Hôtel Beyrouth : une histoire d’immigration canadienne

Hôtel Beyrouth, immigration
Hôtel Beyrouth raconte l’histoire de la famille Haddad, qui, après avoir fui la guerre au Liban, s’installe au Canada. Photo: Sahkosh Productions/TFO
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Publié 02/11/2024 par Camille Langlade

À travers le récit d’une famille libanaise fuyant la guerre à la fin des années 1980 pour aller s’installer à Ottawa, la série Hôtel Beyrouth, diffusée à TFO, explore les défis et les espoirs liés à l’immigration, à l’exil et à l’intégration au Canada. Une histoire plus que jamais d’actualité.

Inspirée de faits réels, la fiction Hôtel Beyrouth suit les premiers pas de la famille Haddad à Ottawa. Réalisée par les Franco-Ontariennes Ania Jamila et Josiane Blanc, la série met à l’honneur les deux enfants de la famille: Zeina, une adolescente vive et sensible en quête d’identité, et Fady, un jeune garçon curieux et plein d’énergie, qui n’en rate jamais une.

Alors que les Haddad s’efforcent de trouver leurs repères dans cette nouvelle vie canadienne, leur résidence devient rapidement un point de passage pour les immigrants libanais.

Entre Beyrouth et Ottawa, keftas et pâté chinois, musique traditionnelle libanaise et pop nord-américaine, Hôtel Beyrouth dresse le portrait d’une immigration riche en contrastes et en émotions.

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La coréalisatrice et coproductrice de la série Hôtel Beyrouth, Ania Jamila. Photo: Sahkosh Productions/TFO

La série se déroule à la fin des années 1980. Est-ce que les défis auxquels font face les nouveaux arrivants pour s’intégrer dans la société canadienne ont aujourd’hui changé?

Ania Jamila : Je ne pense pas que l’immigration change tant que ça, à part le côté bureaucratique de la chose […] parce que les lois ne sont pas les mêmes.

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Mais après, une histoire d’immigration, ça reste toujours, surtout après la guerre, une expérience déchirante, pour les enfants et pour les parents. On doit quand même trouver une maison, un chez soi. Il faut quand même trouver des écoles, se tailler une place.

Il y a quand même un choc culturel. On a des accents, on n’a plus la même nourriture, on essaie de se fondre, mais on n’est pas encore prêts à être fondus.

Malheureusement, j’ai plus une image d’histoire qui se répète constamment. La guerre qui se répète, même dans le même pays… les traumatismes. Mais le sujet, je tiens à le mentionner, ce n’est pas la guerre, c’est vraiment une histoire d’immigration.

C’est une histoire canadienne, de Néo-Canadiens qui arrivent au Canada et qui vont devoir faire leur place, s’adapter et souvent se poser la question: «Quand est-ce qu’on retourne, quand est-ce qu’on retourne?» Et au final, la plupart ne retournent pas.

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Fady (9 ans) et sa sœur Zeina (14 ans) vont devoir s’adapter à leur nouveau chez-soi. Photo: Sahkosh Productions/TFO

Il s’agit aussi d’une famille qui parle français et qui vient s’installer dans une province anglophone. À quels défis particuliers sont confrontés les immigrants francophones?

Ania Jamila : La langue d’origine reste la langue affective. Quand on exprime ses émotions, souvent c’est plus facile de le faire dans la langue maternelle. Donc, ça crée quand même déjà au départ une petite cassure.

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Quand on est à Ottawa ou en Ontario ou en milieu minoritaire, le flux d’informations qu’on reçoit est majoritairement en anglais. Donc, il faut vraiment comme séparer son cerveau en trois.

On a la langue d’origine qui est la langue affective, on a le français qui est la langue qu’on étudie à l’école, et ensuite on a l’anglais qui est tout le reste : le divertissement, les infos, les médias sociaux, etc.

Le français est comme squeezé entre les deux, et c’est une langue qui doit survivre en fait, c’est comme une survivante, qui a évidemment des accents.

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«Je voulais vraiment qu’on les voie comme des membres de notre famille, qui nous ressemblent avec leur loufoquerie, avec leur blague, avec leur contradiction, avec leur faiblesse, avec leur humour», confie Ania Jamila. Photo: Sahkosh Productions/TFO

À qui s’adresse la série?

Ania Jamila : Quand on racontait l’histoire, ça résonnait avec plein de personnes, même au sein de notre équipe. Moi, j’ai vécu quelque chose de très similaire, le trauma en moins. Mais le déracinement, il est là.

L’école, la maison, les parents qui n’arrivent pas à trouver de travail, qui ne savent pas s’ils vont rester, la famille qui reste derrière, le fait qu’on s’entraide entre nous, qu’on a toujours accueilli des gens dormir à la maison. Cette espèce de porte tournante, ça, c’est quelque chose qui fait écho.

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C’est une histoire canadienne, une histoire néocanadienne; ce n’est pas une histoire libanaise. On met à l’écran une communauté libanaise qu’on met à l’honneur et puis qu’on célèbre avec toute sa splendeur et toute sa richesse et toute son unicité.

Mais en fin de compte, c’est cette histoire super précise et super particulière, tirée d’une histoire vraie, qui devient universelle au Canada.

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En explorant les thèmes de l’exil, de l’intégration et du désir d’appartenance, Hôtel Beyrouth met en lumière l’expérience de toutes les familles immigrantes. Photo: Sahkosh Productions/TFO

La série a une résonance toute particulière aujourd’hui, compte tenu des évènements au Liban, mais aussi dans d’autres pays comme Haïti, où des personnes fuient la guerre en quête de refuge, notamment au Canada.

Ania Jamila : En fait, je pense que ça nous donne la chair de poule tout le temps que ce ne soit pas une histoire du passé. […] C’est vraiment une histoire du présent, même si elle se passe dans les années 80. On a quand même traité le sujet de façon sérieuse, mais on a décidé d’en faire une comédie.

Je ne voulais pas qu’on voie ces personnes comme des victimes. Parce que ce sont des personnes qui sont hautes en couleur, qui ont beaucoup de personnalité, de rêves, de répartie, etc.

Je voulais aussi qu’on les voie comme des gens qui feraient partie de notre vie. Parce que souvent, quand on est dans le pathos, dans l’ultrapathos [on se dit que] «ça arrive aux autres, c’est pas à nous». Et je voulais vraiment qu’on les voie comme des membres de notre famille, qui nous ressemblent avec leur loufoquerie, avec leur blague, avec leur contradiction, avec leur faiblesse, avec leur humour.

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Je me disais, ils sont beaucoup plus humains comme ça. On va plus les voir comme des gens qui font partie de notre communauté que comme des étrangers.

Et puis aussi, aujourd’hui, ça prend une autre dimension pour la communauté libanaise qui a besoin de souffler, qui a besoin de rire un peu, alors qu’on a envie de pleurer.

À TFO

Hôtel Beyrouth est disponible depuis le 24 octobre sur la plateforme TFO et diffusée tous les jeudis à 20h sur la chaîne télé.

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