la présence de nombreux étudiants du premier cycle lors du lancement le 26 septembre», mentionnent les chercheurs.

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«Des cours, ateliers et autres activités seront organisés pour les étudiants, qui apporteront énergie et nouvelles idées à l’Observatoire.»

Le site web est en anglais pour le moment, mais «l’Observatoire fonctionnera à la fois en anglais et en français», assurent ses créateurs. «Nous travaillons actuellement avec des collègues de Glendon pour nous assurer que le contenu de la recherche et le matériel présent sur le site Web soient complètement bilingues.»

Auteurs

  • François Bergeron

    Rédacteur en chef de l-express.ca. Plus de 40 ans d'expérience en journalisme et en édition de médias papier et web, en français et en anglais. Formation en sciences-politiques. Intéressé à toute l'actualité et aux grands enjeux modernes.

  • l-express.ca

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