Daniel Marchildon est un écrivain qui aime l’Histoire et les histoires. Il a signé de solides ouvrages historiques et a raconté de savoureuses histoires sportives ou culturelles. Son tout nouveau livre réunit à merveille ses deux passions. Dans L’eau de vie (Uisge beatha), il conjugue la grande et la petite Histoire tout en racontant une saga familiale mouvementée qui sillonne deux continents et qui s’étend sur plus de huit siècles.
Quand l’auteur s’est rendu en Écosse il a découvert une affinité qui reposait en grande partie sur la proximité de l’eau et ce qu’on en faisait, soit le uisge beatha ou whisky. Comme il est lui-même originaire de la baie georgienne, il a fait le rapprochement entre la Huronie et l’Écosse, entre l’eau physique et l’eau mythique. Une histoire a dès lors germé dans l’imaginaire du romancier, une histoire qui fait le pont entre l’eau-de-vie (whisky) et l’eau de vie qui coule dans le sang de ses personnages.
Les gens que Daniel Marchildon met en scène enjambent trois lignées et plusieurs générations (de 1153 à nos jours). La protagoniste est Élisabeth Legrand, femme contemporaine de la Huronie natale du romancier. Lorsque l’auteur écrit qu’il est impossible qu’Élisabeth Legrand puisse vivre ailleurs qu’à Pointe-au-Phare, petite communauté de la baie georgienne, on peut aisément imaginer qu’il se projette dans son personnage.
Marchildon joue sur plusieurs tableaux historiques, de la défaite des Jacobins à la bataille des Plaines d’Abraham, en passant par l’exploration d’Estienne Bruslé et la bataille de Culloden en 1746. Il réussit à glisser dans son récit une scène amoureuse entre Bruslé et une Amérindienne de la nation des Ouendats, où l’eau de vie revêt un sens bien particulier. Bruslé vit un moment de passion avec Tiena. Résultat: «Son eau de vie venait de s’unir dorénavant à celle des Ouendats, à celle de leur pays et de leur sang.»
La petite communauté de Pointe-au-Phare vit dans le marasme économique et Élisabeth Legrand est déterminée à poser un geste qui va changer la situation. Elle décide d’ouvrir une distillerie pour confectionner l’ancien scotch Glen Dubh mis au point en Écosse par la famille Fearmòr. Le roman nous fait remonter la lignée de cette famille écossaise à partir du XVIIIe siècle, ce qui permet à l’auteur d’incorporer plusieurs termes de whisky/scotch en gaélique et, partant, de cerner l’aura particulière à son histoire.