Nancy Vickers : imagination débridée dans un roman déjanté

Nancy Vickers, Capharnaüm
Nancy Vickers, Capharnaüm, roman avec la collaboration de Gloria Escomel, Ottawa, Éditions David, coll. Indociles, 2022, 234 pages, 23,95 $. Photo: Iman Wehbe, Magenta Studio
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Publié 02/03/2022 par Paul-François Sylvestre

Le trouble d’accumulation compulsive (hoarder) s’explique par le fait que les objets ou animaux ne déçoivent jamais, ne font pas de mal… Contrairement aux humains qui n’apportent que «déception et isolement». Voilà ce que nous apprend en surface Capharnaüm, quatorzième ouvrage de Nancy Vickers. Elle explore avec brio la dynamique et la psychologie de ce trouble appelé aussi syndrome de Diogène.

Narratrice du roman, Elsa accumule sans cesse des objets inutiles. Une autre personne souffre du syndrome de Noé, puisqu’elle adopte toujours plus d’animaux.

Et une autre encore collectionne des choses qui lui montrent la beauté de la mort (nécrophilie).

Sans oublier cette musicienne qui entretient une relation amoureuse avec son violoncelle.

Personnages féminins

À l’exception du mari d’Elsa, qui collectionnait des livres et qui meurt très tôt dans l’histoire, tous les personnages sont des femmes.

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Capharnaüm est une histoire «fameusement drôle, émouvante, voire pathétique», selon Gloria Escomel, la collaboratrice de Nancy Vickers pour ce livre. La couverture s’explique par ce commentaire d’Elsa: «Je suis la maman-araignée dans la toile amoureuse de ses enfants-objets.»

Lors d’une entrevue menée par Bible urbaine, Nancy Vickers avoue qu’elle a toujours été fascinée par les accumulateurs compulsifs. «J’en connaissais plusieurs, dont une femme dans mon quartier où la Ville est venue vider sa maison trois fois.»

«Des histoires d’horreur! Je voulais explorer le côté psychologique des hoarders et des personnes qui aiment les objets et ne veulent pas s’en défaire.»

Des détails de la vie de Nancy Vickers

Sans être un récit personnel, Capharnaüm renferme plusieurs détails autobiographiques. Tout comme l’autrice, Elsa est une arachnophile, soit une personne qui aime les araignées. Elsa achète tous les objets qu’elle peut trouver en forme de corbeau.

Or, j’étais avec Nancy lorsqu’elle a acheté un corbeau en métal, qui figure maintenant à l’entrée de sa maison à Ottawa. De plus, elle décide d’inclure Marilyn Monroe dans son roman après avoir pris connaissance d’un ouvrage que je lui ai offert sur les poèmes, écrits intimes et lettres de la sex-symbol.

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Elsa achète une voiture Mini Cooper Countryman, exactement comme celle de Nancy. L’autrice donne le nom de Mini-Chérie à ce véhicule hermaphrodite. Elle écrit que la pédale de l’accélérateur est son pénis, tandis que la pédale pour freiner est son vagin.

Relations avec les objets

Elsa ne peut pas entretenir une relation avec les humains… Seulement avec les objets qui, selon elle, ont des yeux et une âme. «Ainsi, j’évite le pire, la déception de ne pas être acceptée, le rejet ou l’incapacité de l’autre à m’aimer.»

Dès qu’un nouvel objet entre chez elle, il capte toute son attention. Cela dure quelque temps. Puis Elsa a envie d’autre chose «pour combler le vide qui se creuse infernalement en moi».

N’empêche que les objets la séduisent, leur charme s’infiltrant dans son sang. «J’aime les objets d’un amour presque sensuel. Je projette une âme dans tous ces objets.»

Encore une fois, Nancy Vickers signe un roman déjanté et fait preuve d’une imagination débridée, sa marque de commerce.

Auteur

  • Paul-François Sylvestre

    Chroniqueur livres, histoire, arts, culture, voyages, actualité. Auteur d'une trentaine de romans et d’essais souvent en lien avec l’histoire de l’Ontario français. Son site jaipourmonlire.ca offre régulièrement des comptes rendus de livres de langue française.

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