Les mots «Canadiens français» et «Québécois» ne devraient pas exister, ils sont un non-sens. Le seul mot qui a sa place est celui de «Canadiens». Voilà, en la résumant grossièrement, la thèse que Jean Morisset défend dans Sur la piste du Canada errant.
L’auteur écrit que, dans l’aventure coloniale aux Amériques, la rencontre des Blancs européens et des «Sauvages amériquains» (il respecte la graphie qui avait cours à l’origine) a produit le Canadien qui «demeure à peu près un des seuls ressortissants du Monde Nouveau».
Puis il ajoute que «les Canadiens en vinrent à se désigner eux-mêmes, par aliénation mentale et mimétisme linguistique, sous le vocable de « Canadiens français »». Ce terme, selon lui, est un anglicisme patent, voire une idée antinomique puisque la France y a recours pour marquer le moment défrancisation de son ancienne colonie.
Pas d’affirmation contre une mère patrie
Les Canadiens sont les Créoles du Canada et, si on décide d’inclure sous une même bannière «l’Haïtien de langue créole, l’Acadien de langue cajun, l’Antillais de langue créole, le Louisianais de langue enjazzée, le Canadien de langue canayenne et le Bois-Brûlé de langue métivée – sans oublier le Franco de langue anglo et la grande tribu de langue mélangée», il doit bien y avoir quelque trente à quarante millions de Francos à l’ouest de l’Atlantique.
En transcendant leur amériquanité et leur européanité, les Canadiens ont perdu «la possibilité d’affirmer un projet collectif». Contrairement au Pérou contre l’Espagne, au Brésil contre le Portugal et aux États-Unis contre l’Angleterre, les Canadiens n’ont pas pu s’affirmer comme État contre leur propre mère patrie.