Un livre d’art et une exposition au Grand Palais de Paris

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Publié 19/04/2011 par Gabriel Racle

L’histoire de l’art recèle parfois des surprises ou des découvertes, toujours intéressantes évidemment, pour qui n’est pas spécialiste de certains sujets. Ainsi, nous avons tendance à penser que les paysages des tableaux que nous contemplons sortent depuis toujours de la palette des peintres. Ces artistes doivent être sensibles à cet environnement multicolore et sans cesse changeant.

Nous sommes peut-être influencés, et c’est bien normal, par un romantisme latent qui a embrasé de mille feux l’époque romantique, pas si lointaine, puisqu’il a brillé au cours du XIXe siècle, et auquel les mouvements verts actuels lui redonnent un certain écho.

«Mais la nature est là qui t’invite et qui t’aime; plonge-toi dans son sein qu’elle t’ouvre toujours», écrivait le grand poète romantique Lamartine (1790-1869) dans son poème Le vallon.

Art pictural

Et les expositions recettes que nous avons pu voir ou leurs catalogues que nous avons feuilletés ou parcourus attentivement ne peuvent que conforter cette impression: L’Âge d’or hollandais, Monet, Les paysages de Renoir, Van Gogh et autres expositions dont L’Express a rendu compte.

Pourtant, l’entrée des paysages dans l’art pictural ne s’est pas faite spontanément dès les origines de la peinture. L’occasion de le découvrir nous est donnée dans une «leçon» d’histoire de l’art, présentée dans un langage très accessible, avec une abondance de reproductions.

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Nature et Idéal – Le paysage à Rome 1600-1650, Paris, Éditions RMN, 25×24 cm, 288 p, 190 illustrations couleurs: ce superbe livre d’art paraît à l’occasion d’une exposition qui sous ce titre se tient au Grand Palais à Paris jusqu’au 6 juin et au musée du Prado à Madrid du 28 juin au 24 septembre. Cet ouvrage comporte deux parties, ce qui ajoute à son intérêt: une partie didactique, qui explique la naissance de l’art pictural du paysage et son évolution, et un catalogue qui présente les tableaux et les dessins exposés.

D’abord à Rome

C’est à Rome, dans la première moitié du XVIIe siècle, que débute véritablement l’histoire de la peinture du paysage. Auparavant, la représentation de la nature n’existait pas en tant que genre autonome dans la peinture européenne.

On voyait des paysages dans des tableaux, mais ils servaient simplement de décor d’arrière-plan. Avec le perfectionnement des techniques de reproduction des personnages, on en vient à améliorer le décor dans lequel ils se trouvent, pour assurer une certaine cohérence à l’œuvre, jusqu’au point où il tient trop de place.

Les artistes flamands et italiens vont régler cette ambivalence, les personnages ou le paysage, en inventant un cadre pour y placer les paysages, la fenêtre.

Finalement, on ouvrira tellement la fenêtre que le paysage miniature prendra les dimensions d’un tableau. Et Rome est un lieu propice pour cette évolution qui est même une révolution.

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Comme l’écrit un commentateur de l’exposition: «Soudain le paysage paraît!»

Rome était depuis longtemps une destination convoitée par les artistes désireux d’y compléter leur formation, mais à la fin du XVIe siècle, divers facteurs vont permettre l’éclosion de ce genre profane: la présence simultanée de peintres parfois spécialisés venus de multiples foyers artistiques, en particulier des Flandres; l’existence de grandes collections de peintures des maîtres de la Renaissance; l’immense succès commercial du paysage peint auprès des amateurs, en particulier ceux de l’aristocratie et des familles pontificales, et précisément les fortunes dont ces privilégiés disposaient, qui faisaient facilement d’eux des mécènes. Ce sont là quelques-unes des raisons qui expliquent «Le paysage à Rome».

Les artistes

D’Annibal Carrache à Adam Elsheimer, de Pieter Paul Rubens à Paul Bril, de Claude Lorrain à Nicolas Poussin en passant par Gaspard Dughet, quelques-uns des plus grands peintres du XVIIe siècle vont contribuer à l’éclosion du paysage.

L’exposition, les études et le catalogue du livre présentent certaines de leurs créations les plus abouties, en illustrant et en expliquant «leurs contributions à l’élaboration de différents types de représentations de la nature, des vues idéales de la campagne romaine aux marines, en passant par les caprices architecturaux et les scènes antiques chargées de nostalgie où alternent les mythes et l’histoire».

Carrache, un Italien, donne le ton, en particulier avec La Fuite en Égypte, «qui établit un modèle de paysage idéal, héroïque, historique ou classique que de nombreux peintres devaient suivre dans leurs compositions» (p. 20).

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Paysage classique

Le paysage tel qu’il va se développer est idéal parce que la Nature y est rendue esthétique par un travail artistique d’harmonisation et de perfectionnement.

Deux artistes vont particulièrement s’illustrer dans ce genre du paysage classique, qui idéalise le cadre naturel, Poussin et le Lorrain. Tous deux sont largement étudiés et leurs œuvres présentées dans l’ouvrage comme dans l’exposition.

«Le paysage est devenu une catégorie à part entière de l’histoire de la peinture: il en sera désormais indissociable.»

Pour comprendre ce tournant dans l’histoire de l’art, une occasion exceptionnelle est offerte avec cette exposition et cet ouvrage d’art (environ 50$).

Auteur

  • Gabriel Racle

    Trente années de collaboration avec L'Express. Spécialisé en communication, psychocommunication, suggestologie, suggestopédie, rythmes biologiques, littérature française et domaine artistique. Auteur de très nombreux articles et d'une vingtaine de livres dont le dernier, «Des héros et leurs épopées», date de décembre 2015.

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