Au fond de la conscience d’un tueur en série

Michèle Ouimet, L’Homme aux chats
Michèle Ouimet, L’Homme aux chats, roman, Montréal, Éditions du Boréal, coll. Boréal noir, 2021, 256 pages, 29,95 $.
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Publié 02/02/2022 par Paul-François Sylvestre

Un psychopathe terrorise le Québec. Une ministre est dans l’eau bouillante. Un chef de police se défend en exigeant davantage de moyens. L’opinion publique se déchaîne. Voilà la toile de fond du premier thriller de Michèle Ouimet, L’Homme aux chats.

L’histoire se déroule à Montréal en 2018, mais dans la première moitié du roman, les chapitres sont souvent entrecoupés de flashbacks qui remontent aussi loin que 1980. La métropole est en état de choc. C’est la quatrième femme qu’on retrouve dans une ruelle, morte, sauvagement torturée.

 Un tueur perfectionniste

Manifestement, il s’agit de l’œuvre d’un tueur appliqué, minutieux, perfectionniste. Qui obéit à un rituel immuable en disposant les vêtements soigneusement pliés à côté de la victime… Avec un chat étranglé, d’où le titre L’Homme aux chats.

Un profileur ressasse de vieilles théories à l’effet que les meurtriers en série sont de grands manipulateurs… Que leur vie est basée sur le mensonge… Qu’ils n’éprouvent pas de remords ni de sentiment de culpabilité, qu’ils sont incapables d’introspection.  Que leurs seules émotions sont liées à eux-mêmes, jamais aux autres.

On apprend que les psychopathes forment seulement un pour cent de la population adulte. «Ce sont des narcissiques, ils se croient supérieurs aux autres, très froids, très en contrôle.»

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Le héros du roman «se sent tout-puissant, en contrôle de tout: de sa vie, de son œuvre, de ses meurtres et de sa destinée de tueur».

L’enquête piétine

Face au piétinement de l’enquête policière, les journalistes se défoulent à coups de «tabarnak de câlisse d’ostie de gang d’incompétents». Deux d’entre eux, un homme et une femme, rivalisent pour obtenir la une, ils s’épient et se jalousent à qui mieux mieux.

L’instinct de la femme lui souffle que quelque chose de ténébreux se cache derrière la façade lisse de son confrère masculin. Comment ce dernier, «cul-terreux, méprisé, agressé», a -t-il pu devenir le grand journaliste cité à l’Assemblée législative?

Les vêtements empilés près des victimes n’incluent jamais de petites culottes. L’homme aux chats devient dès lors le maniaque aux petites culottes.

Une seule proie réussit à s’échapper du psychopathe. Après avoir failli être violée, torturée et étranglée, elle affirmera que le cancer ressemble à une partie de plaisir.

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Un enfant de l’inceste

On découvre que le meurtrier en série lutte pour surmonter ses peurs d’enfant, qu’il est envahi par des images de violence, de sang et de sexe. Il ne sait pas qui est son père, mais tout porte à croire qu’il s’agit d’un des frères de sa mère. Il serait un enfant fruit de l’inceste.

Le sexe turgescent éclabousse quelques pages du roman. Le meurtrier aime jouer en boucle dans sa tête la scène de sa victime ligotée. «Cette pensée l’excite tellement qu’il éjacule.»

Malgré une vie professionnelle honorable, le psychopathe considère qu’il n’est rien, que du vide, un vide abyssal. «Seuls les meurtres, la torture et le viol peuvent remplir ce vide. […] Seul un nouveau meurtre peut calmer la bête qui rugit en lui.»

Grâce à son écriture directe et impitoyable, Michèle Ouimet nous entraîne dans une plongée vertigineuse au plus profond de la conscience d’un tueur en série.

Auteur

  • Paul-François Sylvestre

    Chroniqueur livres, histoire, arts, culture, voyages, actualité. Auteur d'une trentaine de romans et d’essais souvent en lien avec l’histoire de l’Ontario français. Son site jaipourmonlire.ca offre régulièrement des comptes rendus de livres de langue française.

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