Nouveau juge en chef de l’Ontario: vive la diversité!

Un pas en avant, deux pas en arrière...

Michael Tulloch, Cour d'appel de l'Ontario, juge
L'édifice historique du 130 rue Queen Ouest, à Toronto, est le siège de la Cour d'appel de l'Ontario. Le juge en chef de la province est aussi le président de la Cour d’appel. Photo: archives l-express.ca
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Publié 22/12/2022 par Gérard Lévesque

Le premier ministre Justin Trudeau a annoncé le 19 décembre la nomination de Michael Tulloch, juge de la Cour d’appel de l’Ontario, au poste de juge en chef de l’Ontario et président de la Cour d’appel de l’Ontario.

Le juge Tulloch remplace George Strathy, qui a pris sa retraite du poste de juge en chef de l’Ontario, le 31 août dernier.

Au Canada, les juges en chef et les juges en chef adjoints sont chargés du leadership et de l’administration de leurs tribunaux. Ils sont aussi membres du Conseil canadien de la magistrature, qui a pour objectif d’améliorer la qualité des services judiciaires des cours supérieures du Canada.

Les juges en chef et les juges en chef adjoints sont nommés par la gouverneure générale, sur avis du Conseil des ministres et sur recommandation du premier ministre.

Michael Tulloch, Cour d'appel de l'Ontario, juge
Michael Tulloch, nouveau juge en chef de l’Ontario.

Le premier Noir à siéger à une cour d’appel provinciale au Canada

Michael H. Tulloch a été nommé à la Cour supérieure de justice de l’Ontario en 2003, et a été nommé à la Cour d’appel de l’Ontario en 2012.

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Sa nomination à la Cour d’appel de l’Ontario a fait de lui le premier Noir à siéger à une cour d’appel provinciale au Canada. Avant sa nomination à la magistrature, il a été procureur adjoint de la Couronne, à Peel et à Toronto, de 1991 à 1995, pour ensuite exercer en cabinet privé, se spécialisant en droit pénal.

En 2016, le gouvernement de l’Ontario a confié au juge Tulloch la réalisation d’importants examens, lesquels ont mené à la publication de deux rapports détaillés, soit le Rapport de l’examen indépendant des organismes de surveillance de la police (2017) et le Rapport de l’examen indépendant des contrôles de routine (2018).

Lorsqu’il était procureur de la Couronne, Michael Tulloch a fait partie de l’équipe chargée de la réponse du gouvernement dans le cadre de la Commission sur le racisme systémique. Il a en outre présidé un comité de révision de la politique d’admission de la Faculté de droit Osgoode Hall, en 2006.

Le juge Tulloch a été membre du Comité de formation de la Cour supérieure de justice de l’Ontario, de l’Institut national de la magistrature et du Comité consultatif de la magistrature sur l’engagement international du Commissariat à la magistrature fédérale.

Il a été membre émérite de la Munk School of Global Affairs and Public Policy de l’Université de Toronto et chercheur universitaire émérite au Centre of Law and Policy de l’Université Ryerson (maintenant l’Université métropolitaine de Toronto). Il était un membre fondateur et un mécène de la Fondation de la bourse d’études Seconde chance et a présidé le comité consultatif de la Black Business and Professional Association.

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Il a, à maintes reprises, donné des conférences en anglais dans divers établissements postsecondaires ainsi que dans des forums professionnels et communautaires.

Né en Jamaïque, Michael Tulloch est titulaire d’un baccalauréat ès arts de l’Université York ainsi que d’un baccalauréat en droit de la Faculté de droit Osgoode Hall.

Il a reçu des doctorats honorifiques en droit de l’Université métropolitaine de Toronto, de l’Université de Guelph et du Barreau de l’Ontario, ainsi qu’un doctorat honorifique en théologie du Collège universitaire et séminaire Tyndale. Il a été admis au Barreau de l’Ontario en 1991.

21 juges en chef

Voici la liste des 21 juges en chef de l’Ontario depuis le début de la fédération canadienne et la durée de leur mandat au plus haut poste de la magistrature ontarienne

Ils étaient tous blancs, tous hommes, tous unilingues anglais.

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1- William Buell Richards 1868–1875

2- Robert Alexander Harrison 1875–1878

3- Thomas Moss 1878–1881

4- John Godfrey Spragge 1881–1884

5- John Hawkins Hagarty 1884–1897

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6- George William Burton 1897–1900

7- John Douglas Armour 1900–1902

8- Charles Moss 1902–1912

9- William Ralph Meredith 1912–1923

10- William Mulock, 1923 – 1936

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11- Newton Wesley Rowell, 1936 – 1938

12- Robert Spelman Robertson, 1938 – 1952

13- John Wellington Pickup, 1952 – 1957

14- Dana Harris Porter 1958 – 1967

15- George Alexander Gale 1967 – 1976

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16- Willard Zebedee Estey, 1976 – 1977

17- William Goldwin Howland1977 – 1990

18- Charles Leonard Dubin, 1990 – 1996

19- Roy McMurtry1996 – 2007

20- Warren Keith Winkler, 2007 – 2013

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21- George Strathy, 2014 – 2022

Un progrès en faveur de la diversité

La nomination de Michael Tulloch est de nature à contribuer à une augmentation de la confiance de la population noire face au système judiciaire et à encourager des jeunes noirs à se diriger vers l’une ou l’autres des professions du domaine de la justice.

Justin Trudeau peut maintenant se vanter d’être le premier, au Canada, à avoir nommé une personne noire à un poste provincial de juge en chef.

Un recul pour les langues officielles et l’égalité des sexes

La nomination d’une personne incapable de communiquer en français avec les juges, les juristes, les justiciables et les médias de langue française indique que, pour le gouvernement fédéral, une des deux langues officielles de nos tribunaux est moins officielle que l’autre.

Depuis le début de la fédération canadienne, le poste de juge en chef de l’Ontario a toujours été occupé par un homme. La nomination d’un homme plutôt que d’une femme illustre le fait que tous les gouvernements fédéraux n’ont pas découvert qu’il y a des femmes qui sont aussi compétentes que des hommes pour occuper le plus haut poste judiciaire de notre province.

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Michael Tulloch, Cour d'appel de l'Ontario, juge
Fabien Hébert.

Au nom de la communauté francophone de l’Ontario, Fabien Hébert, président de l’Assemblée de la francophonie de l’Ontario (AFO) avait exhorté le premier ministre Trudeau, le ministre de la Justice David Lametti et la ministre des Langues officielles Ginette Petitpas-Taylor à consacrer le bilinguisme de nos tribunaux en nommant une personne maîtrisant les deux langues officielles.

Pour ma part, j’avais invité le premier ministre à nommer une juriste bilingue ce qui, pour la première fois, nous accorderait un juge en chef maîtrisant les deux langues officielles de nos tribunaux. Et, pour une première fois, une femme occuperait le plus haut poste judiciaire de notre province.

L’occasion de confirmer l’égalité de nos deux langues officielles et l’égalité des sexes ne reviendra pas avant longtemps. Comme tous les autres juges, une fois nommé, un juge en chef peut rester en poste jusqu’à l’âge de 75 ans.

C’est maintenant au tour du Manitoba

La prochaine nomination d’un juge en chef que le premier ministre Trudeau est appelé à faire est pour le Manitoba.

En effet, le juge en chef de cette province, Richard Chartier, a pris sa retraite le 30 octobre dernier après neuf ans à la tête de la Cour d’appel du Manitoba. Il a été nommé à cette fonction le 7 mars 2013 par le premier ministre Stephen Harper.

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Quelques décennies plus tôt, Alfred Monnin a été juge en chef du Manitoba du 16 avril 1983 au 31 janvier 1990. Il a été nommé par le premier ministre Pierre Elliott Trudeau. La compétence du prochain juge en chef du Manitoba inclura-t-elle la maîtrise de la langue française?

Une tendance déplorable

Gouverneure générale du Canada, lieutenante-gouverneure du Nouveau-Brunswick, juge en chef de l’Ontario… Monsieur Trudeau souffre d’un réflexe déplorable, en voie de devenir une habitude: nommer des personnes inaptes en français à des postes où il devrait nommer des personnes compétentes, entre autres, dans les deux langues officielles.

Il n’y a jamais eu un Canadien au poste de Secrétaire général des Nations-Unies. À mon avis, monsieur Trudeau ferait un excellent candidat.

L’Ontario nomme trois juges de paix francophones

Coincidence, le même jour où le premier ministre Trudeau annonçait la nomination d’un juge en chef unilingue, le procureur général de l’Ontario, Doug Downey, annonçait la nomination de nouveaux juges de paix à la Cour de justice de l’Ontario.

Trois de ces personnes sont bien connues de mes lecteurs: Azadeh Nourbakhsh Lavictoire, assignée à Toronto; Richard Ronald Therrien, assigné à Barrie; et Estelle Thérèse Bérubé, assignée à Cochrane.

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Je regrette que le communiqué de presse du ministre n’identifie pas parmi les 28 personnes nommées quels sont les nouveaux juges de paix aptes à siéger dans les deux langues officielles de nos tribunaux, car je suis convaincu qu’il y a d’autres bilingues.

Depuis 2021, Azadeh Nourbakhsh Lavictoire était avocate bilingue pour les affaires criminelles à Aide juridique Ontario où elle représentait des clients dans des affaires juridiques complexes, y compris des audiences sur la mise en liberté sous caution et des audiences de prononcé de la peine.

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Azadeh Nourbakhsh Lavictoire.

Auparavant, en tant que directrice du cabinet Nourbakhsh, elle a représenté des clients dans divers secteurs, dont l’immobilier, les successions et les organismes sans but lucratif, après son admission au Barreau de l’Ontario, en 2009.

Azadeh Nourbakhsh Lavictoire a également été présidente du Comité des langues officielles de l’Association du Barreau de l’Ontario (ABO). En 2017, elle a assumé les fonctions de présidente et cofondatrice de Fuite Spinale LCS Canada, une œuvre de bienfaisance nationale œuvrant dans le domaine de la santé.

Dans ses fonctions au sein de cet organisme, elle a milité pour l’avancement de la recherche médicale et a travaillé en étroite collaboration avec des professionnels de la santé, des œuvres de bienfaisance et des personnes faisant face à des défis dans le domaine de la santé.

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Richard Therrien est devenu directeur à Summerhill Strategies, en 2010. 

Richard Therrien
Richard Therrien.

Il a également travaillé comme directeur de projets spéciaux au ministère des Soins de longue durée, gérant principal des cadeaux à la Toronto General and Western Hospital Foundation et directeur principal de campagne pour One-to-One Fundraising Consultants.

Il a fait du bénévolat pour Healthy Minds Canada, pour l’Université Laurentienne en qualité d’ancien diplômé, comme délégué du Canada au Sommet de la Francophonie et comme membre du conseil d’administration du Centre francophone du Grand Toronto.

Estelle Bérubé a été directrice générale de La Maison Arc-en-Ciel depuis 2019. À ce poste, elle s’occupait de jeunes à risque aux prises avec des troubles de santé mentale et de dépendances.

Estelle Bérubé
Estelle Bérubé.

Pendant cette période, elle a créé des programmes de traitement, qui comprenaient des services de counseling, un programme de thérapie par le cheval et des pratiques de guérison pour les Autochtones.

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Dans le cadre de ces fonctions, elle a siégé au comité de planification de la santé mentale de Cochrane pour faciliter la coordination des services de santé entre fournisseurs de services locaux. Pendant plus de 25 ans, elle était propriétaire des écuries Starview Stables, à Kapuskasing.

Auteur

  • Gérard Lévesque

    Avocat et notaire depuis 1988, ex-directeur général de l'Association des juristes d'expression française de l'Ontario. Souvent impliqué dans des causes portant sur les droits linguistiques. Correspondant de l-express.ca, votre destination pour profiter au maximum de Toronto.

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