Roman sylvestre d’Andrée Christensen

sylvestre, Andrée Christensen, Une forêt dans la voix
Andrée Christensen, Une forêt dans la voix, roman, Ottawa, Éditions David, collection Voix narratives, 2025, 336 pages, 28,95 $.
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Publié 15/11/2025 par Paul-François Sylvestre

Mon nom me prédestinait à être interpellé par Une forêt dans la voix, nouveau roman d’Andrée Christensen, puisque l’adjectif sylvestre signifie relatif aux forêts. J’ai été ébranlé, comme les rameaux des arbres secoués par un puissant vent, pour ne pas dire une bourrasque mythologique.

La romancière est persuadée que les arbres possèdent une parole et une musique qui leur sont propres. Le chêne aurait la résonnance des grandes orgues; des pleurs mélancoliques se dégagent des saules; des cris effrayés s’échappent des trembles; les peupliers émettent des rires légers.

Aria

Le personnage principal est Ariane, enfant surnommée Aria par sa mère (comme dans tracas ou embarras). Pour son père, Aria renvoie à une pièce de musique (aria des Variations Goldberg de Bach ou Ariettes oubliées de Debussy).

Ariane grandit au milieu de jardins, marais et bois, entourée d’oiseaux, d’insectes et de plantes. Tout l’incite à l’exploration. Et si ces lieux n’étaient pas ceux de la géographie, «mais ceux de l’âme et du cœur», de la découverte de soi…?

La jeune fille mène une vie en apparence normale jusqu’à ce qu’un secret sur ses origines lui soit révélé. «Dans le flou de mes origines, je me suis mise à rêver mes racines.» L’ouvrage devient à la fois un roman d’apprentissage et une fable mythologique.

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Nature secrète

Une forêt dans la voix nous invite à réfléchir sur les cycles de la vie et de la mort, sur le visible et l’invisible, sur l’éphémère et le permanent. «La nature entière nous enseigne le respect de ce qui se passe dans le secret, et dans le temps parfois long et douloureux qu’il faut pour advenir à soi.»

Certains passages du roman pourraient vous laisser croire qu’Andrée Christensen fait preuve d’une imagination purement débridée. Son écriture est plutôt inspirée de différentes formes d’expression artistique, que l’œuvre soit musicale ou chorégraphique.

Chant grégorien

Le chant grégorien, la musique baroque, l’art vocal du romantisme allemand, autant d’expériences artistiques qui ont transporté, nourri et transcendé Andrée Christensen. Coté danse, certaines chorégraphies ont enrichi le roman en inspirant des pistes narratives, esthétiques et émotionnelles.

Personnellement, j’ai été remué par le chant grégorien durant mon cours classique. Sa simplicité et sa rigueur me faisaient alors vivre des émois quasi mystiques. Pourquoi m’en suis-je par la suite désintéressé ?

Parce qu’il s’agit, comme le souligne la romancière, «d’une forme vocale où la voix singulière acceptait de disparaître pour devenir Une, invitant à se faire oublier soi-même». J’étais devenu trop individualiste.

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Passion sur l’herbe

Revenons à Ariane, au moment où une caresse devient une étreinte charnelle. Dans un moment de passion, elle et son partenaire font l’amour «sur l’herbe tendre, enivrés du souffle odorant des lys de la Madone, saoulés jusqu’à plus soif par la miellée suintante des chèvrefeuilles et des lavandes».

Avec Une forêt dans la voix, Andrée Christensen nous plonge dans le royaume des contes et des légendes. Elle nous invite à ne pas chercher une explication logique à un phénomène qui n’est pas de l’ordre du rationnel.

Auteurs

  • Paul-François Sylvestre

    Chroniqueur livres, histoire, arts, culture, voyages, actualité. Auteur d'une trentaine de romans et d’essais souvent en lien avec l’histoire de l’Ontario français. Son site jaipourmonlire.ca offre régulièrement des comptes rendus de livres de langue française.

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