Avec Esprit de sel, Maurice Henrie publie son douzième livre. Cet ouvrage réunit de courts textes – quelques lignes, quelques paragraphes, parfois deux pages tout au plus – qui portent sur des sujets aussi divers que les souvenirs de voyage, d’enfance ou de lectures, les réflexions sur les travers de la société ou encore sur une pratique de l’écriture depuis vingt ans.
Entre 1988 et 2008, Maurice Henrie a publié des recueils de nouvelles, des essais, deux ouvrages satiriques sur la fonction publique et trois romans, pour lesquels il a reçu de nombreux prix et distinctions. Cet auteur franco-ontarien affectionne les textes courts, mi-nouvelles, mi-essais. Ceux d’Esprit de sel semblent plus personnels et plus authentiques que les autres. On a presque l’impression de feuilleter un journal intime.
La page couverture indique qu’il s’agit d’un récit, mais la page plein titre précise que nous tenons en main des «carnets littéraires». La couverture montre un homme songeur ou dépressif, sur lequel est griffonnée cette phrase: «Vous pensiez en avoir fini avec les mots.» Dans ce que l’auteur appelle une préface (mais qu’il signe lui-même!), on peut lire que Maurice Henrie «croyait le moment arrivé de se taire». En s’exerçant au silence, il «s’est petit à petit remis à parler». Résultat: il nous offre 154 notules «accumulées au jour le jour depuis plusieurs années».
Récit, carnets littéraires ou notules, ces textes sont livrés par un écrivain qui a «une haute idée de l’écriture et [qui] prétend mériter, chez chaque lecteur, son attention entière et le meilleur de lui-même. Sinon, qu’il aille lire ailleurs!» Maurice Henrie estime que l’écrivain est un être qui «perçoit la faille, la fêlure du monde», et qui décide de s’interposer en dépit de ses faibles moyens. Il écrit pour trouver «la solution finale à ce qui semble une énigme déchiffrable».
Pendant des années, l’écrivain écrit avec enthousiasme et abondance. Quand il constate que le succès tarde à venir, il commence à hésiter. Va-t-il se taire ou écrire un autre livre? Le destin ultime de l’écrivain, se demande Henrie, n’est-il pas de se taire après avoir trop longtemps parlé? Ce serait trop facile. On n’en a jamais fini avec les mots.