La guerre culturelle de Christian Rioux: un ton ironique, indigné et franc

Christian Rioux, Chroniques du monde qui vient
Christian Rioux, Chroniques du monde qui vient : la nouvelle guerre culturelle, essai, Montréal, Éditions du Boréal, coll. Papiers collés, 2021, 280 pages, 27,95 $.
Partagez
Tweetez
Envoyez

Publié 20/02/2022 par Paul-François Sylvestre

Dans Chroniques du monde qui vient: la nouvelle guerre culturelle, Christian Rioux a rassemblé plus de 75 articles publiés dans le journal Le Devoir entre 2006 et 2021. Ces chroniques retracent l’évolution d’abord anodine, puis fulgurante, de ce qui pouvait passer il y a quelques années encore pour de simples dérives passagères.

Il fait remarquer qu’on vit dans une société où «des mots ont été inventés non pas pour dire les choses, mais pour ne pas les dire». Il donne comme exemples: non-voyants, malentendants, personne de même sexe, bénéficiaires.

Il déplore qu’on ne perçoive plus la littérature comme «une façon d’appréhender le monde, de le comprendre et d’en explorer la complexité». Ou encore que Xavier Dolan soit adulé juste pour ses outrances et sa jeunesse.

Notre français, une langue sec0nde?

En 2014, lorsque la nouvelle ministre de la Culture, Hélène David, déclare que le français est une langue difficile, il écrit: «Pour peu, on aurait eu l’impression qu’elle parlait du français comme d’une langue seconde. Comme si elle l’observait de l’extérieur.»

Toujours au sujet de la langue, Christian Rioux souligne que la langue n’a jamais été aussi contrôlée par les ligues de vertu, «des lobbies antiracistes aux groupes de défenses de toutes les minorités».

Publicité

À ceux qui prônent une langue non sexiste parce qu’elle réduirait les inégalités, il souligne que le farsi et le turc n’ont ni masculin ni féminin. «Pas sûr que dans les pays qui les parlent la condition des femmes soit si enviable.»

Au sujet de l’école, chaque fois que la télévision parle de celle du futur ou de la réinventer, il n’est jamais question de contenu. «On ne voit jamais d’élèves qui étudient. Ils font du sport, s’excitent à plusieurs sur un ordinateur ou sautillent à gauche et à droite.»

Désillusion démocratique

En matière d’appel à la censure, écrit Rioux, il y a longtemps que la gauche a supplanté la droite. «Il faut se rendre à l’évidence: aux grenouilles de bénitier et autres punaises de sacristie ont succédé les bigots du droit-de-l’hommisme et les tartuffes de la rectitude politique.»

Le chroniqueur épluche les résultats de divers sondages et indique que la désillusion démocratique frappe d’abord les jeunes aux États-Unis.

«Ceux nés après 1980», écrit-il, «sont deux fois moins nombreux à trouver absolument essentiel de vivre en démocratie que ceux qui sont nés avant 1980. Mais tous les jeunes ne sont pas égaux dans cette galère. Ce sont en effet les jeunes instruits qui seraient les plus enclins à se contenter d’un gouvernement d’experts n’ayant plus de comptes à rendre au peuple.»

Publicité

Plusieurs chroniques réfèrent à des auteurs ou historiens surtout connus en France, où Rioux est correspondant du Devoir depuis 1995. Alain Finkielkraut, Michel Onfray, Élisabeth Badinter et Mona Ozouf…

Christian Rioux toujours franc

Les chroniques de Christian Rioux sont rédigées d’une plume tantôt ironique, tantôt indignée, mais toujours franche. Elles brossent un vaste tableau de notre époque qui semble constamment en transition et où «la vérité choque souvent les âmes sensibles.»

L’auteur conclut son ouvrage en affirmant que seule la vérité «pourra permettre de réconcilier une société où la guerre de tous contre tous semble devenue la règle».

Auteur

  • Paul-François Sylvestre

    Chroniqueur livres, histoire, arts, culture, voyages, actualité. Auteur d'une trentaine de romans et d’essais souvent en lien avec l’histoire de l’Ontario français. Son site jaipourmonlire.ca offre régulièrement des comptes rendus de livres de langue française.

Partagez
Tweetez
Envoyez
Publicité

Pour la meilleur expérience sur ce site, veuillez activer Javascript dans votre navigateur