Le refus de la modernité entraîne la fin de La Patente

Hugues Théorêt, La Patente
Hugues Théorêt, La Patente: L’Ordre de Jacques-Cartier, le dernier bastion du Canada français, essai, Québec, Éditions du Septentrion, 2024, 200 pages, 24,95 $.
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Publié 15/06/2024 par Paul-François Sylvestre

Au début du XXe siècle, les Canadiens anglais profitent du réseautage découlant des loges maçonniques, des Knights of Columbus et de l’Ordre d’Orange. Sentant le besoin de se doter d’une organisation semblable pour défendre leurs droits, les Canadiens français créent «La Patente»: l’Ordre de Jacques-Cartier en 1926, dans la région d’Ottawa.

Hugues Théorêt décrit la montée et la chute de cette société secrète dans La Patente: l’Ordre de Jacques-Cartier, le dernier bastion du Canada français. Jacques Cartier ayant découvert le Canada en 1534, il est une figure de choix pour décrire la portée de l’Ordre de Jacques-Cartier (OJC) «qui dépassait largement les frontières de la province de Québec».

Fondé dans le sous-sol d’un presbytère

L’auteur décrit d’abord la fondation de l’OJC dans le sous-sol du presbytère du curé François-Xavier Barrette, sa structure, son rituel d’initiation et son mensuel L’Émerillon (1930-1965).

Il souligne ensuite les réalisations de l’Ordre, souvent appelé La Patente, notamment les timbres, billets de banque et pièces de monnaie bilingues, l’achat chez nous, la défense des minorités francophones hors Québec, la lutte contre le communisme et l’autonomie provinciale du Québec.

D’autres points de vue

Divers livres et des articles ont paru avant cet ouvrage de Théorêt, mais leur portée n’a pas été aussi grande.

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Denise Robillard s’est attardée au rôle du clergé au sein de l’Ordre et «aux divergences de visions entre Canadiens français majoritaires du Québec qui appuyaient l’idée d’indépendance du Québec et ceux issus des minorités dans les autres provinces canadiennes».

Les historiens Robert Choquette, Marcel Martel et Michel Bock ont mis l’accent sur le rôle des Franco-Ontariens au sein de l’Ordre.

Roger Cyr a jeté un pavé dans la mare en révélant «les secrets de la maçonnerie canadienne-française».

James Trépanier s’est concentré sur les rivalités entre l’OJC et les Knights of Columbus.

Philippe Volpé s’est penché sur le projet économique de l’Ordre au Nouveau-Brunswick.

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La Révolution tranquille

Bien que l’Ordre de Jacques-Cartier ait apporté sa contribution à l’adoption du fleurdelisé comme drapeau officiel du Québec le 21 janvier 1948, «il n’était pas nécessairement en faveur de l’idée de créer un État francophone indépendant en Amérique du nord».

Face à la Révolution tranquille, l’OJC reste attaché aux valeurs traditionnelles et demeure dépassé par les événements.

L’OJC plaçait Dieu et la patrie sur un pied d’égalité, Or, le Québec était rendu ailleurs. L’auteur écrit que «l’Ordre de Jacques-Cartier n’a jamais voulu embarquer dans le bateau de la modernité. Devenue un vieux rafiot qui prenait l’eau, la Patente était donc prédestinée à couler avec ses vieux principes. Le naufrage était inévitable.»

Fin en mars 1965

Avec ses secrets dévoilés et la Révolution tranquille qui faisait son œuvre, «l’Ordre de Jacques-Cartier n’eut d’autre choix que de se saborder». La dissolution des Commandeurs de l’Ordre de Jacques-Cartier est annoncée par télégramme le 3 mars 1965. On tente d’afficher un air de mission accomplie.

Les administrateurs décrètent la dissolution «en raison de l’existence et de la puissance de nombreuses structures sociales, économiques et nationales au Canada français et parce que l’Ordre a accompli sa mission».

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Le télégramme souligne que la Patente se glorifie de léguer à la nation canadienne-française «une floraison d’œuvres et de réalisations positives qui lui survivront».

Auteurs

  • Paul-François Sylvestre

    Chroniqueur livres, histoire, arts, culture, voyages, actualité. Auteur d'une trentaine de romans et d’essais souvent en lien avec l’histoire de l’Ontario français. Son site jaipourmonlire.ca offre régulièrement des comptes rendus de livres de langue française.

  • l-express.ca

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