Les bleus, les veines, les rides, les courbatures, les cicatrices, tout cela raconte un passé. À l’emploi d’un centre d’hébergement de soins de longue durée (CHSLD), un cocon de fin de vie, Clara Grande en est témoin et raconte son expérience dans Un jardin l’hiver, son premier roman écrit au «je».
Madame Petitclerc, Monsieur Delisle, Madame Gagnon, Monsieur Potvin, Madame Ponzi, Madame Robinson, Monsieur Maltais, Madame Ménard, autant de patients dans le CHSLD de Rosemont où Clara, 32 ans, remplit le rôle d’aide de service. À une exception près, tous les corps qu’elle touche ont au moins trois quarts de siècles.
Bingo!
Clara se demande à quel instant les patients ont la force de laisser s’envoler leur pudeur. Lorsqu’une cloche sonne, elle doit souvent se rendre à une chambre pour prêter main forte à quelqu’un qui a besoin d’uriner, de déféquer ou de faire sa toilette. Parfois c’est pour entendre une plainte, un éternel refrain: «Personne s’occupe de moi!»
Le dimanche après-midi, c’est le bingo. Plusieurs sont ravis, certains grimacent. Les prix incluent des gracieusetés offertes par des employés: sacs de chips, vernis à ongle, gourde de plastique, cahier de sudoku, jeu de cartes, lampe de poche.
Repas et avances
Un jardin l’hiver ne manque pas d’humour, comme en fait foi ce petit échange:
– Voulez-vous une banane, madame Thivierge?
– Elle est-tu ben dure?
– Juste parfaite.
– Ah, parce que moi, j’aime ça ben dur!