En rendant sa décision dans Re Emergency Door Service Inc., 2016 ONSC 5284, le juge Frank Newbould, de la Cour supérieure de justice de l’Ontario, a utilisé la version française d’une disposition de la Loi sur la faillite et l’insolvabilité, LRC 1985, c B-3, pour interpréter un de ses articles.
Ce faisant, il a expliqué clairement comment la règle de l’égale autorité s’applique aux lois disponibles dans les deux langues officielles. Je vous invite à prendre connaissance des paragraphes 25, 26 et 38 de son jugement où on peut notamment lire: «Reliance on a single version is totally unacceptable for any official interpretation.»
Les lecteurs assidus de ma chronique se souviennent peut-être du texte Lire une seule version de la loi est à vos risques et périls. À moins d’un mois de la conférence sur 150 ans de bilinguisme législatif et judiciaire, le 5 mars prochain à Ottawa, notre capitale non encore officiellement bilingue, j’estime qu’il est utile de contribuer à mettre la table pour les participants appelés à débattre le passé, le présent et l’avenir du bilinguisme dans nos législatures et dans nos tribunaux.
Ayant signalé un exemple en provenance d’une province qui, à partir du mandat de Roy McMurtry au ministère du Procureur général, a accompli des progrès spectaculaires en matière de bilinguisme législatif et judiciaire, je me dois d’écrire quelques lignes sur une province qui, sous le régime conservateur, considérait le français comme s’il s’agissait d’une langue étrangère.
À cet égard, je vous invite à prendre connaissance de l’interprétation originale du droit de chacun d’employer le français et l’anglais devant les tribunaux albertains qu’un procureur a plaidé lors de l’audience du 18 décembre 2008 dans la cause de l’enfant R. O.-A., en Cour provinciale de l’Alberta.
Lisez entre autres les pages 10, 11 et 12 de la transcription. Malheureusement, cette plaidoirie, à l’opposé de la jurisprudence bien établie de la Cour suprême du Canada en matière d’interprétation des droits linguistiques, inspire encore plusieurs fonctionnaires du ministère de la Justice de l’Alberta.