Pensées, émotions et gestes disséqués dans un polar suédois

Camilla Grebe, L’horizon d’une nuit
Camilla Grebe, L’horizon d’une nuit, roman traduit du suédois par Anna Postel, Paris, Éditions Calmann-Lévy, collection Noir, 2022, 448 pages, 34, 95 $.
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Publié 19/06/2022 par Paul-François Sylvestre

«Puis, tout à coup advient l’incompréhensible, l’indicible, ce que nous n’osons pas imaginer, ce que nous ne parvenons pas à nous représenter.» Voilà une phrase qui résume l’excellent polar intitulé L’horizon d’une nuit, de la Suédoise Camilla Grebe.

Il s’agit d’un roman à la fois policier et psychologique.

La romancière démontre comment nous savons uniquement ce que l’autre choisit de nous montrer. Même nos proches peuvent nous cacher leur véritable personnalité. Parfois, les personnes les plus proches sont celles qui portent les secrets les plus lourds.

Disparition à Stockholm

Maria, mère célibataire d’un garçon atteint de trisomie 21, est mariée depuis peu à Samir, un médecin marocain arrivé récemment en Suède avec sa fille Yasmin. Ils vivent tous les quatre dans sa grande maison de Stockholm jusqu’à ce que Yasmin disparaisse.

Comme le corps de l’adolescente reste introuvable, la piste du suicide est écartée et tous les soupçons se portent bientôt sur Samir. Parce que de souche arabe, il est soupçonné d’un crime d’honneur et devient l’homme le plus détesté de la Suède.

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Un policier tenace

L’action de ce polar est racontée par plusieurs voix. Maria, mère et nouvelle épouse. Son fils Vincent, porteur de trisomie 21. Yasmin qui laisse ce message: «Pardon, je n’ai plus la force de continuer. Je vous aime. Y.»

Et Gunnar, un policier qui ne baisse pas les bras.

Cela donne lieu à quelques répétitions, mais le rythme trépidant et les rebondissements en passant d’une voix narrative à l’autre nous tiennent toujours en haleine.

Polar, manigances et libido

Maria vit dans un abîme où l’incertitude et l’effroi deviennent ces «compagnons d’infortune». Vincent peut percevoir avec justesse les sentiments et prendre la température d’une situation, même s’il n’a que les capacités intellectuelles d’un enfant de six ans.

Yasmin est synonyme de problèmes, de drames, de manigances, de manipulation. Elle aurait préféré ne pas naître car elle bousille la vie de tout le monde.

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Et le policier qui mène l’enquête enchaîne les rencontres, femme après femme, corps après corps. «J’ai fait de la passion ma religion et de l’actuel sexuel un sacrement.»

Erreurs et mensonges

Les informations sont distillées avec parcimonie. Les pensées, les émotions et les gestes sont disséqués, analysés et triturés. Camilla Grebe décrit avec brio comment des erreurs de jugements, des mensonges et des bévues peuvent être impossibles à juger pénalement.

Le cauchemar ne s’arrête jamais. Marie et Yasmin sont prisonnières, victimes d’une suite d’événements qu’elles ne comprennent pas et sur lesquels elles n’ont aucune prise.

Et je ne vous parle pas du petit ami de Yasmin, dont la folie est presque palpable dans ses yeux, tellement son regard révèle haine et mépris.

La vérité finit par nous rattraper

Dans ce polar, qui risque d’être un de mes coups de cœur cette année, il est clair que nous ne pouvons pas fuir la vérité, qu’elle finit toujours par nous rattraper, et ce malgré tous les faux-semblants et mensonges qui tentent de la masquer.

Auteur

  • Paul-François Sylvestre

    Chroniqueur livres, histoire, arts, culture, voyages, actualité. Auteur d'une trentaine de romans et d’essais souvent en lien avec l’histoire de l’Ontario français. Son site jaipourmonlire.ca offre régulièrement des comptes rendus de livres de langue française.

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