L’Ontario mal équipé pour faire face à la crise des opioïdes

Selon la vérificatrice générale

crise des opioïdes
À Sudbury, plus de 150 croix blanches ont été érigées en souvenir des victimes de la crise des opioïdes. Photo: Patrick Woodbury, archives Le Droit
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Publié 05/12/2024 par Émilie Gougeon-Pelletier

Le gouvernement progressiste-conservateur de Doug Ford a mal planifié sa décision de modifier les services de consommation supervisée à travers la province, selon le rapport annuel de la vérificatrice générale de l’Ontario.

Au lendemain de l’adoption du projet de loi forçant la fermeture de 10 des 19 sites de consommation supervisée à travers la province, la vérificatrice générale de l’Ontario dévoile dans son rapport annuel que la décision a été prise «en l’absence d’une planification adéquate, d’une analyse d’impact ou de consultations publiques appropriées».

Alors que le bureau de la VG effectuait déjà un audit sur la Stratégie ontarienne relative aux opioïdes, l’été dernier, la ministre de la Santé, Sylvia Jones, a annoncé son intention d’interdire les services de consommation supervisée à moins de 200 mètres des écoles ou des garderies.

Depuis, Sylvia Jones a indiqué qu’aucun nouveau site de consommation supervisée ne serait permis en Ontario. Son projet de loi a été adopté à Queen’s Park, ce lundi 2 décembre.

Or, le ministère de la Santé n’a «élaboré aucun plan exhaustif pour évaluer et quantifier les répercussions sur la santé publique et le système de santé de l’Ontario», comme une augmentation potentielle des surdoses et des visites aux urgences, «avant de finaliser sa décision d’adopter une nouvelle loi», estime la vérificatrice générale de l’Ontario, Shelley Spence.

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Doug Ford a déjà dit que les centres de consommation de drogue supervisée, «c’est comme donner un laissez-passer gratuit pour la LCBO à un alcoolique». Photo: iStock.com/Farion_O

Les carrefours Hart

L’alternative proposée par la ministre Jones, soit un investissement de 378 millions $ dans un nouveau modèle de «carrefours d’aide aux sans-abri et de lutte contre les dépendances», surnommée Hart, en anglais, «a été décidée sans évaluation fondée sur les besoins», selon la VG.

Shelley Spence rappelle que les carrefours HART n’offriront pas certains services «essentiels de réduction des méfaits» comme la consommation supervisée ou les programmes d’échange d’aiguilles.

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La ministre Sylvia Jones.

Ces services ont «prouvé leur utilité pour prévenir les décès par surdose», indique-t-elle dans son rapport.

En 2022-2023 seulement, dit-elle, «les 10 sites qui fermeront leurs portes après l’adoption de la nouvelle loi avaient permis de prévenir des décès lors des plus de 1500 surdoses survenues sur place».

Le ministère de la Santé «n’a pas non plus mené de consultations officielles auprès des parties prenantes touchées», souligne la vérificatrice générale, «dont les utilisateurs des sites qui seront fermés et les populations à risque élevé, y compris les collectivités du Nord, les populations autochtones et les jeunes».

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Par exemple, le seul site de consommation supervisée restant dans le nord de l’Ontario, situé à Thunder Bay, fermera ses portes au cours des prochains mois.

Cette région affichait le plus haut taux de décès imputables aux opioïdes en 2023.

Stratégie ontarienne

La VG conclut par ailleurs que la Stratégie ontarienne relative aux opioïdes de 2016 est maintenant désuète et «ne tient pas compte de l’augmentation des risques et des besoins, même avec le nouveau modèle des carrefours» Hart.

Shelley Spence, opioïdes
Shelley Spence.

Les tendances à la hausse de l’usage de plusieurs substances psychoactives et la consommation d’opioïdes illicites posent toujours des risques, mais ce n’est pas pris en compte dans cette stratégie, selon Shelley Spence.

Lorsque cette stratégie a été mise en place, la crise des opioïdes était principalement attribuable à la délivrance non nécessaire et à la prescription excessive d’opioïdes, rappelle la vérificatrice.

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Depuis, la crise s’est intensifiée avec l’approvisionnement en drogues illicites et la prévalence d’opioïdes puissants comme le fentanyl.

Pour une meilleure lutte contre les dépendances, il faudrait régler les lacunes en matière de suivi des données, souligne aussi le bureau de Shelley Spence.

«La Stratégie relative aux opioïdes n’a pas de structure de responsabilisation et de direction clairement définie», peut-on lire dans le rapport.

Recommandations

Le rapport annuel publié ce mardi 3 décembre par le bureau de la vérificatrice générale comprend une dizaine d’audits et de rapports sur les comptes publics de la province.

Le ministère de la Santé a accepté les sept recommandations formulées par la VG dans son audit sur les opioïdes, selon son bureau.

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