Le théâtre absurde et politique de Mrozek reste pertinent

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Publié 22/05/2012 par Nourhane Bouznif

Fer de lance de la création théâtrale torontoise francophone, le Théâtre La Tangente offre au public des textes et des mises en scène originales, fruit d’un travail de recherche et de préparation de longs mois. Mais la compagnie se propose également de faire découvrir des auteurs contemporains, à travers des lectures de pièces de théâtre, comme c’était le cas récemment à l’Alliance française de Toronto.

Le Théâtre La Tangente investissait le 9 mai la Galerie Pierre Léon de l’AFT pour des lectures de deux pièces de théâtre du dramaturge polonais Slawomir Mrozek. Des textes peu connus, mais tout à fait pertinents selon Louise Naubert, directrice artistique, et Claude Guilmain directeur général de La Tangente.

Né en 1930, Mrozek est devenu populaire en Pologne pour ses dessins satiriques et ses nouvelles humoristiques. Louise Naubert s’est intéressée à son œuvre après qu’un avocat polonais lui a parlé de l’auteur.

Ses pièces les plus connues sont probablement En pleine mer et Les Émigrés, d’après la directrice artistique. Elle a choisi deux oeuvres assez courtes, Un heureux événement et Jour d’été, qu’elle considère bien structurées et bien écrites.

François-Régis Klanfer, Anne-Sophie Quemener, Pierre Simpson et Manuel Verreydt, comédiens torontois, étaient rassemblés pour la lecture des textes.

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Annonce trompeuse

Le public a tout d’abord pu découvrir Un heureux événement. Les didascalies et indications scéniques, capitales pour Mrozek, étaient lues par Louise Naubert.

La pièce se déroule dans un appartement. Le nouveau locataire découvre que le logement n’a rien à voir avec l’annonce à laquelle il avait répondu. Pas de vue sur le Mont-Blanc, point de chambre ni même de lit et la salle de bain est inexistante.

Pire, le locataire va devoir partager le lit du couple des propriétaires et supporter le grand-père autoritaire qui vit avec eux.

Le but de la manœuvre, pour les propriétaires, est d’arriver à se débarrasser de l’aïeul et de retrouver leur intimité d’avoir enfin un enfant. Mais le bébé (un adulte habillé en nourrisson) se révèle tout aussi tyrannique que le grand-père.

La pièce se révèle drôle, mais aussi grinçante. Les indications lues par Louise Naubert permettent d’imaginer le décor et les mouvements et attitudes des protagonistes, ce qui rajoute à l’effet comique. Mrozek fait appel à l’absurde et à la dérision pour apporter sa vision critique du régime communiste de l’époque.

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Les comédiens étaient à l’aise dans leur rôle, mention spéciale à François-Régis Klanfer dans le rôle du vieillard.

Amour, suicide et métaphysique

La seconde pièce, Jour d’été, se déroule dans une station balnéaire. Deux hommes que tout oppose se rencontrent alors qu’ils s’apprêtent à se suicider.

Le premier a une vie faite d’échecs tandis que tout réussit au second. Ils s’envient l’un l’autre et se verraient bien échanger leurs places. Sur le point de mettre fin à leur jour, ils s’arrêtent net quand une très belle femme passe devant eux. Chacun va tenter de la séduire, à sa façon.

L’histoire prend des allures métaphysiques alors que les personnages masculins dissertent sur l’existence ou l’amour. Les dialogues tout en subtilité renversent la situation d’un instant à l’autre. Les deux pièces présentées mercredi soir donnent résolument envie de découvrir davantage l’œuvre de Mrozek.

«Ça parle de politique, il ne se gène pas», commente Louise Naubert. «Il dénonce la situation politique de l’époque».

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Ces lectures ont nécessité une quinzaine d’heures de répétition, bien moins que pour une pièce mise en scène. Le travail de La Tangente résidant dans la création théâtrale, Louise Naubert avoue que ces lectures sont «strictement pour le plaisir et pour faire connaître l’auteur au public de l’Alliance française». Depuis 2010, la compagnie se produit de temps à autre à l’AFT pour des lectures de pièces et de textes littéraires.

En pleine écriture

Deux créations théâtrales sont par ailleurs en préparation et seront présentées au public entre 2013 et 2014.

En cours d’élaboration, Métamorphoses, une pièce librement inspirée de La Métamorphose de Franz Kafka.

Claude Guilmain se consacre également à l’écriture de AmericanDream.ca, une pièce à propos des relations familiales.

L’auteur dramatique et directeur général endosse aussi le costume de scénariste et de réalisateur pour un documentaire sur l’histoire du Royal 22e régiment à l’occasion de son centenaire en 2014. Le film devrait être prêt à l’automne 2013 et disponible sur le site de l’Office National du Film (ONF).

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Il s’est déjà rendu en Afghanistan à la rencontre du régiment et en a tiré un film dont des extraits sont visibles sur le site de l’ONF. Claude Guilmain n’en est pas à son premier documentaire. Il avait auparavant réalisé Entre les lignes, sorti en 2008, en hommage aux combattants canadiens de la Première Guerre mondiale.

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