L’infrastructure de collèges et universités francophones en «rattrapage»

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En juin, le Campus Saint-Jean de l’Université de l’Alberta, à Edmonton, a reçu 13,3 millions $ de la part des gouvernements fédéral et provincial, pour notamment mettre à jour l’équipement de son laboratoire de chimie. Photo: Université de l’Alberta
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Publié 09/09/2024 par Marianne Dépelteau

En milieu minoritaire francophone, certains établissements postsecondaires peinent à trouver les fonds pour financer l’entretien de leurs installations et de leurs équipements. Les subventions des gouvernements sont souvent plusieurs millions de dollars en deçà des besoins réels des collèges et universités.

Le 22 août dernier, les gouvernements du Canada et du Nouveau-Brunswick ont annoncé plus de 2,7 millions $ sur deux ans pour l’Université de Moncton. Les fonds permettront de moderniser les équipements spécialisés des trois campus de l’établissement, «pour qu’ils répondent aux normes actuelles du marché du travail», lit-on dans le communiqué de presse.

Ils visent aussi à «remplacer l’équipement informatique dans les laboratoires de formation, devenu incompatible avec les versions récentes des logiciels professionnels» et à financer des travaux de rénovation aux campus d’Edmundston et de Shippagan.

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L’Université de Moncton a reçu un financement pour mettre à jour de l’équipement qui n’était plus aux normes. Photo: courtoisie Université de Moncton

La taille des collèges et universités compte

«Je dirais que [dans] toutes les institutions, particulièrement dans les milieux minoritaires, il y a un rattrapage à faire au niveau de l’infrastructure physique», observe le recteur de l’Université de Moncton, Denis Prud’homme, en entrevue avec Francopresse.

Selon ses estimations, l’institution aurait besoin d’environ 120 millions $ sur les dix prochaines années pour «mettre à niveau le maintien ordinaire» de ses édifices et de ses résidences.

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Le Campus Saint-Jean en Alberta effectue présentement des rénovations pour améliorer, entre autres, les salles de classe, les lieux communs et le gymnase.

«C’est du rattrapage. Le Campus Saint-Jean ne date pas d’hier. Il y a quand même, selon moi, des rénovations qui auraient dû être faites il y a longtemps», déclare le doyen, Jason Carey.

Jason Carey
«Sans l’Université de l’Alberta, on ne réussirait pas. C’est vraiment notre meilleur allié», dit Jason Carey. Photo: Université de l’Alberta
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Le campus Saint-Jean de l’Université de l’Alberta. Bâtiments, laboratoires, résidences, bibliothèques, les établissements postsecondaires ont besoin d’une infrastructure fonctionnelle, mais attirante aussi. Photo: Université de l’Alberta

Le financement gouvernemental reçu et celui qui sera reçu dans les prochaines années répondent seulement aux «besoins immédiats, dit-il. On pourrait toujours en faire plus.»

Il existe, avance Denis Prud’homme, une différence entre les grands établissements et ceux de petites et moyennes tailles. Et comme il le rappelle, la majorité des établissements francophones en situation minoritaire font partie du second groupe.

«On doit offrir des installations équivalentes à ce qu’on retrouve dans les grandes universités, mais on n’a pas ce qu’on appelle le gain d’échelle du volume du nombre d’étudiants pour financer ces infrastructures et ces équipements.»

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«​​C’est là que le gouvernement fédéral, à travers Patrimoine canadien, a la responsabilité – sur la base de la Loi sur les langues officielles – de prendre des actions positives pour que les francophones dans les milieux minoritaires aient accès à des institutions postsecondaires qui offrent un environnement de formation et d’enseignement équitable aux grandes universités», ajoute-t-il.

Denis Prud’homme
Denis Prud’homme remercie les gouvernements pour les 2,7 millions $, mais explique qu’il en faudrait plus à l’avenir. Photo: Pascal Raiche-Nogue, archives Acadie Nouvelle

Où le fédéral peut intervenir

Selon la sénatrice Lucie Moncion, qui demande une stratégie nationale sur le postsecondaire, financer l’infrastructure reste l’un des leviers du gouvernement fédéral pour soutenir le postsecondaire sans empiéter sur les champs de compétences provinciales.

Lucie Moncion
La sénatrice Lucie Moncion. Photo: courtoisie

En entrevue avec Francopresse en avril dernier, elle a rappelé le cas de l’Université Laurentienne, en Ontario, qui s’est mise à l’abri de ses créanciers menant au renvoi de centaines d’employés et la fermeture de nombreux programmes.

Elle explique que l’établissement a voulu attirer des étudiants en investissant dans son infrastructure, ce qui a engendré des dettes importantes et un problème dans la «liquidité qui était utilisée pour rembourser les emprunts qui avaient été faits pour l’infrastructure».

Le président-directeur général du Collège communautaire du Nouveau-Brunswick (CCNB), Pierre Zundel, rappelle que les établissements francophones en situation minoritaire ont accès à des fonds «pour des investissements dans un renouvèlement de technologie pédagogique, par exemple».

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Pierre Zundel
Le PDG du CCNP, Pierre Zundel. Photo: courtoisie CCNB

Ces fonds sont compris dans le Programme des langues officielles en enseignement (PLOE) du fédéral et ont permis au CCNB d’intégrer de nouvelles technologies dans ses salles de classe.

Mais ce programme n’est pas toujours suffisant. Par exemple, le Campus Saint-Jean n’a pas vu sa part du gâteau PLOE augmenter entre 2009 et 2021, une réalité déplorée par l’Association canadienne-française de l’Alberta (ACFA) au Comité permanent des langues officielles en 2021.

Plus cher qu’avant

«On devrait avoir un investissement plus important des deux paliers du gouvernement pour accélérer la mise à niveau de nos infrastructures physiques, estime Denis Prud’homme. Puis plus on retarde, évidemment les coûts peuvent augmenter.»

Ça fait près de 40 ans que Pierre Zundel œuvre dans le postsecondaire francophone. «Je peux vous dire que presque partout, il y a systématiquement un sous-investissement dans l’entretien de l’infrastructure des institutions postsecondaires», affirme-t-il.

Pierre Zundel espère moderniser le campus prochainement, un projet qui coûterait à lui seul jusqu’à 150 millions $ de plus. «Dans les 5 dernières années, on a vu les coûts de construction doubler ou tripler. Ce qu’on avait évalué à 20 quelques millions coûte maintenant 35 millions $.»

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Une salle de cours de sciences de la santé au campus du Collège Boréal à Toronto. Photo: courtoisie Collège Boréal

Des prix de construction en hausse

Selon Statistique Canada, l’indice des prix de construction de bâtiments non résidentiels a augmenté partout au pays dans les dernières années.

Pour les bâtiments institutionnels comme les écoles, Ottawa présente l’indice le plus élevé, suivie par Toronto. Moncton a dépassé Montréal en 2023.

Michel Doucet
Le Collège Boréal ne refuserait pas plus de financement pour l’infrastructure, dit Michel Doucet, qui est tout de même confiant par rapport à la situation financière de l’établissement. Photo: courtoisie Collège Boréal
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À Nipissing Ouest, le Collège Boréal vient tout juste de terminer la rénovation du campus grâce à une subvention. Photo: courtoisie Collège Boréal

Pour que collèges et universités demeurent attirants

Au Collège Boréal, qui dispose de huit campus en Ontario, les infrastructures vont bien, assure son vice-président aux Services corporatifs, Michel Doucet.

Pour assurer la meilleure expérience possible à ses étudiants, le Collège Boréal met régulièrement à jour ses équipements et installations. «Un bel exemple, c’est que le Collège Boréal vient d’accueillir un simulateur d’ambulance, qui est unique en Ontario et le troisième du genre au Canada, pour un investissement de 700 000 $», se réjouit-il.

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Le simulateur d’ambulance du Collège Boréal. Photo: courtoisie Collège Boréal

Entre les financements gouvernementaux et les projets d’investissement, l’établissement dépense entre 4 et 6 millions $ par an pour l’entretien de ses infrastructures.

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«Les besoins ont changé, explique M. Doucet. Les étudiants d’il y a 10, 15 ans n’avaient pas les mêmes besoins avec l’[évolution] de la technologie.»

Jason Carey explique que des équipements et locaux mis à jour attirent les inscriptions. «Les étudiants veulent venir dans un environnement qui les encadre bien, qui représente leur vision de ce qu’ils veulent faire, d’où ils veulent aller. [Alors il faut] créer un environnement moderne, qui retient quand même aussi le côté historique de l’établissement.»

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