Le langage devient dessin

Une exposition d’estampes au Keep Six Contemporary Gallery

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Publié 21/07/2009 par Khadija Chatar

Sense, la toute dernière exposition d’estampes de la jeune et déjà prometteuse Isabelle Mignault, est en cours jusqu’au 28 juillet au Keep Six Contemporary Gallery situé au 938 de la rue Bathurst. Dans ces gravures imprimées, l’artiste allie l’innocence du dessin à celui du cheminement d’une pensée.

«Il ne faut pas trop en dire, juste assez pour que ce soit intéressant. Ainsi, l’écriture devient du dessin, comme lui devient des mots», dit Isabelle Mignault lors du vernissage de son exposition du jeudi 16 juillet.

Devant cette vingtaine d’estampes parfois sans nom, quelques visiteurs s’interrogent et se prennent à inventer le titre de ces tracés que l’artiste a voulu parfois enfantins.

Tout d’abord, une sirène semble tenter, par une multitude de battements de bras, de remonter à la surface d’une mer inconnue. Mais la surprise pointe du nez devant les petites annotations l’entourant. «Non, je ne suis pas une sirène. Je suis le vent de la mer.»

Devant la surprise que provoque cette sirène qui n’en est pas une, Isabelle Mignault répond avec un demi sourire: «Je sais que c’est assez abstrait. Les écritures traduisent à vrai dire une partie des pensées de mes caractères».

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Des personnages qui évoluent dans des décors souvent sobres où résident l’espoir d’un côté, la peur et la tentation de s’attacher d’un autre.

L’artiste qui a étudié au collège des beaux-arts de l’Ontario en est à sa 30e exposition. Les thèmes qu’elle affectionne abordent généralement la question de la recherche identitaire et affective. Née de parent québécois mais vivant depuis toujours à Toronto, elle avoue avoir toujours été à cheval entre les deux cultures. «Si il y a un e au mot Sense, titre de l’exposition, c’est pour valoriser la langue des deux bords», dit-elle.

Intangibles, les rapports affectifs sont ce qu’il y a de plus difficile à décrire pour chaque artiste. Isabelle Mignault, consciente de ce défi, témoigne ainsi une admiration à celles et à ceux qui parviennent à aller chercher leur inspiration et leur interprétation de ces états émotionnels là où la raison n’est pas.

«Ils vont chercher dans leurs tripes», décrit-elle. «Moi, j’ai tendance à être assez analytique donc c’est un effort que je fais pour bloquer ce penchant et aller chercher au fond de moi.»

Le grand dessin à l’entrée, le seul à posséder un titre Comme de raison, est certainement celui qui intrigue le plus en raison de tous les détails et paradoxes qu’il contient. Le cœur de l’héroïne est exhibée au regard sans pour autant qu’elle soit nue. L’élément sensible, ici le cœur, constitue le noyau des pensées du personnage.

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De plus, son corps clair est tenu par une ombre. Serait-ce un compagnon ou bien encore le reflet d’un passé auquel elle se raccroche avec acharnement? Ensuite, le regard profond de ce personnage saisit le spectateur qui se sent épié où qu’il aille.

Dans ces prunelles qui ne trouvent pas de satisfaction dans les limites du langage, l’artiste parvient à immortaliser une fraction d’émotion. «Le regard est ce qui me fascine le plus. C’est comme un moyen ésotérique et viscéral de rejoindre l’intérieur de la personne», confie l’artiste.

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