Art et passion n’excusent pas la violence

violence, Christine Gosselin, Regarder les coulisses se répandre
Christine Gosselin, Regarder les coulisses se répandre, roman, Montréal, Éditions Hamac, 2023, 126 pages, 17,95 $.
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Publié 10/06/2023 par Paul-François Sylvestre

Le théâtre a été inventé pour réunir les gens, mais ici, il «ne nous a jamais autant divisés. Je suis ton esclave.» Ainsi s’exprime Esther, narratrice du roman Regarder les coulisses se répandre, de Christine Gosselin, et victime de la violence d’un comédien-amoureux-bourreau qui la trompe, la viole et la bat.

Métaphore théâtrale, le roman se décline en actes et scènes. Femme dans la vingtaine, Esther ignore comment «la pièce» se terminera, mais souhaite que les bouquets de fleurs lancés sur la scène après les prestations ne recouvrent pas sa pierre tombale.

Elle est prête à mettre sa vie en veilleuse pour que le projecteur soit seulement braqué sur son amant-bourreau. La jeune femme présume que son partenaire est méchant avec elle parce qu’il l’aime. «On écœure ceux qu’on aime.»

Le syndrome de l’imposteur

Esther souffre du «syndrome de l’imposteur», elle est «otage du simulacre». Elle joue le rôle que lui assigne le comédien violent et ne remet jamais en question le scénario imposé.

Cet homme est persuadé que le métier d’acteur lui dicte d’élire domicile à l’intérieur de quelqu’un. En donnant une âme à tous ces personnages différents, il perd la sienne.

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Une fois que le comédien a joui rapidement, il dépose quelques billets sur la table de chevet. La victime se dit qu’elle a une valeur calculable. «Mon sexe est un guichet automatique. Je suis ta prostituée à rabais.»

Jamais appris à dire non

Esther n’a jamais appris à dire non. Lorsque son tortionnaire lui grimpe dessus, elle découvre à quel point elle demeure incapable de crier son refus. «Mes lèvres s’entrouvrent et un silence s’évade.»

Avant sa rencontre avec ce comédien abject, Esther se trouvait belle, maintenant elle ne se trouve même plus. «Je pleure du sang, je sue des larmes, je me vide de mon espoir: mon corps ne m’appartient plus.»

Elle reste immobile dans le séisme de sa chair jusqu’à ce que le claquement de la porte lui indique que le rideau est tombé. Elle se demande si tout cela est vraiment arrivé, car elle n’en parle jamais.

Un peu d’anglais

Des citations en anglais, entre autres de William Shakespeare (The Merchant of Venice) et de Tennessee Williams (A Streetcar Named Desire), sont traduites en bas de pages. Ce n’est pas le cas pour un extrait d’une chanson de Janis Joplin ou de la comédie musicale All That Jazz.

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Plusieurs brefs commentaires à l’intérieur de la narration ou des dialogues sont écrits en anglais seulement. En voici quelques exemples: head over heels for you, bad guys like me need good girls like you, for a fat ass like me, whore, slut et cunt.

Violence conjugale: pas d’excuses

Regarder les coulisses se répandre est un roman important sur la violence conjugale dans laquelle le tortionnaire utilise son art et sa passion comme excuses.

Le logo de l’association SOS Violence conjugale apparaît en dernière page pour offrir une ressource aux personnes affectées par une telle situation ou en ayant été témoins.

Christine Gosselin est née à Saint-Georges de Beauce, a grandi à Beauport et vit maintenant à Montréal. Regarder les coulisses se répandre est son second roman, après Larves de vie paru en 2021.

Auteurs

  • Paul-François Sylvestre

    Chroniqueur livres, histoire, arts, culture, voyages, actualité. Auteur d'une trentaine de romans et d’essais souvent en lien avec l’histoire de l’Ontario français. Son site jaipourmonlire.ca offre régulièrement des comptes rendus de livres de langue française.

  • l-express.ca

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