Quand la crise climatique perd ses guillemets, les médias perdent la raison

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Plusieurs médias et partis politiques s'emballent facilement pour la futurologie climatique.
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Publié 02/10/2021 par François Bergeron

Il y a 4 ou 5 ans, les guides de styles et de meilleures pratiques journalistiques de la plupart des médias sérieux recommandaient encore d’éviter de balancer gratuitement des slogans ou de l’idéologie comme si c’était des faits ou des vérités.

Je suis sûrement vieux jeu, mais je considère toujours qu’à moins qu’un média ne tienne à afficher son biais (ce qui a le mérite d’être honnête), ses journalistes doivent mettre entre guillemets des expressions controversées comme «crise» du capitalisme ou de la démocratie, «masculinité toxique», «privilège blanc», «racisme systémique», «islamophobie»…

Idem pour le «dérèglement», la «crise» ou l’«urgence» climatique, ainsi que pour les intervenants «climatosceptiques», «négationnistes», «réchauffistes», «climatocrédules», «climatoalarmistes»…

crise climatique
Des auteurs qui continuent de mettre des guillemets à «crise climatique».

Collusion

Malheureusement, plusieurs médias – parfois de collusion – ont décidé de retirer leurs guillemets aux noms et aux adjectifs les plus hyperboliques se rapportant à la science du climat et aux politiques tentant de mitiger les changements climatiques.

Je vois passer de plus en plus de nouvelles et de reportages prétendant à l’objectivité, sur la «crise» ou l’«urgence» ou le «dérèglement» climatique sans guillemets… Et sans débat, comme si c’était désormais avéré, incontestable.

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On se dit peut-être que des milliers de manifestants dans nos rues ne peuvent pas se tromper… Plus probablement, on trouve profitable de ramer avec le courant.

C’est certainement le cas de nos partis politiques, qui répètent comme des perroquets que les changements climatiques représentent la plus grande menace pour l’humanité. Même le Parti conservateur du Canada, qui pensait pouvoir ignorer cette psychose sous Harper, a capitulé sous O’Toole: l’antithèse du leadership!

Élargir la notion de déni

Au début de 2020, dans La Presse de Montréal, un chroniqueur rapportait que «plusieurs militants aimeraient élargir la notion de déni climatique pour l’appliquer à ceux qui acceptent que la Terre se réchauffe et que c’est à cause des activités humaines, mais n’acceptent pas l’urgence climatique».

Sauf qu’une grande incertitude chez les scientifiques entoure encore à quel point «la Terre se réchauffe» (trop rapidement ou au contraire très proche des variations naturelles?). Et dans quelle mesure «c’est à cause des activités humaines» (beaucoup ou juste un peu?).

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Les réponses à ces deux questions sont cruciales pour la suite des choses: les politiques publiques à adopter.

Aucun doute, aucun débat

En décembre 2019, l’émission Les Décrypteurs, de Radio-Canada, qui se donne pour mission de traquer les fausses nouvelles, a discrédité une lettre de plusieurs centaines de scientifiques, dont une soixantaine de Canadiens, envoyée au Secrétaire général de l’ONU, intitulée Il n’y a pas d’urgence climatique.

L’animateur de Radio-Canada a interviewé une journaliste de Radio-Canada, un prof de géologie qui pense comme Radio-Canada, et quelques passants dans la rue… Mais aucun des signataires canadiens de la lettre, pourtant faciles à trouver. Pas fort.

Grandes gueules

Ce genre de lettres et de pétitions plus ou moins rigoureuses, niant ou affirmant un «consensus» de la science sur le climat, circulent depuis au moins 30 ans, recueillant parfois des milliers de signatures.

L’ONU, une bureaucratie opaque, incite régulièrement ses agences ou des publications spécialisées à sonner l’alarme.

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Or, la science n’est pas une affaire de sondages, de pétitions, de grandes gueules ou de célébrités.

Rappelons aux vedettes promptes à voler au secours de la planète la tirade de l’animateur Ricky Gervais devant le gratin de Hollywood au gala des Golden Globes 2020: «La plupart d’entre vous êtes allés à l’école moins longtemps que Greta Thunberg.»

Médias paresseux

L’«urgence climatique», le scénario du pire, tient davantage de la science-fiction que de la vraie science. Le réchauffement de 1 à 1,5 degré Celcius, observé depuis le milieu du 19e siècle, n’est pas sans précédent ni catastrophique dans l’histoire de l’humanité, encore moins dans l’histoire de la planète.

Malheureusement, le narratif plus rationnel, moins dramatique, ne fait pas l’affaire des médias sensationnalistes ni des partis politiques opportunistes.

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Les réformes économiques et structurelles, souvent utopiques ou carrément néfastes, réclamées par les prophètes de la nouvelle religion verte, sont jusqu’à maintenant balisées par la démocratie, c’est-à-dire le bon sens de la majorité de la population.

Mais avec la complicité de médias «engagés», qui vilipendent, désinvitent ou ignorent les experts dissidents – une pratique anti-scientifique et anti-journalistique – c’est la démocratie elle-même qui risque de passer à la trappe.

Auteur

  • François Bergeron

    Rédacteur en chef de l-express.ca. Plus de 40 ans d'expérience en journalisme et en édition de médias papier et web, en français et en anglais. Formation en sciences-politiques. Intéressé à toute l'actualité et aux grands enjeux modernes.

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