L’ombre de Rosa : Fernande Chouinard veut ramener les morts

Fernande Chouinard, L’ombre de Rosa, livre
Fernande Chouinard, L’ombre de Rosa, roman, Ottawa, Éditions David, coll. Voix narratives, 2021, 190 pages, 24,95 $.
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Publié 09/05/2021 par Paul-François Sylvestre

Le mal peut-il engendrer le bien? La haine peut-elle compenser l’amour? Voilà deux questions auxquelles Fernande Chouinard tente de répondre dans le roman L’ombre de Rosa, publié aux Éditions David.

Si le ton et l’intrigue n’ont rien de durs, on en vient à se demander si la dureté de la vie, elle, peut faire franchir la ligne de la moralité…

Rêver d’une vie meilleure

Jak, le personnage principal de L’ombre de Rosa, a quitté sa ville natale depuis plus de vingt ans. Il rêve d’une vie meilleure, loin de son pays plombé par la dictature.

Or, le passé le rattrape et Jak ne parvient pas à oublier le meurtre de Rosa Kamel, 19 ans, jeune fille dont il était follement amoureux quand il était étudiant.

Le nom du pays ou de la ville n’est jamais mentionné. Un nom (Kamel), le prénom d’un ami (Farid), une rue (Jasmins), des arbres (cèdre, cyprès) et une révolution m’ont laissé croire que l’action pouvait peut-être se passer au Maghreb ou au Liban.

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L’action se déroule pendant une semaine

Fernande Chouinard écrit que Jak porte depuis vingt ans la douleur traînée après la mort de Rosa «comme une ceinture de crin». Son corps porte «le souvenir d’un visage aimé et les traces d’un combat inachevé».

L’action ou la non-action se déroule pendant une semaine dans le Café Yasmine où resurgissent certaines figures oubliées.

Jak y arrive, convaincu de son choix, certain qu’il n’est pas un assassin, mais un justicier. Hanté par des événements et des sentiments passés, il se sent petit à petit détourner de sa cible, celle de retrouver le soldat qui a tué Rosa et lui faire subir le même sort.

Petites réflexions de Fernande Chouinard

Fernande Chouinard excelle dans l’art de glisser en douce, ici et là, des petites réflexions comme «L’amitié, la vraie, résiste aux démesures de l’histoire.» Ou encore: «On ne ramène pas les morts en les racontant. Une amitié non plus.»

Le meurtre de Rosa a été camouflé sous un arrêt cardiaque. Jak est convaincu qu’il ne peut compter que sur lui-même pour régler ses comptes puisque la justice a déjà étouffé le crime.

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Il se dit que le comportement rebelle de Rosa et son geste d’insoumission auraient été qualifiés de bravoure s’ils avaient été accomplis par un garçon. Mais elle était «une fille invisible dans l’histoire», et Jak ne pardonnera jamais cela.

Une voix intérieure

Tout au long du roman, un Jak questionneur est rappelé à l’ordre par une voix intérieure qui creuse une galerie souterraine, «calmant l’angoisse, inspirant le mépris, ordonnant de tuer».

Parallèlement, «toute la vengeance et tout le ressentiment qui l’enveloppaient le poussaient à passer à l’acte, mais tout ce qui lui restait de morale et de scrupules s’opposait à sa raison».

Loin de moi l’idée de vous révéler le dénouement de l’intrigue de Fernande Chouinard. Je peux néanmoins m’aventurer à dire que rien n’est fixé à tout jamais, ni les meilleurs sentiments ni les pires intentions…

Troisième roman de Fernande Chouinard

Originaire de Tracadie au Nouveau-Brunswick, Fernande Chouinard a été enseignante, conseillère en pédagogie et administratrice scolaire.

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Elle signe ici son troisième roman, après La tailleuse de clés (Perce Neige, 2012) et Sans réserve (La Grande Marée, 2016).

Auteur

  • Paul-François Sylvestre

    Chroniqueur livres, histoire, arts, culture, voyages, actualité. Auteur d'une trentaine de romans et d’essais souvent en lien avec l’histoire de l’Ontario français. Son site jaipourmonlire.ca offre régulièrement des comptes rendus de livres de langue française.

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