Nicosie, une ville d’Europe coupée en deux

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Publié 23/08/2011 par Gabriel Racle

Il y a 50 ans, commençait la construction du mur de Berlin. Avec la disparition, 28 ans plus tard, en novembre 1989, du «mur de la honte», on pouvait penser que s’en était fini des villes européennes coupées en deux. Il n’en est rien.

Chypre

Si l’on se rend à Chypre, on s’aperçoit, surtout à Nicosie, qu’une telle séparation existe toujours. Elle ne revêt pas la forme d’un mur de béton, mais elle est bien réelle, et elle porte le nom bucolique de ligne verte, parce qu’un général turc l’aurait tracée sur une carte à l’encre verte.

De par sa situation, Chypre a une histoire complexe, celle d’une île du bassin oriental de la Méditerranée, au sud de la Turquie, en face de la Syrie. Historiquement, elle a fait l’objet des convoitises de nombreux pays, du fait de cette situation exceptionnelle.

Célèbre dans l’Antiquité par le culte d’Aphrodite, la déesse de l’amour, qui serait née à Chlore, est occupée par les Phéniciens, par les Égyptiens, par les Perses, avant de devenir grecque dans l’empire d’Alexandre le Grand.

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Conquêtes et reconquêtes

Les Romains s’emparent de l’île en 58 avant notre ère. Mais l’Empire romain se divise en 293 et Chypre revient à l’Empire byzantin. Les Arabes occupent l’île en 648, laissant aux Byzantins la direction religieuse et administrative. Il en ira ainsi pendant 300 ans, jusqu’à la reprise de l’île par l’empereur de Byzance.

Une série de péripéties entourant les croisades voient l’île passer de Byzance à Richard cœur de Lion, roi d’Angleterre, aux Templiers, puis à Guy de Lusignan, une petite ville de l’ouest de la France, qui de roi de Jérusalem devient roi de Chypre (1192). De cette époque date la superbe cathédrale Sainte Sophie, toujours debout, mais devenue mosquée, et d’autres édifices.

Après une période troublée de rivalités et d’invasions, la République de Venise accapare l’île en 1489.

Elle entoure Nicosie de remparts, toujours en place, en détruisant nombre de constructions des Lusignan pour ce faire.

Époque moderne

En 1570, les Turcs s’emparent de Chypre et commencent à s’y installer. L’île demeure turque pendant trois siècles.

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En 1878, lors du règlement du conflit russo-turc, le Royaume-Uni prend en charge l’administration de l’île, qui reste propriété turque, pour en assurer la défense. En 1914, la Turquie entre en guerre au côté de l’Allemagne et les Britanniques annexent alors Chypre.

Deux mouvements agitent ensuite Chypre: l’union avec la Grèce, la mère patrie, demandée par les Chypriotes grecs, soutenus par la Grèce; la partition de l’île demandée par les Chypriotes turcs, appuyés par la Turquie.

À partir de 1931, les Chypriotes grecs se révoltent contre les Britanniques, un mouvement qui prend de l’importance après la Deuxième Guerre mondiale. En 1960, Chypre devient un État indépendant. Un traité confère toutefois un droit d’intervention à la Grèce, à la Turquie et à l’Angleterre qui conserve deux bases militaires.

La République de Chypre est proclamée. La constitution adoptée règle le partage des pouvoirs entre Chypriotes grecs et Chypriotes turcs, et confère la présidence à un Grec; l’archevêque de Nicosie, partisan de l’union à la Grèce, devient le premier président de Chypre, comme Makarios III, ce qui ne plaît pas aux Turcs.

La partition

En 1967, la démocratie grecque est renversée par le coup d’État des colonels. En 1974, les colonels interviennent et renversent la démocratie chypriote. En vertu de l’accord d’intervention, la Turquie renverse la dictature chypriote. La démocratie est rétablie, mais l’armée turque impose la partition de l’île pour protéger la minorité turque. Un tiers du territoire au nord de l’île forme la République turque du nord de Chypre. Le nord et le sud, ainsi que la capitale Nicosie, sont séparés par la ligne verte ou ligne Attila, contrôlée par les Nations Unies.

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Le 1er mai 2004, le sud de l’île, la République de Chypre, entre dans l’Union européenne et le 1er janvier 2008, l’euro en devient la monnaie nationale.

Nicosie

Nicosie grecque est une ville d’apparence prospère, parsemée de nombreuses églises orthodoxes. L’Église orthodoxe, dont la résidence du patriarche affiche une insolente richesse dans un quartier pauvre, exerce une influence certaine.

Les monuments les plus intéressants sont du côté turc de Nicosie, facilement accessible. Depuis 2008, la grande rue commerçante, la rue Ledra, est ouverte.

Il suffit de présenter un passeport aux autorités turques qui délivrent un visa sur un papier séparé. Le côté turc offre de nombreux magasins, restaurants, boutiques en tout genre et affiche une belle prospérité.

Comme l’aéroport de Nicosie se trouve du côté turc, on accède à la partie grecque par l’aéroport de Larnaca, une vile au sud de l’île.

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Tout est calme désormais et la ligne verte est plutôt perçue comme une frontière entre deux États. Mais seule la Turquie reconnaît la République turque et y a une ambassade.

Auteur

  • Gabriel Racle

    Trente années de collaboration avec L'Express. Spécialisé en communication, psychocommunication, suggestologie, suggestopédie, rythmes biologiques, littérature française et domaine artistique. Auteur de très nombreux articles et d'une vingtaine de livres dont le dernier, «Des héros et leurs épopées», date de décembre 2015.

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