Comprendre les violences sexuelles et sexistes chez les jeunes

«Pourquoi?», documentaire disponible sur onf.ca

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«Pourquoi ? La violence sexuelle chez les jeunes», un documentaire qui questionne les violences. Photo: ONF
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Publié 26/04/2023 par Dorian Vidal

Dans un documentaire produit par l’Office national du film du Canada (ONF), la réalisatrice Danielle Sturk aborde les violences sexuelles et sexistes chez les jeunes. Dans ce cas, le «silence nous rend complices», affirme la cinéaste. Ce court-métrage (39 minutes) est un appel à l’ouverture des conversations.

Disponible depuis le 3 avril en ligne sur onf.ca, la cinéaste franco-manitobaine mixe témoignages de jeunes filles et de jeunes garçons.

«La donne n’a pas changé depuis mon enfance!», écrit la cinéaste. C’est pour cette raison qu’elle s’est investie dans ce projet. Pour «ouvrir le dialogue sur la violence sexuelle».

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Danielle Sturk.

La «société patriarcale» en question

Comme dans la chanson Kid du chanteur Eddy de Pretto, il est question d’une «masculinité toxique», où les garçons doivent «cacher leurs émotions».

Le côté «toxique» de beaucoup de relations masculines s’illustre par l’incapacité de parler «d’émotions intimes», suscitée par la crainte d’être perçu comme «vulnérable» aux yeux de ses pairs.

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Quand la société autorise les violences

L’égalité des sexes, même si des progrès ont été réalisés, n’est pas encore une réalité. Comment justifier la différence de rémunération entre «les joueuses de soccer de l’équipe nationale du Canada et les joueurs de l’équipe masculine?», demande la cinéaste. 

Selon elle, cela montre aux jeunes «que les femmes valent moins dans tous les domaines». Les femmes sont alors rendues «plus vulnérables aux violences», car la société «ne combat pas et maintient les problèmes de sexisme systémique».

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Maxime Kornechuk, un des trois intervenants masculins. Photo: ONF

9e année: danger!

Les statistiques citées dans le film, tirés de Statistique Canada, sont assez marquants. Ainsi, «une fille sur trois est victime d’agression sexuelle au cours de sa vie», lisent les intervenants (8% des hommes).

Plus encore, «87% des victimes connaissent leur agresseur», et «70% des victimes d’agressions sexuelles déclarées ont 18 ans et moins». Chaque année, il y aurait 574 000 agressions sexuelles au Canada.

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Toujours selon ces études, la 9e année serait l’année du parcours scolaire durant laquelle on observe le plus grand nombre d’agressions. À la lecture de cette information, un des intervenants, Samuel Kornechuk, ne peut s’empêcher de dire «wow, ça c’est choquant».

Le film montre bien le désarroi et l’incompréhension des jeunes hommes confrontés à ces statistiques «horribles».

Cela veut dire «qu’il est temps de changer les choses», déclare alors Samuel Kornechuk. Il faut néanmoins garder en tête, rappelle le jeune homme, que ces chiffres concernent uniquement les agressions déclarées, et qu’il est «fort possible que les nombres soient beaucoup plus important dans la réalité».

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Samuel Kornechuk, lors de la lecture des statistiques. Photo: ONF

Les hommes en couleur, les femmes en noir et blanc

Comme dans toute oeuvre cinématographique, le choix des images et des plans est très important. Ainsi, la cinéaste alterne entre images en noir et blanc et couleur, pour illustrer que les expériences de violences sexuelles ont «un impact profond sur notre vision», qui est «dans un sens, vidée de couleur».

Danielle Sturk se sert de tous les outils cinématographiques pour faire passer son message. «Les témoignages féminins sont superposés aux photographies de plusieurs autres femmes qui ont participé aux séances de prise d’images», explique la cinéaste. 

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Tout ceci permet de «montrer un vécu surréel qui sépare le corps des pensées, ce qui est représentatif de l’expérience de traumatisme souvent liée à la violence sexuelle».

Le fait d’avoir les hommes en couleur et les femmes en noir et blanc vise à «mettre l’accent sur le travail à faire pour changer les attitudes et les comportements dans la culture masculine».

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En couleur, Joseph Owikoti, participant du documentaire, en opposition à une séquence en noir et blanc où l’on suit une victime. Photo: ONF

Un problème global

La lutte contre les violences sexuelles et sexistes n’est pas un combat réservé aux femmes. Loin de là. Pour la documentariste, c’est même plutôt l’inverse. La discussion «devrait être centrée» sur les hommes.

«98% des agresseurs sont de genre masculin.» Selon Danielle Sturk, il ne faut pas demander aux femmes de changer leur comportement. Il faut arrêter de «dire à nos filles comment éviter de se faire attaquer, agresser, harceler, sexualiser».

Combattre la «société du silence»

Plus encore, «le silence et la pression de ne rien dire sont très puissants», affirme Mme Sturk. Le silence est alors sans doute un des plus gros problèmes. «Le silence donne la permission, protège l’agresseur, encourage d’autres agressions», écrit la documentariste.

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«Notre responsabilité est de dénoncer pour protéger les autres, qui souffriront cent fois plus que nous le ferons en dénonçant. C’est ça, être citoyenne et citoyen.»

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Le noir et blanc pour illustrer les violentes conséquences des agressions sexuelles. Photo: ONF

Le rôle de l’éducation

Une intervenante du film explique que lorsqu’elle avait 18 ans, elle ne savait pas ce qu’était le consentement. «C’est absolument inacceptable», s’exclame la cinéaste. Pour répondre à ce problème, l’éducation doit jouer un rôle majeur. Pour elle, il y a un manque «flagrant» d’éducation.

Ça devrait être «une question de santé publique», mais «nous ne savons même pas par où commencer», explique Danielle Sturk.

Peut-être faudrait-il obliger les conseils scolaires à «reporter ou mesurer les violences sexuelles perpétrées par des élèves sur leurs élèves. Que ce soit à l’école, sur les réseaux sociaux, ou dans une fête entre camarades.»

Persévérer et ne pas baisser les bras

La cinéaste affirme que «le féminisme n’existe que parce que les hommes ne combattent pas activement le sexisme, celui qui les met dans des boîtes toxiques autant que les femmes».

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Toute la société est concernée. «Notre société entière est handicapée quand la moitié de sa population est ciblée et atteinte par cette violence», écrit-elle.

Pour enfin mettre terme à cette situation, «il faut pousser», et «demander que les écoles intègrent des cours sur la prévention sexuelle», explique Danielle Sturk.

Les gouvernements ont également un rôle à jouer, et doivent «développer ce curriculum», pour que «les professionnelles et professionnels en santé, en éducation et en justice soient formés sur la présence de la misogynie et de son expression dans tous les aspects de notre société.»

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