Projet de loi 5: le député Sol Mamakwa expulsé

Projet de loi 5, Premières Nations, Autochtones
L’ancien chef et porte-parole de la Première Nation de Batchewana, Dean Sayers, demande au premier ministre Doug Ford de laisser tomber le projet de loi 5. Photo: Émilie Gougeon-Pelletier, Le Droit
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Publié 04/06/2025 par Émilie Gougeon-Pelletier

Le néo-démocrate Sol Mamakwa, seul député provincial membre des Premières Nations, a été expulsé de la période de questions, lundi, pour avoir déclaré que le premier ministre Doug Ford ne dit pas la vérité aux Premières Nations sur le projet de loi 5, Loi de 2025 pour protéger l’Ontario en libérant son économie.

«J’ai dit que le premier ministre dit des non-vérités, et j’ai été expulsé», a déclaré le député de Kiiwetinoong, à l’extérieur de la Chambre.

Le député Sol Mamakwa.
Le député Sol Mamakwa.

Avant d’ordonner son expulsion, la présidente de la Chambre lui a demandé de retirer ses paroles à trois reprises. Sol Mamakwa a refusé.

«J’ai dit la vérité. Et ils ne sont pas capables d’accepter la vérité», a soutenu le député.

Grands projets

Le gouvernement Ford s’apprête à clore le débat et à adopter le projet de loi 5, cette semaine.

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Ce texte législatif de grande envergure, qui fait partie du «plan pour protéger l’Ontario» du gouvernement progressiste-conservateur, vise à réduire les formalités administratives qui mettent un frein aux grands projets d’infrastructure, d’exploitation minière et de développement des ressources.

Le premier ministre Doug Ford espère notamment accélérer les opportunités d’exploitation minière du gisement du Cercle de feu, dans le nord-ouest de la province. Pour ce faire, il veut créer des zones économiques spéciales.

Loi sur les espèces en voie de disparition sera abolie

Le projet de loi 5 permettrait entre autres à la province de suspendre des lois provinciales ou municipales lorsqu’il est question de projets importants pour l’économie et retirerait des protections pour les espèces protégées.

S’il est adopté, la Loi sur les espèces en voie de disparition sera notamment abolie.

Alors que le premier ministre maintient que le gouvernement respectera les Premières Nations et l’obligation légale de la Couronne de consulter les dirigeants autochtones, Sol Mamakwa a laissé entendre lundi qu’il doute de cette bonne volonté.

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«Le gouvernement a affirmé respecter les Premières Nations et les droits issus des traités. Madame la présidente, nous savons que le premier ministre dit des non-vérités aux Premières Nations», a évoqué le député Mamakwa, soit les propos qui lui ont valu l’expulsion.

Le ministre des Affaires autochtones de l’Ontario, Greg Rickford, a soutenu que le projet de loi 5 «ne porte en aucun cas atteinte aux droits issus de traités ni ne compromet l’obligation de consulter».

Projet de loi 5, Premières Nations, Autochtones
Barry Chevrier, de la Baie James, se bat pour les droits des Premières Nations depuis plusieurs années. Photo: Émilie Gougeon-Pelletier, Le Droit

Idle No More

Certaines Premières Nations menacent de raviver le mouvement Idle No More, soit ce mouvement de contestation déployé en 2012 lors de l’adoption par le gouvernement fédéral de Stephen Harper d’une loi omnibus faisant plus de 400 pages.

Ce document comportait une série de modifications législatives et limitait les débats publics.

Le chef régional de l’Ontario, Abram Benedict, des Chefs de l’Ontario, qui représentent les 133 Premières Nations de la province, a mis en garde contre une répétition du mouvement, qui avait donné lieu à des manifestations à l’échelle nationale, notamment des blocages routiers et ferroviaires.

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«Il y a un peu plus de 10 ans, le gouvernement du Canada a présenté un projet de loi omnibus affaiblissant les protections environnementales afin d’accélérer le développement», a déclaré Abram Benedict aux législateurs à Queen’s Park, la semaine dernière.

Le chef régional de l’Ontario, Abram Benedict
Le chef régional de l’Ontario, Abram Benedict.

Respect

«Regardez l’histoire. Si le gouvernement ne respecte pas nos traités, les mouvements populaires prennent le dessus», a souligné le chef régional de la nation anichinabée, Scott McLeod, en conférence de presse quelques heures avant le début de la période de questions, lundi matin.

L’ancien chef et porte-parole de la Première Nation de Batchewana, Dean Sayers, lui aussi présent au point de presse, a demandé au premier ministre Ford de laisser tomber le projet de loi 5.

«Ça ne correspond pas à votre histoire, ça ne correspond pas à la nôtre, et ça ne correspond pas à la loi. Si vous allez de l’avant sans notre permission, nous vous en empêcherons. D’une manière ou d’une autre, nous vous en empêcherons», a assuré Dean Sayers.

Vendredi dernier, Doug Ford a déclaré que des barrages routiers en réponse au projet de loi seraient «très, très décevants», imputant l’opposition au projet de loi à un «très petit groupe très actif».

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Manifestation à Queen’s Park

Une foule de manifestants, y compris les dirigeants de plusieurs Premières Nations de l’Ontario, se sont d’ailleurs rendus à Queen’s Park, lundi, pour dénoncer le plan du gouvernement Ford.

Le groupe, convoqué par les Chefs de l’Ontario, a déclaré que le projet de loi 5 constituerait une «menace directe» pour leurs «terres, leur juridiction et leur souveraineté».

«Ils piétinent nos droits sans nous consulter», déplore Barry Chevrier, de la Baie James, qui se bat pour les droits des Premières Nations depuis plusieurs années.

«Il y a une différence entre protester et protéger, dit-il. Il faut protéger la terre, il faut protéger l’eau, il faut protéger les gens.»

Yuk-Sem Won, de Thunder Bay, parle de la nécessité d’éduquer la population des dangers du projet de loi 5.

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«Le gouvernement écoute la population quand on fait entendre notre voix. Et c’est le temps de le faire pour soutenir les peuples autochtones», note la syndicaliste et ex-candidate néo-démocrate aux élections fédérales.

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Yuk-Sem Won, de Thunder Bay, parle de la nécessité d’éduquer la population des dangers du projet de loi 5. Photo: Émilie Gougeon-Pelletier, Le Droit

Limiter les débats

Le projet de loi 5 devrait tout de même être adopté avant ce jeudi 5 juin, date de la suspension des travaux des députés pour l’été.

Lors d’une rare démonstration de complicité, les partis d’opposition ont travaillé ensemble lors des audiences du comité sur le projet de loi 5 la semaine dernière afin de retarder son adoption. Ils ont déposé une multitude d’amendements et ont forcé la tenue d’interventions supplémentaires pour ralentir le débat et faire obstruction au comité.

Une motion d’attribution de temps du gouvernement devrait toutefois permettre l’adoption du projet de loi avant la fin de la semaine, alors qu’une séance marathon du comité est prévue mardi.

Son adoption finale est prévue peu après, étant donné que le gouvernement progressiste-conservateur est majoritaire.

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tarifs, Le premier ministre de l'Ontario, Doug Ford.
Le premier ministre de l’Ontario, Doug Ford.

Plusieurs Premières Nations jugent qu’en limitant les débats et les consultations auprès de leurs communautés, le gouvernement ontarien ne respecte pas ses obligations en vertu des traités avec les peuples autochtones.

Certaines d’entre elles assurent qu’elles n’hésiteront pas à s’opposer au gouvernement ontarien si ce projet de loi est adopté.

«Le temps de la diplomatie est compté», a lancé le chef régional de la nation anichinabée, Scott McLeod.

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