Financement du postsecondaire: les relations politiques sont essentielles

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Pour les gestionnaires de collèges et universités, il est essentiel d’entretenir de bonnes relations, à la fois formelles et informelles, avec les politiciens ainsi qu’avec les fonctionnaires. Photo: Cytonn Photography, Unsplash
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Publié 05/02/2022 par Éricka Muzzo

Le financement des gouvernements provinciaux et fédéral est incontournable pour les établissements d’enseignement postsecondaire, notamment en francophonie minoritaire.

Pour les gestionnaires de collèges et universités, cela implique d’entretenir de bonnes relations, à la fois formelles et informelles, avec les politiciens ainsi qu’avec les fonctionnaires. Le dernier atelier des États généraux sur le postsecondaire en contexte francophone minoritaire s’est penché sur les bonnes pratiques en la matière.

Le postsecondaire, un enjeu important

«Même aujourd’hui, les établissements postsecondaires en situation minoritaire sont fragiles. On a encore beaucoup de travail. Le message clé, c’est que des établissements forts sont tellement importants pour la survie des communautés. Donc lorsqu’on parle de relations, c’est tellement important!»

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Marc Serré

C’est ce qu’a défendu Marc Serré, député de Nickel Belt et Secrétaire parlementaire de la ministre des Langues officielles, lors du sixième et dernier atelier des États généraux organisés par l’Association des collèges et universités de la francophonie canadienne (ACUFC).

Marc Serré note aussi que les politiciens «ont une moyenne de carrière de six ans», tandis que les fonctionnaires occupent parfois leur poste durant une trentaine d’années.

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Fonctionnaires + politiciens

Une réalité qu’observe également Daniel Giroux, président du Collège Boréal. «On travaille avec certains fonctionnaires qui sont là depuis 30, 35 ans, ils sont toujours en place. Si un fonctionnaire appuie notre demande et qu’un politicien appuie notre demande, c’est toujours plus facile.»

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Daniel Giroux

Il estime en outre que sans l’appui des anciens députés Diane Marleau et Raymond Bonin, «il n’y a aucune façon qu’on aurait été chercher le financement pour la création du Collège Boréal».

L’ACUFC, qui regroupe les 22 collèges et universités de la francophonie canadienne, a fait paraître en 2020 son plan stratégique 2020-2025, dont le premier axe est la «représentation stratégique».

«C’est-à-dire promouvoir et défendre les intérêts collectifs des membres auprès des instances gouvernementales», rappelle la présidente-directrice générale de l’organisme, Lynn Brouillette.

Discussions franches

«Nous avons donc établi avec le gouvernement du Canada une relation très étroite», en particulier avec Patrimoine canadien, ajoute-t-elle.

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Lynn Brouillette

«C’est une collaboration qui est ouverte et transparente. Les discussions sont franches, de fond sur les enjeux du réseau. Il n’y a pas de gêne ou de censure. On se dit les vraies choses pour aller au fond des enjeux, pour ultimement trouver des solutions durables et systémiques.»

Pour la cheffe de l’ACUFC, cela permet de mieux desservir les établissements postsecondaires et ultimement les communautés francophones en milieu minoritaire.

«Ça nous permet de trouver des façons pour que les établissements postsecondaires, qui sont des piliers, puissent mieux contribuer à la vitalité des communautés. Et on sait que quand on parle de vitalité, c’est justement de compétence fédérale.»

Adapter les politiques et les programmes

France Fortier, directrice des opérations et de la coordination régionale pour Patrimoine canadien, note que «dans cet esprit, on a bâti une relation de longue date avec l’ACUFC et on reconnaît l’importance de la consultation des associations. Ça nous permet de mieux adapter les politiques et les programmes, et d’identifier les priorités d’investissement. Pour nous, c’est un gage de succès de nos programmes».

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France Fortier

Cette relation est à la fois formelle et informelle d’après la directrice des opérations. «La relation formelle, c’est l’appui à la programmation – soutenir l’ACUFC dans ses projets, ce qui permet d’appuyer le secteur. Nos relations informelles permettent de prendre le pouls de la réalité des membres, d’identifier les meilleures façons de mobiliser le secteur et de comprendre les besoins.»

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Pour France Fortier, cela sera d’autant plus important dans les mois à venir puisque Patrimoine canadien a obtenu dans le budget 2021 un financement supplémentaire de 121,3 millions $ sur trois ans pour l’éducation postsecondaire en contexte minoritaire.

«Nous souhaitons offrir un financement stabilisé pour des projets récurrents dans certaines provinces et territoires. On veut pouvoir répondre à des besoins pressants du secteur postsecondaire dans le cadre de projets complémentaires. Et nous voulons aussi soutenir la vitalité du secteur postsecondaire en appuyant des organismes et des communautés à entreprendre des projets qui contribueront à stabiliser le secteur», énumère France Fortier.

«La récente lettre de mandat de la ministre des langues officielles énonce clairement l’engagement du gouvernement à augmenter le financement des établissements d’enseignement postsecondaire dans les communautés de langues officielles en situation minoritaire», ajoute la directrice des opérations et de la coordination régionale pour Patrimoine canadien.

Une lettre de mandat

En Atlantique, le président-directeur général du Collège communautaire du Nouveau-Brunswick, Pierre Zundel, note avoir «un lien très étroit» avec la province de par la structure administrative de l’établissement.

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Pierre Zundel

«Ce lien-là est avec le ministère de l’Éducation postsecondaire, Formation et Travail, qui fournit notre financement directement.»

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«Le ministre nous donne une lettre de mandat chaque année qui est conséquente avec les priorités de la province et, on souhaite, avec notre plan stratégique – que ce ministère doit aussi approuver.»

«Le ministre doit aussi approuver chaque année notre plan d’affaires, qui doit être conséquent avec la lettre de mandat et le plan stratégique», indique Pierre Zundel.

Peu d’indépendance

Cette proximité présente à la fois des avantages et des désavantages selon lui. «Ça fait en sorte qu’on peut accéder assez facilement à un résumé des priorités au niveau de la formation pour combler les besoins du marché du travail. On peut profiter de ça pour notre planification au niveau des nouveaux programmes, de l’offre dans les régions, etc.»

D’un autre côté, «ça veut aussi dire qu’il n’y a pas énormément d’indépendance», nuance-t-il.

«Les gouvernements ont beaucoup à dire sur la direction du Collège. Typiquement, ça ne devient pas problématique, mais de temps en temps il va y avoir un désaccord par rapport aux priorités, et il faut alors négocier», explique M. Zundel.

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«Justifier notre raison d’être»

La situation est différente du côté de la Saskatchewan, où se trouve le Collège Mathieu, un établissement privé. «Il est vraiment important pour nous de travailler à faire valoir l’éducation postsecondaire en français et le volet collégial de formation professionnelle et technique», indique son directeur général, Francis Kasongo.

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Francis Kasongo

Celui-ci indique donc jongler avec de multiples relations: le ministère de l’Enseignement supérieur, le ministère de l’Éducation et l’Assemblée communautaire fransaskoise (ACF).

«L’ACF chapeaute différents comités et veille à toute la question de l’éducation postsecondaire en français dans notre province», en plus d’autres établissements francophones et anglophones «avec lesquels nous transigeons sur différentes articulations pour l’offre de programmes».

L’un des principaux chevaux de bataille du Collège, d’après Francis Kasongo, est de «faire connaitre nos besoins et nos aspirations, et s’inscrire dans les orientations ministérielles… Afin de pouvoir justifier notre raison d’être.»

«C’est un travail de longue haleine, mais qui a fini par donner des résultats probants en ce qui nous concerne», conclut-il.

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Sommet des États généraux du postsecondaire

Les États généraux sur le postsecondaire en contexte francophone minoritaire culmineront les 24 et 25 mars prochains lors du Sommet des États généraux 2022.

D’ici là, la Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA) du Canada organise des forums citoyens qui donnent la parole aux étudiants, aux diplômés et aux parents.

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