Ségovie : une histoire endiablée

Vue générale de la vieille ville avec ses remparts et la cathédrale Sainte-Marie, 1525-1577.
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Publié 17/03/2019 par Gabriel Racle

Ségovie est une ville du centre de l’Espagne, située à seulement 90 kilomètres au nord-ouest de la capitale Madrid. Il faut distinguer la Ségovie moderne de la vieille ville de Ségovie, perchée à quelque 1 000 m d’altitude sur un promontoire rocheux faisant face à la Sierra de Guadarrama, au confluent des rivières Eresma et Clamores.

Peuplement très ancien

Cette situation géographique est particulièrement importante pour comprendre l’histoire qui nous intéresse avec ses répercussions, l’alimentation en eau des habitants de la ville.

Celle-ci a bénéficié d’un peuplement très ancien et d’un riche développent au fil du temps. Il Il était relativement facile d’en assurer la protection, sous forme de murailles ou de remparts qui subsistent toujours et que l’on peut voit sur l’illustration générale jointe de cette vieille ville.

Mais il fallait aller chercher de l’eau dans les rivières au pied de l’éperon rocheux et la remonter dans des récipients de l’époque. Une corvée très fatigante et pourtant quotidiennement nécessaire.

Conquête romaine

La conquête romaine de la péninsule lusito-espagnole commencée vers -218 va changer les choses, la vieille ville de Ségovie étant alors considérée comme une importante place forte surveillant la région.

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Il en résulte donc une romanisation culturelle et matérielle qui se caractérise par un riche patrimoine local dans lequel se distingue un colossal aqueduc construit au Ier siècle.

Avec cet ouvrage monumental, les corvées d’eau sont terminées. L’eau qu’il transporte vient de loin, de la rivière Fendrai à 17 km de Ségovie, grâce à un canal d’alimentation de l’aqueduc, nécessaire pour atteindre la ville haut perchée.

L’aqueduc édifié dans la deuxième moitié du Ier siècle ou au début du IIe siècle.

L’aqueduc de Ségovie

L’aqueduc est une spécialité des Romains qui ont construit un très grand nombre de ces monuments. Celui de Ségovie est particulièrement célèbre par ses caractéristiques et son admirable état de conservation..

C’est une merveille architecturale que l’on peut toujours admirer dans la vieille ville de Ségovie. Il mesure 613 m de long et compte 166 arcs répartis sur deux niveaux. Sa hauteur la plus élevée est de 28,5 m. Sa pente prévue pour l’écoulement de l’eau est de 1%.

Il est formé de 20 400 blocs de granite qui ne sont liés que par leur propre poids, sans aucun mortier, grâce au parfait équilibre des forces.

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Les ouvriers romains creusaient de petites cavités latérales sur les pierres afin de pouvoir les manipuler avec une louve, une pince auto-serrante permettant de lever ces pierres. L’aqueduc traverse la vieille ville de Ségovie. «Cet aqueduc est sans aucun doute le plus important vestige romain de toute l’Espagne, perpétuant l’image de la ville de Ségovie.»

Il faudrait préciser qu’il s’agit de l’image romaine de la ville, car l’aqueduc a été construit sous le pouvoir impérial de Claude, empereur romain qui a régné de 41 à 54 de notre ère et de sa succession. C’est du moins l’histoire officielle.

L’Alcazar de Ségovie, forteresse royale construite en 1130 à l’extrémité du promontoire.

Pacte avec le Diable

Mais une histoire très différente court dans les rues et les foyers de la vieille ville. La perfection de l’aqueduc en serait-elle la cause? On ne le sait.

«Il y a fort longtemps, une jeune porteuse d’eau, lassée de grimper les rues escarpées de Ségovie, signa un pacte avec le Diable: si celui-ci parvenait à faire venir l’eau jusqu’à la porte de sa maison avant le premier chant du coq, elle lui offrirait son âme.»

«Mais la jeune fille, prise de remords, pria toute la nuit pour que le diable ne parvînt pas à terminer l’aqueduc.»

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«Tant et si bien qu’une tempête se déchaîna. Et alors que le Diable s’apprêtait à poser la dernière pierre à son ouvrage, le soleil se leva et le chant du coq retentit. La jeune fille fut sauvée et Ségovie gagna son aqueduc, que les habitants, par précaution, arrosèrent d’eau bénite.»

Une statue du Diable!

«Cette légende méritait bien une statue. C’est en tout cas ce qu’a estimé la maire de Ségovie. En octobre 2018, elle a donc annoncé avoir accepté le don d’une sculpture du Diable réalisée par un artiste local, sans imaginer la polémique que cela soulèverait.» (Le Monde)

En voyant les images de la statue réalisée par cet artiste, deux associations catholiques de riverains se sont mobilisées contre celle-ci. Elles ont recueilli plus de 12 000 signatures sur le site de pétition en ligne.

Et elles ont porté plainte devant la justice pour «atteinte aux sentiments religieux». Mais la statue de bronze, de 1,70 mètre de haut a été installée le 23 janvier2019.

La statue du Diable dans l’atelier du sculpteur.

Le train et l’autobus

Il est facile de gagner Ségovie en prenant le train à Madrid. À la gare de Ségovie un autobus attend les voyageurs et les dépose au pied de l’aqueduc. Il n’y a plus qu’à découvrir les richesses architecturales historiques de la ville.

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Les monuments importants sont nombreux: l’Alcázar, du XIe siècle, plusieurs églises romanes, des palais de la noblesse des XVe et XVIe siècles, la cathédrale gothique du XVIe siècle, dernière de ce style en Espagne;. Et l’Hôtel de la Monnaie, le plus ancien bâtiment industriel d’Europe subsistant en Espagne.

Une visite inoubliable avec l’aqueduc en fond de décor.

Auteur

  • Gabriel Racle

    Trente années de collaboration avec L'Express. Spécialisé en communication, psychocommunication, suggestologie, suggestopédie, rythmes biologiques, littérature française et domaine artistique. Auteur de très nombreux articles et d'une vingtaine de livres dont le dernier, «Des héros et leurs épopées», date de décembre 2015.

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